mercredi 19 mars 2025

Icarus Swarm a testé des essaims de drones avec l'armée de Terre

La société bordelaise Icarus Swarm a testé aux côtés de l'armée de Terre la mise en oeuvre d'essaims de drones depuis des véhicules blindés. 

Images : armée de Terre / Icarus Swarm.


Icarus Swarm est une PME bordelaise à la notoriété plutôt confidentielle, mais vous les connaissez peut-être sous le nom de leur société sœur -ou plutôt mère- Dronisos, spécialiste des spectacles géants impliquant des milliers de drones. Depuis la déclenchement de la guerre en Ukraine en effet, et l'impact que constitue la révolution des drones sur le champ de bataille, Dronisos a fondé Icarus pour mettre à profit son expérience des essaims de drones dans une collaboration avec le monde de la défense.

Présente en Californie pour l'exercice multinational "Capstone 5" (Etats-Unis, Royaume-Uni, Australie, Canada, Nouvelle-Zélande), consacré à la robotique et à ses ruptures, Icarus Swarm et la 13e DBLE (demi-brigade de blindés légers) ont mené des essais grandeur nature en installant des "ruches" directement sur le toit d'un blindé Griffon de l'armée de Terre. Le test incluait aussi un 4x4 Masstech. 


Même si l'exercice impliquait une zone plutôt réduite (quoique, les opérations drones vs drones en Ukraine se limitent à une bande de quelques kilomètres d'épaisseur), on comprend ici tout l'intérêt de s'exercer au déploiement et à l'action rapide (environ 20 minutes tout compris) pour une équipe d'opérateurs à bord de deux véhicules seulement. 

La campagne touchait au domaine du C2, le Command & Control. Dans cas d'espèce en effet, pas de drone suicide, ou du moins pas encore, mais un essaim qui durant le survol d'une zone, permet sa modélisation en trois dimensions, au service des planificateurs. 

Plus généralement, la maîtrise de cette capacité à déployer des essaims, qui va bien au delà de l'utilisation faite aujourd'hui (1 opérateur pour 1 drone), est évidemment urgente.  



lundi 17 mars 2025

Airbus apporte son soutien au bombardier d'eau d'Hynaero


La division Defence & Space du groupe Airbus a annoncé son soutien technique au programme de bombardier d'eau amphibie Fregate-F100 de la société Hynaero. Un coup de pouce bienvenue au moment décisif où la start-up bordelaise entame d'importantes campagnes de levées de fonds. 

Ci-dessus: vue d'artiste du Fregate-F100 - Hynaero.


Airbus Defence and Space et Hynaero ont annoncé en fin de semaine dernière la conclusion d'un mémorandum d'accord, vrai partenariat stratégique, couvrant "l’ensemble du déroulement du programme Fregate-F100 et de sa vie opérationnelle avec notamment le support à la conception, à la certification et la maintenabilité de l'aéronef, ainsi que sa promotion auprès de clients potentiels dans le monde entier"

Airbus, qui continue de mener régulièrement des tests de lutte anti-incendie, sur ses avions militaires A400M (le groupe est aussi actif dans ce domaine avec les hélicoptères et les satellites de surveillance), voit en effet le programme Fregate-F-100 comme complémentaire à ses activités. Un soutien technique sera donc apporté durant le développement de l'appareil. 

Hynaero a multiplié les annonces de partenariats ces deux dernières années (privés et publics), et l'ajout d'Airbus est assurément une marque de prestige et de confiance. Le Fregate-F-100, grâce aux technologies modernes, doit littéralement écraser les capacités de l'antique Canadair, avec notamment une capacité d'écopage de 10 tonnes d'eau contre 6. 

Mais comme tout programme de conception d'un nouvel avion, le budget nécessaire est impressionnant : un milliard d'euros. 

Coup de pression sur la région bordelaise ? 

Dans l'immédiat, Hynaero doit d'abord trouver les 15 millions d'euros qui lui permettront de vraiment débuter le développement de l'appareil (la phase de conception détaillée), dont le design a légèrement évolué à la suite des études de faisabilité. Un moteur sera aussi choisi prochainement. Les partenaires financiers sont là, et Hynaero dispose d'ailleurs de trois lettres d'intention pour des commandes. Les investisseurs seraient cependant dans l'attente d'un engagement ferme de l'Etat, alors que ce sont toujours les Canadiens de DHC, avec leur emblématique mais vieillissant Canadair, qui tiennent la corde à Paris comme à Bruxelles pour les nouveaux contrats de renouvellement de flotte(s). 

L'objectif demeure de disposer d'un prototype en 2029, afin de lancer la commercialisation en 2031.

Une interview donnée dans le journal Sud Ouest ce dimanche nous apprend par ailleurs que la start up est fortement sollicitée par d'autres collectivités (Rochefort, Pau, Nîmes, Saint-Nazaire) pour l'implantation de son futur site, qui générera selon elle 500 emplois directs et 2 000 indirects. Elle attend donc un geste de la Région Nouvelle Aquitaine, qui a été, rappelons-le, la première à lui faire confiance (300 000 euros de subvention). Un petit coup de pression -qui vise surtout la métropole bordelaise a priori- que l'on tentera tout de même de désamorcer : les autres sites évoqués ne semblent disposer, ni de l'écosystème (notamment les sous traitants), ni, surtout, de la masse mobilisable de ressources humaines qualifiées pour faire vraiment le poids avec Bordeaux sur un projet d'une telle envergure. 

Pour rappel, Hynaero dispose aujourd'hui d'un petit bureau à Mérignac, dans les locaux du "Cockpit" de Bordeaux Technowest. 


vendredi 14 mars 2025

Marche arrière toute sur le F-35 au Portugal, une chance pour le Rafale ?


