Affichage des articles dont le libellé est Nucléaire. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Nucléaire. Afficher tous les articles

lundi 20 novembre 2023

Premier tir réussi à Biscarrosse pour le missile intercontinental M-51.3

Le douzième tir d'un missile M51 s'est déroulé samedi 18 novembre 2023, à 19h, depuis le centre d'essais des Landes à Biscarrosse. Visible dans le ciel du sud ouest, cet essai permet de valider la dernière itération du missile stratégique français, la version M51.3.


Immanquable. Une fois n'est pas coutume, on aura beaucoup parlé de ce tir d'essai de M51, de nombreux Français ayant pu l'admirer dans la nuit d'un début de samedi soir. Effectué depuis le site DGA Essais de missiles, le lancement de ce missile stratégique M51 -dépourvu de charge nucléaire- s'est déroulé de façon nominale, avant sa retombée au large des côtes nord-américaines.

La Direction générale de l’armement précise que ce premier M51 dans sa version ".3"(mise à jour qui lui ajoute de l'allonge, pour plus de 10 000 km de portée, et quelques spécifications confidentielles) a été « suivi tout au long de sa phase de vol par le centre d’expertise DGA Essais de missiles, les stations d’Hourtin et de Quimper, le bâtiment d’essais et de mesures Monge »

Une nouvelle réussite pour la DGA et ArianeGroup, après l'essai du démonstrateur de planeur hypersonique VMAX en juin dernier. On s'attendait en effet à des tirs importants en 2023, voilà qui semble clore ce calendrier si stratégique. Ne doutons pas que le message de crédibilité est reçu au sein du club nucléaire. 


Comme souvent, l'événement avait été anticipé par ceux qui surveillent les publications administratives au sujet de l'activité en Atlantique nord, mais la date exacte restait inconnue. Surprise, le tir aura été effectué un samedi, de nuit, étant par conséquent visible dans toute la moitié sud du pays, ou même en Espagne. 
Et bonne surprise, la conséquence directe aura été la réaction très intriguée du public et la Une des journaux, notamment régionaux, le dimanche. Alors qu'il est finalement plutôt rare que le sujet de la dissuasion -bien trop méconnu du citoyen- soit traité dans nos sphères médiatiques, sauf quand il s'agit de parler de Russie… 

Et puisqu'on parle de dissuasion, sachez que le chantier de la tête de série des SNLE de 3ème génération s'apprête à débuter. Entrée en service en 2035 pour cette nouvelle classe de sous-marins. 

Le missile M51.3 sera lui opérationnel dès 2025.

 

vendredi 27 octobre 2023

Ambitions (et rivalités) dans le spatial européen avant le Sommet de Séville


Les derniers jours ont été rythmés par un flot d'annonces concernant le secteur spatial européen, avec des échéances concernant les court, moyen et long termes. Des annonces qui nous parviennent à dix jours d'un nouveau Sommet de l'Espace qui réunira à la fois l'ESA, et l'UE. On fait le tour en quatre actes. 

Ci-dessus: le démonstrateur SUSIE chez ArianeGroup aux Mureaux  - ArianeGroup. 


Ce 6 novembre à Séville se tiendra le Sommet de l'Espace de l'Agence Spatiale Européenne. Il ne s'agit pas de LA grand messe se déroulant tous les trois ans (la dernière étant celle de novembre 2022) et visant notamment à valider les grandes contributions budgétaires, mais on y attend des signaux encourageants quant aux ambitions futures de l'Europe dans l'espace, à commencer par le vol habité. 
"Les ministres des États membres de l’ESA prendront des mesures décisives pour faire de l’espace un instrument encore plus important dans la gestion du changement climatique. Parallèlement, ESA ouvrira une nouvelle ère de modernisation de la mise en œuvre de ses programmes, en répondant à la commercialisation et à la privatisation croissantes des activités dans l’espace notamment dans les domaines du transport spatial et de l’exploration de l’espace."

Jusque ici, Salon du Bourget 2023 compris, l'ensemble des déclarations émanant de la direction de l'ESA n'incite pas vraiment à l'optimisme, d'autant plus qu'en parallèle, de plus en plus d'acteurs (Etats comme entreprises) nouent des accords avec les différents porteurs de projets américains (là encore, institutionnels comme privés). Les Européens décollent déjà grâce à SpaceX… ils orbiteront peut-être à horizon 2030 dans des stations spatiales privées comme celle d'Axiom

Dès le lendemain, le 7 novembre, Séville se tournera vers l'Union Européenne (d'ailleurs sous présidence espagnole ce semestre) avec une réunion informelle ESA de niveau ministériel, accueillant les ministres "de l'espace" des membres de l'UE. L'ESA n'est pas l'agence de l'UE, mais cette dernière y prend chaque année un peu plus de poids. Mais il s'agit d'un autre débat.
"Des progrès coordonnés seront réalisés pour que l'espace soutienne la transition verte européenne, la durabilité dans l’espace, une commercialisation accrue dans l’écosystème spatial européen et la garantie d’un accès autonome, fiable et rentable à l’espace pour l'Europe."

Comme à l'habitude donc, avant un grand rendez-vous politique, le "hasard" de l'actualité fait que de grandes annonces nous sont fournies par le secteur, avec de bonnes nouvelles, excellentes même, et de moins bonnes. 


  • Avio/Arianespace: le divorce franco-italien
Commençons donc par ce triste constat: la guerre des lanceurs européens est officiellement déclarée. Ce serait déjà un euphémisme de dire qu'elle couvait, mais avec la révélation jeudi 26 octobre par le média La Tribune que l'industriel italien Avio a obtenu de son gouvernement la concrétisation d'une vieille demande de son PDG, il nous est confirmé que le lanceur léger Vega va quitter le catalogue d'Arianespace
Le gouvernement italien devrait en faire la demande à Séville le 6 novembre. S'en suivra très probablement une feuille de route de sortie (un nombre conséquent de lancements étant déjà "vendus" et prévus depuis le Centre spatial guyanais) qui s'étendra sur quelques années. 

Pour Avio, s'affranchir d'Arianespace, sous couvert d'arguments relevant de l'autonomie stratégique et surtout commerciale,  relève du pari risqué, très risqué. En effet, Vega demeure un lanceur attractif, mais dont la cote s'effondre de semaines en semaines à mesure que s'additionnent les échecs.
L'italien ne faisait aucun secret de sa volonté d'émancipation (et il faut regarder dans le même temps le cas allemand) mais il joue désormais sa vie. D'autant plus que désormais, les Français vont enfin pouvoir s'octroyer le droit de se comporter en concurrent. Nous retiendrons que messieurs les Italiens ont tiré les premiers… 

Pour Arianespace, le sujet est complexe, inquiétant même, mais la roue pourrait tourner dans le bon sens: certes, Ariane 5 est à la retraite, Soyouz n'est plus au catalogue car russe, et Ariane 6 n'est pas prête. Mais elle le sera bientôt, et une succession d'essais concluants annoncés cette semaine m'amène à penser que non seulement le retour d'Ariane se fera en grande pompe, mais que d'autres acteurs pourraient venir compenser la perte de Vega au catalogue. 


  • Essais moteur chez ArianeGroup
Dans la suite directe du sujet précédent, une double information: ArianeGroup a mené avec succès des essais à Kourou et à Vernon.

En Guyane, il s'agit bien sûr d'Ariane 6 et d'une séquence de lancement simulée qui a permis de valider le remplissage des ergols du lanceur, la gestion de pannes, ainsi que l'allumage partiel du moteur Vulcain.
La prochaine grande étape, absolument majeure et scrutée, devrait intervenir fin novembre, avec un test longue durée de quasiment 8 minutes du moteur. Celui-ci, qui a pris un peu de retard, sera déterminant pour savoir si Ariane 6 décolle au printemps 2024.

L'autre info concerne un futur un peu plus lointain mais déjà tangible, puisqu'elle concerne les essais sur les démonstrateurs de moteur Prometheus et d’étage réutilisable Themis, menés pour le compte de l’ESA.
Un nouvel essai de 30 secondes a été réalisé avec succès ce 20 octobre sur le site de Vernon. 



Prometheus et Themis sont des programmes stratégiques puisqu'ils permettent d'entrevoir l'avenir du catalogue d'Arianespace. On pense évidemment au futur d'Ariane, mais aussi et surtout, peut-être, au "mini"lanceur (à différencier de micro lanceur) de la filiale d'ArianeGroup, Maïa Space. Car en s'appuyant sur les technologies de sa maison mère, championne de niveau mondial, Maïa, encore qualifiée de start-up, a des reins beaucoup plus solides que ses consœurs européennes. Elle pourrait même à terme, une fois l'étape du mini lanceur franchie (1T de charge utile pour l'orbite basse), venir jouer sur les terres d'Avio et de sa Vega... 


  • Revoilà SUSIE !
Une brève communication jeudi 26 octobre aura suffi à rallumer la flamme dans les yeux des nombreux suiveurs de l'actualité spatiale. 
ArianeGroup a en effet dévoilé un démonstrateur à échelle réduite de son étage supérieur réutilisable SUSIE (Smart Upperstage for Innovative Exploration), dont la révélation du concept avait fait sensation en septembre 2022. Mieux encore, un test d'allumage a été réalisé le 25 octobre sur ce démonstrateur de deux mètres et 100 kilos aux Mureaux.

Le démonstrateur, visiblement développé sur fonds propres, a demandé  neuf mois de conception, et servira à réaliser des tests durant encore deux ans. En priorité il y aura la capacité à développer un système d’atterrissage contrôlé.
Ce n'est encore pas grand chose, mais on commence à voir émerger l'idée d'une communication à l'américaine, avec un usage moins timoré des démonstrateurs, même largement simplifiés. 

SUSIE est un cargo réutilisable qui pourrait potentiellement accueillir des humains, mais il ne s'agit pas là du seul projet européen en matière de vol habité. Nous citerons par exemple The Exploration Company. Dassault Aviation possède également un ou plusieurs concepts dans les cartons. Reste qu'aucune décision n'a encore été prise au niveau politique. 



  • FRAMATOME place enfin la France sur la carte du nucléaire spatial
Je garde volontairement la nouvelle la plus excitante pour la fin. Framatome, entreprise relativement peu connue du grand public mais assurément l'une des plus importantes du pays puisque leader international dans le domaine de l'énergie nucléaire (c'est elle également qui fournit les chaufferies nucléaires de nos sous-marins et porte-avions), se lance dans le spatial avec la création de Framatome Space.

Il s'agit plus précisément de l'enjeu de l'utilisation de réacteurs nucléaires dans l'espace pour l'exploration ou la colonisation. Une éventualité rendue possible aujourd'hui par les progrès faits en matière de miniaturisation et bien entendu de sûreté. 

Certains pourront y voir de la science-fiction mais il faut savoir que les grands acteurs, USA et sa Space Force en tête, sont déjà lancés dans cette course. Les spécialistes du sujet attendaient un signal venue de France depuis plusieurs mois. Voilà qui est fait.




mercredi 12 avril 2023

6ème Congrès de l'AEGES du 7 au 9 juin 2023 à Bordeaux


L’Association pour les études sur la guerre et la stratégie (AEGES) organisera la 6ème édition de son congrès bisannuel les 7, 8 et 9 juin 2023 à Bordeaux. Cet événement se veut un espace de socialisation et de discussion scientifiques permettant de rassembler très largement la communauté des chercheur.e.s travaillant sur la guerre et la stratégie, quel que soit leur encrage disciplinaire.

Tous les détails disponibles sur le site de l'événement. 

 




vendredi 25 mars 2022

Tir d'un missile nucléaire ASMP-A rénové à Cazaux

Après celui de décembre 2020, un Rafale a procédé pour la deuxième fois au test d'un missile ASMP-A Rénové sur la côte Atlantique. Un succès qui renforce la posture de dissuasion nucléaire française, dans un contexte international ultra sensible. 


Il y aurait beaucoup de choses à dire sur l'actualité de cette fin de semaine, que ce soit sur le conflit en Ukraine, les réunions OTAN/UE/CE, ou les accords industriels puisqu'Airbus a d'une part choisi le motoriste Avio associé à General Electrics pour son Eurodrone, et d'autre part s'est allié à Boeing sur le marché allemand des hélicoptères lourds, ouvrant la voix à une européanisation du CH-47 Chinook (on risque d'en reparler).

C'est une annonce peut-être plus discrète, mais in fine plus significative qui attire mon attention aujourd'hui, avec ce mercredi 23 mars 2022 le tir de qualification du missile stratégique Air-sol moyenne portée amélioré [ASMP-A] rénové.