La piste du F-35 se refroidit très largement au Portugal, après les déclarations dans la presse du ministre de la défense jeudi 13 mars. Le pays avait pourtant ouvertement privilégié cet avion pour le futur remplacement de ses F-16. Désormais, dans un contexte géopolitique historique, la porte est ouverte pour les avions de combat européens, dont le Rafale. 

Ci-dessus: Emmanuel Macron au Portugal fin février 2025 - photo Elysée.


Cela devait arriver, commencer quelque part en Europe. Conséquence directe de la nouvelle politique diplomatique américaine, brutale, le Portugal annonce par la voix de son ministre de la défense (jeudi 13 mars dans la presse locale) qu'il ne prévoit plus de se doter du chasseur F-35 de Lockheed Martin. Le choix se fera donc en faveur de matériels fabriqués par des alliés "qui seront à nos côtés en toute circonstances". "La position récente des États-Unis, au sein de l'OTAN et sur la scène géostratégique internationale, doit nous inciter à réfléchir aux meilleures options, car la prévisibilité de nos alliés est un atout majeur à prendre en compte". Les mots sont forts.

Si le Portugal n'a encore rien signé avec les Etats-Unis pour le remplacement de ses 28 F-16, l'armée de l'air avait indiqué au printemps 2024 que le choix se porterait sur l'avion furtif américain, en raison de l'interopérabilité que ce dernier offrait avec les pays de l'OTAN. Lisbonne préparait donc cette transition sur "deux décennies", menant des ateliers sur la "cinquième génération". Le montant du renouvellement avait été chiffré à 5,5 milliards d'euros. 

L'élection de Donald Trump, et surtout la conduite de son administration depuis, constituent donc évidemment un bouleversement qui mène à ce revirement majeur. Ironique, quand on sait comment un tel marché aurait pu être retourné par les Américains par le passé, au hasard, en Suisse… 

Et alors que le schisme transatlantique se porte visiblement sur le terrain industriel et commercial, avec pour ce qui concerne la défense un véritable mouvement de défiance des Européens qui s'inquiètent ENFIN de leurs dépendances technologiques, en particulier s'agissant du F-35 et de ses restrictions d'utilisation, plusieurs pays dans le monde (et donc, aussi en Asie) doutent désormais du fournisseur historique. Au grand dam du complexe militaro industriel américain, dont les valeurs s'effondrent en bourse.

Le Portugal n'est certes pas la plus grande armée d'Europe, mais une trentaine de Rafale ne serait pas de trop sur le flan sud européen, d'autant plus que ces derniers seraient projetables vers l'est aux côtés des appareils et ravitailleurs français. Ce serait une façon pertinente pour Lisbonne de participer à la défense de l'Europe.     

J'ajouterai enfin trois éléments: 

  • attention, il s'agit de la décision d'un gouvernement démissionnaire. De nouvelles élections législatives sont prévues en avril. Il faudra donc voir le point de vue des partis politiques;
  • la compétition (non datée) sera probablement ouverte aux trois appareils européens. Sur ce point, l'Eurofighter offre une interopérabilité avec les Espagnols, et le Gripen suédois fait sens (prix et capacités);
  • Emmanuel Macron était en visite d'Etat au Portugal il y a deux semaines, pour évoquer notamment les sujets défense, avec par exemple la vente de canons Caesar. Hasard ? 

mercredi 12 mars 2025

Premier ravitaillement en vol pour le Caracal et l’A400M des forces spéciales air

L'armée de l'Air annonce ce 12 mars la réussite de la première campagne de ravitaillement en vol pour le Caracal et l’ A400M des forces spéciales air. L'opération a été réalisée le 5 février 2025 au large du bassin d'Arcachon.

Images: Armée de l'Air et de l'Espace. 


Ceux qui ont connu ce blog à ses grandes heures se rappelleront que le ravitaillement en vol des hélicoptères Caracal français est une problématique de longue date. On se souvient en effet qu'il y a une dizaine d'années, l'A400M, pour diverses raisons techniques sur lesquelles nous ne reviendrons pas/plus- était incapable de mener à bien la mission de ravitaillement des hélicoptères. 

Au Sahel comme lors d'exercices en France, les forces spéciales Air, qui opèrent depuis Cazaux avec les hélicoptères Caracal de l’escadron 1/67 « Pyrénées », ont donc longtemps opéré avec les C-130J américains (ou plus rarement, italiens et espagnols), avant que la France ne reçoive finalement ses propres appareils (toujours pour compenser les manques de l'A400M). 

Durant cette période, Airbus a travaillé dur pour adapter la solution à l'A400M, jusqu'à ce que des essais soient entamés à partir de 2020 par l'avionneur.   

Nous voici cinq ans plus tard, et un avion de transport A400M Atlas de l’escadron de transport 3/61 « Poitou » a donc enfin ravitaillé en vol un hélicoptère Caracal à Cazaux.

L'armée de l'Air et de l'Espace nous précise dans un communiqué qu'avant la validation de l'opération, une première semaine d’entraînement a eu lieu pour la formation des Aviatrices et Aviateurs de l’armée de l’Air et de l’Espace à cette nouvelle capacité : deux pilotes d’A400M Atlas ainsi que quatre chefs de soute ont été formés pour le « Poitou ». Du côté du « Pyrénées », ce sont sept pilotes qui sont désormais qualifiés au ravitaillement et ce, de jour comme de nuit.

L'armée de l'Air se permet ainsi aujourd'hui de célébrer la "naissance d’un nouveau tandem 100 % « forces spéciales air » : A400M - Caracal."

Un peu d'autonomie stratégique qui tombe à point nommé.