Le tir du missile - dépourvu de charge militaire - a été réalisé depuis la base aérienne 120 de Cazaux, par un Rafale des FAS naturellement. Il a été suivi par les instruments de DGA Essais Missiles à Biscarrosse, ainsi que par le bâtiment Monge pour les mesures. 

Et c'est ainsi que ce succès, salué par les autorités, marque l'entrée en phase de production du missile ASMPA Rénové, qui doit entrer en service cette année. Il rejoindra l'arsenal des FAS (Forces aériennes stratégiques de l'armée de l'Air et de l'Espace)… ainsi que celui de la Force aéronavale nucléaire, qu'on a tendance à oublier !

Sur le blog (2007): Un Rafale Marine réalise un tir de missile stratégique ASMP-A


En service depuis bientôt 15 ans, le missile ASMP-A, capable d'emporter une tête nucléaire de 300 kilotonnes, fait l'objet d'un programme de modernisation à mi-vie. Son successeur, l'ASN4G, arrivera au milieu de la décennie 2030. On pense évidemment à la technologie hypersonique.

Ce tir, prévu de longue date, s'inscrit bien sûr dans un contexte stratégique très tendu, durant lequel la France fait d'ailleurs l'usage de 3 de ses 4 SNLE. Un engagement tout à fait historique. 

Lire aussi (2019): Frappe nucléaire dans les Landes


mercredi 28 avril 2021

Succès d'un tir de missile M51 au centre d'essais des Landes

Ce mercredi 28 avril à 10h00, la DGA a conduit avec succès le tir d'un missile balistique stratégique M51 depuis le centre d'essais des Landes. Le dernier essai avait eu lieu depuis un SNLE en juin 2020


Communiqué du ministère des Armées: 



lundi 22 février 2021

Lancement du programme stratégique SN3G

Le ministère des Armées a lancé le programme de réalisation des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins de 3e génération, surnommé "SNLE 3G", ou dans le milieu SN3G. Les études de développement seront menées jusqu'à 2025, tandis que l'entrée en service est prévue pour 2035.

Illustration ci-dessus: vue d'artiste SN3G - DGA


Après le nouveau porte-avions, la ministre Florence Parly annonce donc le lancement du remplacement de la force océanique stratégique et de ses 4 SNLE.
Ces sous-marins nucléaires lanceur-d 'engins sont, technologiquement parlant, ce qui se fait de mieux au monde. Le premier entrera en service en 2035, et le quatrième et dernier en 2050.

Derrière Naval Group qui est maitre d'œuvre (tandis que TechnicAtome aura la charge des chaufferies nucléaires), il y a la DGA et le CEA.

Vitaux pour la nation, ces bâtiments de 150m de long pour 15 000 tonnes de déplacement en plongée pourront embarquer chacun 16 missiles balistiques M51 (dans ses dernières itérations). Il seront dotés d'un équipage de 110 marins. Ces données préliminaires font du SN3G un sous-marin plus grand que ses prédécesseurs, mais embarquant moins de personnels. 

Annoncé plus furtif sur tout les points d'après les études préliminaires, on en sait relativement peu sur les technologies très classifiées du SN3G. Tout comme le coût du programme, qui demeure confidentiel. 

Sur le plan industriel, ce sont sur la période, 3000 emplois hautement qualifiés et non délocalisables. Naval Group met en action l'intégralité de ses sites, y compris en Aquitaine avec les superbes installations de Ruelle près d'Angoulême. Y sont notamment développés des instruments virtuels de tout premier ordre. 


mercredi 9 décembre 2020

Le programme de succession du porte-avions Charles de Gaulle officialisé

A l’occasion d’une visite d'Emmanuel Macron au Creusot, consacrée à l'avenir de la filière nucléaire nationale, le lancement du programme du futur porte-avions de la Marine Nationale a été annoncé. Le futur bâtiment sera une fois et demi plus imposant que le Charles de Gaulle.

Illustrations: vues d'artistes Naval Group


De ces annonces, nous savions déjà tout ou presque, mais seule manquait la parole du Président de la République, celui qui doit trancher à tel niveau stratégique. Et la crise sanitaire a sans cesse fait reculer cette décision.. jusqu'à ce 8 décembre 2020.

Cette annonce présidentielle inaugure le lancement des études de ce futur porte-avions à propulsion nucléaire dont les essais en mer débuteront normalement en 2036 pour une admission au service en 2038. Le bâtiment fera 75000 tonnes pour une longueur de 300 mètres. Il mobilisera 2000 emplois durant la durée du projet chez Naval Group et les nombreux autres partenaires du programme.

Sans atteindre la taille faramineuse des nouveaux porte-avions américains (112 000 tonnes), la Marine passe un cap avec une bâtiment largement plus imposant que l'actuel Charles de Gaulle (42 000 tonnes). Comme le dit la ministre, "il ne faudra plus dire 42 000 tonnes de diplomatie, mais 75 000 tonnes !".
Le porte-avions de nouvelle génération (ou PANG) pourra accueillir jusqu'à 30 chasseurs "lourds" du programme SCAF, mais aussi bien sûr le Rafale qui sera encore en service, des drones et hélicoptères.


Pour la partie purement technique, le PANG va accueillir plusieurs technologies de rupture:
  • il sera à propulsion nucléaire (mais qui en doutait ?), et sa chaufferie "K22" sera 50% plus performante que celle à bord du Charles de Gaulle;
  • ses capacités d'autodéfense sont renforcées, et comporteront des armes à énergie dirigée;
  • il possédera deux catapultes électromagnétiques acquises auprès des américains.
Le prix de ces ruptures, et du programme global, devrait avoisiner les 7 milliards d'euros, dont 442 millions dès l'année prochaine. 

Un mot justement pour souligner la part très importante de collaboration avec les Etats-Unis, qui devrait représenter une part significative du programme. 3 milliards dit-on. Cela semble aller à l'encontre de la politique française de souveraineté, mais c'est dans ce domaine le choix le plus logique. Le prix également d'une interopérabilité assurée avec les fleurons de l'US Navy, une interopérabilité unique au monde.


L'Etat Major de la Marine assure que toutes les options ont été analysées, y compris celle d'un renoncement, dans un contexte où la Chine et la Russie misent sur les armes antinavires, ce qui peut poser la question de la pertinence de disposer d'un ou plusieurs PA dans le futur. Vous l'aurez deviné, la France mise sur la projection de puissance.
D'ailleurs sur cette question du nombre, le choix - ou non - d'un second navire pour assurer la permanence opérationnelle du groupe aéronoval sera prise vers 2025.

Les visuels qui accompagnent cet article sont tout à fait officiels (une maquette "en dur" a été présentée au Président Macron) et donnent semble t-il une idée claire du design final du futur porte-avion français. Sur le pont sont alignés Rafale et chasseur de nouvelle génération du programme SCAF (tel que présenté au Bourget par Dassault Aviation en 2019).


>>> Pour des développement plus poussés, direction le blog Le Fauteuil de Colbert !





mercredi 21 octobre 2020

Missile de croisière, futur porte-avions, nouvelles frégates de surveillance...


Finalement, le salon EuroNaval aura lui aussi été annulé, laissant la filière défense bien orpheline d'événements cette année. Cependant, l'événement, qui se tient en "digital", aura permis quelques annonces importantes pour le futur de la Marine Nationale. Dans le même temps, le Suffren a réalisé une première.

Ci-dessus: le Suffren, SNA de classe Barracuda, continue ses essais à la mer - Marine Nationale


La ministre des Armées a dans son intervention d’ouverture du salon "Euronaval-Online", confirmé que le porte-avions de nouvelle génération (PANG) arriverait en 2038: « Je confirme que ce programme sera lancé pour donner un successeur au Charles de Gaulle en 2038. Ce futur porte-avions fédèrera l’excellence de notre industrie navale dans les prochaines décennies et, par sa dimension stratégique, offrira un cadre d’emploi parfaitement adapté dès sa conception au futur avion de combat de nos armées, connu sous le nom de SCAF ».

Dans le même temps, LA LETTRE A révélait qu'Emmanuel Macron avait tranché: il s'agira - et c'est sans surprise - d'un porte-avions à propulsion nucléaire. Un seul pour le moment, la décision sur un sistership serait prise plus tard, vers 2028...

S'agissant du programme des patrouilleurs océaniques, l'Etat a pris la décision de se passer d'appel d'offres et d'impliquer non pas un, ou deux industriels, mais quatre des principaux chantiers navals. Naval Group bien sûr, mais également CMN, Piriou et Socarenam. L'objectif est de 10 patrouilleurs océaniques (90m, tonnage de 2000t, pouvant opérer hélicoptère et drones) équipés pour la lutte ASM, et de d'un canon de 40mm Rapid Fire de Thalès.


L'Etat soutient donc assez activement une filière stratégique (et nous n'évoquons pas ici les nombreux autres programmes) qui jusqu'ici s'en sort honorablement sur le plan mondial.

Les Patrouilleurs Outre-Mer, autre programme de modernisation, arriveront dès 2022



Le SNA Suffren réalise son premier tir de missile de croisière naval

Sur le plan opérationnel, la semaine est marquée par une première historique. En effet, le Suffren, premier des six sous-marins nucléaires d'attaque (SNA) de la classe Barracuda, a tiré avec succès son premier MDCN (missile de croisière naval de MBDA).

L'essai a été réalisé ce 20 octobre au large du centre DGA essais de missiles de Biscarosse.

On se rappelle que le MDCN a déjà été utilisé au combat durant l'opération Hamilton en Syrie, mais par des frégates multimissions. Il s'agit d'une première pour un sous-marin nucléaire d'attaque français. Il s'agit - là encore - d'une capacité dont bien peu sont à même de disposer dans le monde.

Ce tir semble clore les essais du Suffren, qui sera livré à la Marine en fin d'année, avant une entrée en service l'an prochain.

 

vendredi 12 juin 2020

Lancement réussi d'un missile stratégique M-51 par le SNLE Le Téméraire


La nouvelle était pressentie puisqu'une alerte avait été publiée concernant des essais missile au large de la Bretagne. La ministre des Armées, Florence Parly, l'a confirmé ce matin en saluant «la dissuasion nucléaire française » après l'essai concluant d'un tir de missile balistique stratégique M-51 par le SNLE Le Téméraire.

Image ci-dessus tirée d'un précédent essai du M-51 - MINARM


J'ai eu la chance d'entendre il y a quelques jours un spécialiste du spatial estimer que l'humanité possédait à ce jour deux fleurons technologiques: la station spatiale internationale... et les sous-marins nucléaires lanceurs d'engins.

Ce 12 juin 2020 donc, Le Téméraire, SNLE de la force océanique stratégique de dissuasion nucléaire française, a lancé avec succès un missile balistique stratégique M-51.2 depuis la baie d'Audierne (Finistère),.

Le vol de ce missile capable d'emporter plusieurs têtes nucléaires de 100 Kt  a été suivi par la DGA Essais de missiles, grâce notamment au navire d’essais et de mesures Monge. La zone de retombées se situe en Atlantique Nord à plusieurs centaines de kilomètres de toute côte. 

L' essai a été effectué sans charge nucléaire et dans le strict respect des engagements internationaux de la France, a bien précisé le MINARM.


Mise à jour: une journée décidément particulière puisqu'on apprend à la mi journée qu'un incendie est en cours à Toulon à l'intérieur du SNA (sous marin nucléaire d'attaque) Perle. Il n'y pas de blessé et les armes et combustibles ne se trouvaient pas à bord. A suivre... 

lundi 10 février 2020

Discours du Président sur la dissuasion, le 7 février 2020 à l'Ecole de Guerre


De la diffusion aujourd'hui, avec le traditionnel discours quinquennal du Président de la République sur la politique de dissuasion. Un discours très regardé et commenté depuis l'étranger (plus que chez nous), puisqu'il contribue véritablement à affirmer la position de la France, désormais seule et unique puissance nucléaire de l'UE, sur l'échiquier mondial.

Ci-dessus: Emmanuel Macron à l'Ecole de Guerre, le 7 février 2020. Photo Francois Mori/AFP.


Il faut dire qu'outre le rappel des grands principes de la dissuasion nucléaire française, et également l'assurance que la France, fidèle à ses engagements, n'y renoncera pas, Emmanuel Macron, dressant le tableau d'une géopolitique incertaine où la souveraineté nationale demeure le principe clé, y appelle ses partenaires européens à participer à un grand dialogue stratégique.

Un exercice traditionnel pour les Présidents de la 5ème République (à potasser si vous préparez des concours !).


Intégralité du discours du 7 février 2020 à l'Ecole de Guerre en vidéo ci-dessous (1h30):


La retranscription écrite de ce discours est disponible sur le site de l'Elysée (suivre ce lien).

La Tribune propose également de bonnes synthèses du discours, ICI et ICI.


lundi 7 octobre 2019

Les images spectaculaires des 55 ans des Forces Aériennes Stratégiques


Les images de Rafale en vol armé d'un missile ASMP-A sont rares. Mais un tel point de vue sur une force d'assaut constituée de 12 Rafale, c'est du jamais vu. C'est le privilège que nous offrent les Forces Aériennes Stratégiques, qui fêtaient ce 4 octobre leurs 55 ans.

Images: Armée de l'air


Moins connues que la composante sous-marine, les Forces Aériennes Stratégiques (FAS) sont la composante aéroportée de la dissuasion nucléaire française. Elles restent néanmoins particulièrement célèbres grâce à des appareils mythiques comme le Mirage IV.

Si leur existence est parfois remise en cause (par exemple lorsque le politique cherche à réaliser des économies), la composante aéroportée a certains avantages particuliers, dont un qui l'oppose radicalement aux sous-marins lanceurs d'engins, par définition invisibles et silencieux. En effet, tout comme le porte-avions (l'aéronavale a aussi sa composante aéroportée, les FANu), toute sortie des FAS est une démonstration de puissance, probablement scrutée par nos potentiels rivaux, comme par nos alliés.

Si l'opération Hamilton, en avril 2018 (la France avait frappé en Syrie depuis la métropole) avait déjà rappelé au monde que l'Armée de l'air faisait partie d'un club très fermé, les images dévoilées ce 4 octobre pour les 55 ans des FAS marquent les esprits.

Un A400M, 12 Rafale B (biplaces), 1 ravitailleur MRTT. Les Rafale sont sur ces images armés pour le combat de haute-intensité: missiles air/air MICA, METEOR, missiles de croisière air/sol SCALP-EG, bombes GBU et AASM, et le fameux ASMP-A, missile en service depuis 2010 et capable d'emporter une charge nucléaire de 300 kilotonnes.

Basées à Saint-Dizier (mais dépendant également d'autres unités sur le territoire), les FAS rassemblent l'Escadron de chasse 1/4 « Gascogne » et 2/4 « La Fayette », soit une cinquantaine de Rafale (un bon tiers des Rafale que Dassault a produit à ce jour pour les forces françaises). Ses pilotes sont entraînés pour les missions longues et éprouvantes loin en territoire ennemi, pour, ultimement, la mission de frappe nucléaire. Bien heureusement, cette éventualité ayant été jusque aujourd'hui exclue, les escadrons participent aux OPEX et aux missions conventionnelles, comme le fut Hamilton.

Ce 4 octobre 2019, les FAS célébraient 20 000 jours d'alerte nucléaire. Leur première prise d'alerte sur la base aérienne 118 de Mont-de-Marsan, remonte au 8 octobre 1964, sur Mirage IV.

La ministre des Armées Florence Parly était pour l'occasion sur la base aérienne à vocation nucléaire (BAVN) 113 de Saint-Dizier où se tenait une cérémonie militaire ce 4 octobre, en compagnie d'actuels et anciens responsables des FAS. Cet anniversaire est d'ailleurs particulier, car marqué par l'arrivée du nouveau ravitailleur A330 MRTT "Phénix", qui vient remplacer les vieux Boeing C-135.

Il va de soi que le futur de la puissance aérienne française, incarnée par le SCAF, et le missile ASN4G développé par MBDA, est conditionné par les besoins opérationnels des FAS.

Je vous laisse profiter de ces images époustouflantes.

















lundi 4 mars 2019

Safran dépasse ses objectifs en 2018


Le groupe Safran présente d'excellents résultats 2018, avec un chiffre d'affaires de 21 milliards  d'euros et 3 milliards de bénéfices. Il s'impose comme premier groupe français dans l'ASD (aéronautique, spatial, défense), et 3ème mondial.

Continuons notre tour des résultats commerciaux de la "Rafale Team". Après Thales Group, c'était Safran qui dévoilait la semaine dernière ses chiffres 2018. Fort de ses 92 000 collaborateurs, et d'un chiffre d'affaires de 21 milliards d'euros, en forte progression (+32%) suite à l'intégration de Zodiac Aerospace, le motoriste français se situe sur le podium de l'aéronautique mondial.

En 2018, le groupe Safran a dépassé ses objectifs, avec un résultat net de 1,98 milliard d'euros (-17,2%) et un résultat opérationnel courant ajusté de 3,023 milliards d'euros (représentant 14,4% du chiffre d'affaire) en hausse de 37,9%.

Le moteur LEAP pour l'aviation civile, véritable succès, tire bien sûr ces chiffres vers l'avant. 1 118 unités ont été livrées 2018, contre 459 en 2017. 1 800 LEAP doivent être livrés en 2019.


Intervention de Philippe Petitcolin, DG de Safran, sur BFM Business le 27 février:



Sur le militaire, Safran se montre confiant avec notamment le lancement du programme européen SCAF. Une lettre d'intention avait été signée ce 6 février entre les industriels français et allemands Safran et MTU Aero Engines, qui seront étroitement associés aux travaux pour la définition du moteur du futur système de combat commun. Safran hériterait de la conception et de la production du moteur, quand MTU gérerait services et maintenance, peut-on lire dans la presse spécialisée.

Dans le spatial, le groupe se montre confiant sur le devenir d'Ariane 6 et a poussé Arianespace et le CNES a s'engager jeudi 21 février 2019 dans un protocole d’accord pour la mise en place d’une plateforme d’accélération destinée à préparer les lanceurs du futur: ArianeWorks. Il bien question ici (enfin) de lanceurs réutilisables.

Enfin, Safran tire la sonnette d'alarme s'agissant de deux usines à construire. Une pour l'impression additive (3D), et l’autre pour fabriquer des éléments en carbone, avec au total un investissement de 300 millions d'euros et un recrutement de 300 personnes.
Or, la lourdeur du dispositif administratif français retarde ces projets, voire les bloque... En embuscade, USA, Malaisie et Maroc se sont positionnés...



lundi 11 février 2019

Frappe nucléaire dans les Landes


Dans la nuit du lundi 4 au mardi  février, un Rafale de l’armée de l’Air a effectué un tir d’évaluation du missile air-sol de moyenne portée amélioré (ASMP-A). Le missile, évidemment désarmé, a ainsi frappé avec succès la zone d’essais du centre DGA Essais de missiles de Biscarrosse.

Ci-dessus, au centre: le missile stratégique ASMP-A porté par un Rafale


Le tir du missile ASMP-A a été réalisé par un Rafale B de l’escadron 2/4 La Fayette de Saint-Dizier (Forces aériennes stratégiques), durant une mission de 11h nécessitant plusieurs ravitaillements par des avions C-135 et A330 Phénix.
Vous l'aurez compris, le test reproduisait les conditions réelles de cette mission primordiale des forces aériennes stratégiques. Le chasseur a donc terminé sa mission par une pénétration à basse altitude avant de délivrer son armement stratégique.

Selon le ministère des Armées, le tir d’évaluation a eu lieu sur une nouvelle génération de missiles ASMP-A avec une portée de 500 kilomètres et une charge nucléaire de 300 kilotonnes

Pour la ministre Florence Parly, « ce succès renforce la crédibilité technico-opérationnelle de la dissuasion dont la permanence de la composante aéroportée est assurée sans discontinuité par l’armée de l’Air depuis 1964 ».
Effectivement, ce type d'essais, tout comme les exercices "Poker" des FAF, perpétue le haut niveau de crédibilité de la composante "air" de la dissuasion nucléaire française.

Et même s'il était prévu de longue date, il est de surcroît intéressant de constater qu'il - le tir-  intervient dans le contexte dégradé de la sortie de la Russie et des États-Unis du traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (qui en réalité, est plutôt une conséquence des relations Chine/USA).
Or, après un rapide tour de la presse internationale la semaine passée, on remarque que le tir français a fait grand bruit, partout. Aux USA, en Grande-Bretagne et Europe (de l'est surtout !), Russie bien sûr, et jusqu'en Chine. Une telle publicité au final, nous "arrange" en termes de souveraineté et de place sur l'échiquier mondial, mais il demeure amusant de répertorier les divergences d'interprétations, qui vont de l'avertissement visant spécifiquement la Russie, au positionnement comme leader stratégique européen, et ce en concurrence avec les USA et l'OTAN.


mercredi 23 janvier 2019

La France veut (elle aussi) son planeur hypersonique


USA, Chine, Russie... il faudra désormais ajouter les ambitions françaises de voir voler à très court terme un planeur hypersonique à vocation stratégique. C'est l'annonce qu'a faite la ministre des Armées Florence Parly lors de ses vœux le 21 janvier. Le contrat revient à Ariane Group, pour un premier vol espéré dès 2021.

Ci-dessus: le planeur HTV-2 développé aux USA par la DARPA. La Chine et la Russie ont elles-aussi récemment effectué des tests de planeurs ou missiles hypersoniques.


Il était prévu ce mercredi de faire écho sur le blog à la nouvelle doctrine cyber des armées françaises,  mais comme l'on y préfère l'aéronautique et le spatial, faisons place à l'annonce de Florence Parly ce 21 janvier sur le développement d'un planeur hypersonique, dénommé "V-MAX".

Doctrine cyber offensive, annonce d'une stratégie spatiale, développement d'un programme de combat aérien futur (SCAF), et donc désormais également d'un planeur hypersonique... 2019 semble marquer pour la France la volonté d'entrer avec ambitions dans la prochaine décennie, que l'on annonce comme celle des "ruptures" et du retour en force des puissances.

Bien aidée par une hausse (durable on l'espère) des investissements dans la défense, mais aussi le spatial militaire comme civil, la France annonce donc par l'intermédiaire de sa ministre des Armées le premier vol de son planeur hypersonique pour 2021. Le contrat pour ce démonstrateur a même déjà été notifié à Ariane Group.


On sait que les Forces aériennes stratégiques ou l'ONERA (Office national d'études et de recherches aérospatiales) planchent depuis au moins 2014 sur des études concernant les armes hypersoniques. Aussi le programme d’ensemble air-sol nucléaire de 4ème génération "ASN4G" (horizon 2040) a souvent été imaginé comme centré autour d'un vecteur hypersonique.
Celui-ci pourrait par exemple être portée par le futur chasseur franco-allemand dont Dassault Aviation est maître d'oeuvre, où même - éventuellement - le Rafale. La Russie expérimente déjà ce procédé.

Le missile hypersonique "Kinjal" russe tel que présenté en 2018 sur un MIG-31

Mais ces armes - les planeurs hypersoniques - sont également imaginées pour être lancées depuis un missile balistique stratégique. C'est ici l'exemple du planeur de la DARPA américaine "Falcon Hypersonic Technology Vehicle 2" ou "HTV-2".

[Problème notable : tirer une arme hyper-véloce depuis un lanceur stratégique - donc plutôt à vocation de dissuasion nucléaire - pose certains risques de... confusions que la communauté internationale préférerait éviter.]

Les armes hypersoniques sont l'un de ses game changers qui pourraient bouleverser l'équilibre stratégique sur la planète.
Si les USA travaillent prudemment sur les sujets, avec un nombre important de démonstrateurs depuis le début des années 2000, la Russie et la Chine mettent actuellement les bouchées doubles sur ces technologies. Ainsi se multiplient les essais de ces missiles sur le continent asiatique, concluants ou non. Moscou annonce même des capacités opérationnelles pour 2019.

Si l'on qualifie l’hyper-vélocité de rupture, c'est bien parce qu'avec des vecteurs atteignant Mach 8, Mach 10 ou plus, tout en étant manœuvrables, les capacités de frappe comme d'interception sont tout bonnement décuplées. Et les défenses d'aujourd'hui en passe d'être déclassées.

Outre USA Chine et Russie, la France se positionne donc logiquement, il en va de sa crédibilité de puissance nucléaire et membre du Conseil de Sécurité. Pour la ministre, « Beaucoup de nations s’en dotent, nous disposons de toutes les compétences pour le réaliser : nous ne pouvons plus attendre ». Il s'agit d' « un saut technologique pour bon nombre de nombre de nos capacités ».

Nous devrions en apprendre plus très vite puisque le démonstrateur volera en 2021 (et que malgré le secret inhérent à ce type de programme, montrer ses "muscles" compte aussi), preuve que les compétences et technologies sont déjà en partie maîtrisées chez Ariane. Outre le V-MAX, il faut s'attendre à ce que le pays se positionne relativement rapidement sur le développement d'un missile ASN4G.


lundi 3 décembre 2018

2ème édition du Pharos Event, dédié à la photonique


Durant trois jours, du 5 au 7 décembre, spécialistes français et internationaux de la photonique se réunissent à Bordeaux pour le "Pharos Event". Car en effet, les technologies du laser, dans lesquelles l'Aquitaine est un champion, bouleversent les sciences et l'industrie, avec des applications souvent stratégiques.

La 2ème édition de PHAROS EVENT, organisée par les pôles de compétitivité ALPHA-RLH et Aerospace Valley, se tiendra du 5 au 7 décembre 2018 à l'Institut d'Optique d'Aquitaine à Bordeaux (Talence).
Pharos est une initiative lancée en 2014 visant à tirer parti de l’adoption massive des technologies photonique, laser et hyperfréquences dans l’industrie aérospatiale. Elle s'articule autour de l’écosystème aquitain échafaudé autour du pôle Alpha "Route des Lasers", et de la formidable vitrine que représente le laser mégajoule du CEA.

L'événement de cette semaine est un forum visant à favoriser l’émergence de nouvelles idées et technologies en optoélectronique, en photonique et en hyperfréquences.
Chercheurs, industriels, PME et start-up seront réunis pendant 3 jours pour assister à une vingtaine de conférences scientifiques et/ou technologiques sur les applications de la photonique et des hyperfréquences dans l'aéronautique et le spatial.

Des réunions scientifiques et professionnelles sont ainsi réparties sur ces trois jours, avec plus de 150 participants attendus (cadres supérieurs, responsables R & D & T du groupe Ariane, Dassault Aviation, groupe Safran, groupe Thales …), et jusqu’à 20 sessions sur l’aéronautique et l’espace.

Le programme laisse entrevoir des présentations de très haut niveau, regardant largement le monde de l'aérospatial et de la défense.

Autour de Bordeaux, et du Laser mégajoule au Barp (33), installation militaire du Centre d’énergie atomique où sont testées les capacités de dissuasion nucléaire, c'est une véritable industrie de la photonique qui a émergé au cours des dix dernières années, avec des centaines d'emplois qualifiés.

Le secteur d'activité de la photonique possède de nombreuses applications industrielles et de recherche et fait l'objet d'un soutien spécifique au niveau européen. En France, le secteur emploie directement 80 000 personnes.
La photonique est l’une des 6 technologies génériques d’avenir (KET) identifiées par la Commission européenne, qui les considère comme les principaux moteurs de l’innovation. Ces technologies se caractérisent par leur capacité à irriguer de très nombreux secteurs industriels et domaines applicatifs, ainsi que leur forte intensité de R&D ; elles permettent des cycles d’innovation rapides, entraînant des dépenses d’investissement élevées et le maintien d’une main-d’œuvre hautement qualifiée. Les technologies photoniques nourrissent des marchés très concurrentiels et en forte croissance (environnement, santé, automobile, éclairage etc.), et recouvrent des domaines tels que la fibre optique, le laser ou encore les capteurs et les composants optroniques.

Source: Tematys/ministère de l'Economie

vendredi 23 novembre 2018

L'avenir du spatial européen s'est il assombri ?


A quelques jours de la remise en France, d'un rapport sur la stratégie spatiale qui mettra à n'en pas douter l'Europe aux cœur de ses ambitions, l'ambiance n'est pas à la fête. Préparant une Ariane 6 dont la compétitivité sonne comme leitmotiv assourdissant, Ariane Group va devoir se séparer de 2300 personnes.
Mais point de défaitisme, Ariane Group va devoir se réformer en profondeur, et d'autres acteurs stratégiques, comme Dassault Aviation pourraient venir en renfort du spatial européen.

Ci-dessus - vue d'artiste du lanceur Ariane 6-4


Mi-novembre, Ariane groupe annonçait à la surprise générale la suppression de 2300 postes d'ici à 2023. A la surprise générale, car il est en effet bien rare de voir le secteur aérospatial perdre des emplois. Et pourtant... on parle bien de 25% des effectifs.
La raison invoquée est la fin du développement du lanceur Ariane 6, qui entre en production pour une commercialisation à partir de 2020, soit moins de deux ans. L'autre raison, moins mise en avant, c'est bien sûr le plan de compétitivité visant à réduire de façon drastique le coût de lancement. Car pour avoir une chance de faire face à la concurrence, il s'agit de diviser par deux les frais de lancement d'Ariane 6 par rapport à sa grande sœur Ariane 5, coût qui passe ainsi à 65 millions d'euros. 

On est encore loin du drame social. Le développement d'Ariane 6 a nécessité beaucoup d'embauches, et les suppressions de postes ne se matérialiseront pas par des licenciements, mais par des départs à la retraite, ou non-compensés.
Les emplois français, notamment près de Bordeaux où sont concentrés 3500 employés, ne sont pas non plus tellement menacés (ou moins qu'ailleurs), puisqu'en France, l'activité autour du missile stratégique M-51 est irrémédiablement sanctuarisée.

Attention cependant, car les sous-traitants seront aussi touchés, et leur marge de manœuvre n'est pas la même ! 


"Bruxelles, nous avons un problème !"

Autant être clair: l'Europe est-elle en train de perdre la bataille contre SpaceX, ou plus généralement, contre le New Space ? 

Les lanceurs Ariane étant dépendants de deux choses, les lancements dits "institutionnels" (le militaire par exemple) et les satellites commerciaux, l'opérateur souffre d'un trou d'air dans les deux domaines. 
En effet, l'émergence des "SmallSatt" crée de l'incertitude sur le marché privé. Chez les institutionnels, pas mieux, la demande de lancement émanant de la Commission Européenne, de l'ESA, et des Etats membres est inexplicablement... frileuse, elle qui assure généralement un quart des lancements. Seul les programmes militaires ou le GPS européen, Galileo, maintiennent le navire à flot (ou même des lancements publics.. étrangers !). Et quand on sait qu'un lancement institutionnel rapporte le double...

Il y aurait donc comme une sinistrose dans le spatial européen ? Car évidemment, tous les regards  sont tournés vers les USA et le porte-étendard SpaceX d'Elon Musk.
Oui SpaceX est littéralement dopée financièrement, ce qui lui offre une compétitivité inégalée. Inégalée mais pas inégalable, puisque ses concurrents du "NewSpace" comme le Blue Origin de Jeff Bezos jouent dans la même catégorie. Mais l'argent ne fait pas tout, et c'est une véritable prouesse qu'ont réalisé ces entreprises, nées au tournant du siècle.
Elles ont su relancer la toute puissance américaine dans le spatial, elle qui, excepté dans le secteur militaire bien sûr, était sur le déclin. Surtout, il ne leur aura fallu que quelques années pour venir concurrencer une Ariane 5 ronflant sur ses succès et son prestige (nous ne lui enlèverons ni l'un ni l'autre).

Aujourd'hui, en 2018, le Falcon 9 de SpaceX tire deux fois plus qu'Ariane. Et il est réutilisable.


Ci-dessous, une infographie (ainsi qu'un article) de résumant la guerre qui se déroule entre Ariane et SpaceX:

Source boutique-box-internet.fr


On se souviendra, alors que ce blog avait à peine un an, en 2014, d'une Europe hésitante qui parlait d'une Ariane 5 "ME" (midlife evolution), et dont les responsables doutaient ouvertement de la crédibilité des plans américains pour la réutilisation de lanceurs. Les plans européens eux, furent balayés durant cette même année 2014, et en décembre Ariane 6 était lancé dans l'urgence. Probablement trop tard. 

Alors tout n'est pas perdu bien évidemment, d'autant plus que Ariane ne joue pas vraiment dans la même cour que la Falcon 9, restant un lanceur plus lourd, et donc une valeur sûre dans le domaine stratégique. Seulement, il va falloir fluidifier l'ensemble des processus décisionnels, politiques ET technologiques, afin de pouvoir bénéficier des capacités d'innovation nécessaires pour suivre le rythme. 

Lire aussi sur le blog: New Space vs Vieille Europe ? (février 2018)


On ne sait pas grand chose des plans européens concernant la réutilisation, si ce n'est qu'ils n'arriveront ni à court, ni à moyen terme. 
Il faudra aussi de plus régler un problème majeur: celui de la gouvernance du programme Ariane. Retour géographique calqué sur le financement de chaque pays, préférence européenne inexistante (même problème dans l'armement en Europe, ou est le "Buy European Act" ?), processus décisionnel lourd... 

Le PDG du groupe Ariane, Alain Charmeau, quittera ses fonctions en 2019. Son successeur aura alors de formidables défis à relever. Les européens disposent de ressources techniques et humaines exceptionnelles, leur point faible est aujourd'hui politique.

Dans quelques jours sera présentée à Emmanuel Macron la stratégie spatiale pour la France. Ce document d'une haute importance commandé au ministère des Armées aura à n'en pas douter une très forte empreinte européenne. Ce sera l'occasion de faire le point et d'impulser une vraie stratégie dans ce contexte international renouvelé. Des voix se font d’ailleurs déjà entendre sur ce point, comme celle du général (2S) Jean-Daniel Testé, ancien Commandant interarmées de l'espace.


L'ambition de Dassault Aviation dans le spatial

Et en attendant la "stratégie spatiale", ce billet est aussi l'occasion de rappeler que l'Europe ne manque pas non plus de visionnaires. Un article paru dans l'Usine Nouvelle daté du 7 novembre 2018 et intitulé, "Dassault Aviation affiche ses ambitions dans le domaine des avions spatiaux", relate les propos du PDG Eric Trappier lors d'une conférence. 

Le dirigeant de Dassault Aviation y rappelle une vérité qu'il avait déjà pu évoquer par le passé: "Qui contrôle l'espace, contrôlera ce qu'il y a en dessous. Il faudra être dans l'espace avec très certainement des avions spatiaux à un horizon de 15 à 20 ans" (...) "Si on vole dans l'espace, Dassault Aviation peut y être et doit y être".

Illustration du projet VERHA de Dassault Aviation... en 2007

Dassault Aviation, fabricant du Rafale et des Falcon, maître d'oeuvre sur le chasseur européen du futur, aurait donc des plans dans le but de se positionner comme partenaire technologique dans le cadre d'un programme d'avion spatial, habité ou non.

La chose est mal connue, mais Dassault Aviation est déjà une entreprise du secteur spatial. On trouve d'ailleurs sur le site officiel de l'avionneur les programmes engagés par le passé. Les connaisseurs du Rafale penseront bien sûr à la technologie MLA (mini-lanceur aéroporté), mais nous citerons ici la famille de véhicules suborbitaux VEHRA (VéHicule Hypersonique RéUtilisable AéRoporté), un système de transport spatial réutilisable pour lancer des satellites en orbite basse. Il se compose d’un véhicule hypersonique aéroporté et d’un avion gros porteur subsonique. 
Le projet, aussi prometteur soit-il, ne fut plus évoqué publiquement après 2010. Mais nous avions Ariane 5...


Mais plus proche de nous, le démonstrateur IXV (Intermediate eXperimental Vehicle), qui le 11 février 2015, depuis une altitude de 420 kilomètres et décélérant de Mach 22 à Mach 2, avait effectué une rentrée contrôlée par des gouvernes aérodynamiques. C’était une première pour l’Europe. Le démonstrateur avait un temps été exposé chez Ariane Group au Haillan (33). 
Pour ce programme de l’ESA conduit sous la maîtrise d’oeuvre de Thales Alenia Space-Italie, la société était fortement impliquée dans la conception de la forme et l’aéro/thermodynamique.

Le positionnement de Dassault est absolument stratégique dans ce domaine, et surtout logique car il est probable qu'à horizon... disons 2040+, le futur de l'aviation se joue dans l'espace, aussi bien dans le militaire que dans le civil.
La mal-nommée 6ème génération de chasseur sera peut-être bien la dernière avant la grande rupture attendue dans le monde de l'aérospatial.

Sans attendre jusque là, rappelons que les USA disposent d'un véhicule semi-autonome (le X-37B) en permanence au dessus de nos têtes, et que des projets similaires sont en route ailleurs dans le monde. Il serait temps que la France ou l'Europe disposent également de telles capacités, ou du moins ambitions.


Conférence 3AF sur Ariane 6: le 28 novembre, 18h à l'ENSAM de Talence (33)