Bientôt deux ans et demi après les événements des ballons chinois aux Etats-Unis, la France annonce avoir procédé à des tests d'interception de ce type d'aéronef dans la "très haute altitude" (THA). Ces démonstrations réalisées depuis la base de Cazaux interviennent quelques jours à peine après la présentation de la nouvelle stratégie pour la THA de l'armée de l'Air et de l'Espace.
Images : ministère des Armées.
Conformément aux annonces des derniers jours, la France a bien procédé en ce mois de juin 2025 à plusieurs tirs de missiles contre des ballons stratosphériques évoluant dans la fameuse THA, soit à une altitude équivalente ou supérieure à 20 km. Plus qu'une démonstration technique, un véritable acte de signalement stratégique.
C'est le ministre des Armées Sébastien Lecornu qui l'a annoncé mardi 24 juin, sur les réseaux sociaux, vidéo à l'appui :
" Des Rafale et Mirage 2000 ont réalisé avec succès les premiers tirs de missiles MICA vers des ballons stratosphériques opérant à très haute altitude (THA) fournis par le CNES.
Des tirs d’essai repoussant les contraintes technologiques qui s’exercent sur l’avion, son pilote et son armement au-delà de 20 kilomètre d’altitude. Première étape franchie sur le volet interception de la stratégie de nos armées pour la THA, qui devient un espace de conflictualité. Félicitations à nos aviateurs et aux équipes DGA mobilisées pour ce succès."
Comme aux USA avec le F-22, ou en Inde avec le Rafale, ce sont des avions de combat qui ont été mobilisés, en l'occurrence les deux appareils spécialisés dans l'armée de l'Air et de l'Espace, le Rafale et le Mirage 2000. Pas d'information sur les munitions tirées, et notamment si l'expérience a été calibrée (ballons fournis par le CNES, l'agence spatiale française) pour du radar ou de l'infrarouge*. [MISE A JOUR 26 JUIN : utilisation de MICA IR selon de nouvelles images diffusées]
Les tests ont été effectués depuis la base aérienne de Cazaux, au dessus du golfe de Gascogne.
Rappelons que la semaine dernière au Salon du Bourget, le ministre avait révélé la stratégie nationale pour la THA, cette fameuse tranche de "ciel" entre les 20 et 100 km. Nous ne détaillerons pas aujourd'hui cette doctrine, somme toute assez prévisible dans son déroulé (détecter, identifier, intervenir, opérer), mais avec cette démonstration, la France se positionne très clairement sur le sujet d'un supposé "flou juridique" qui ferait de la THA un espace de liberté. Tout comme les Etats-Unis, elle ne se laissera pas survoler par des puissances rivales.
*à ce titre, plusieurs campagnes ces derniers jours avec tir de Mica NG sur Rafale, et tir de METEOR sur Rafale Marine.
L'édition 2025 du Salon international de l'aéronautique et de l'espace, mieux connu sous le nom de Salon du Bourget (le 55ème), aura été marquée par une curieuse sensation. Celle d'être devenu un salon de défense.
Images - Thomas Schumacher / @paxaquitania, MINARM, industriels.
Le pesant parfum de la poudre flottait -ou plutôt soufflait vu la puissance nécessaire pour climatiser cette chaude semaine- dans les larges allées du Salon du Bourget 2025. Etonnant ? Oui en fait, car même en 2023, lors de l'édition qui suivait le déclenchement de l'invasion de l'Ukraine un an plus tôt, et bien que les sujets défense soient dans toutes les discussions à l'époque déjà, nous n'avions d'une part, pas le même niveau de maturation des systèmes, et d'autre part, pas ce constat d'isolement stratégique de l'Europe résultant de l'élection de Donald Trump.
Certains parmi les 300 000 visiteurs (record absolu) l'auront d'ailleurs amèrement regretté ce climat, y compris chez les professionnels, et en particulier dans le Paris Space Hub, espace géant exclusivement dédié au spatial, mais c'est tout simplement le signe des temps (ajoutons l'ambiance délétère qui régnait autour de la présence d'armes "offensives" [sic] sur les stands israéliens).
Cette année, les projets (je n'ai pas dit programmes, mais on sent tout de même de la maturité) se présentent également de façon différente, avec une propension à l'auto-financement qui, de façon limitée attention (d'autant plus que ce n'est pas possible pour tout le monde), semble inaugurer un retour à la prise d'initiatives, et donc de risques. Ou au coup politique, on peut le voir comme ça.
Problème, même en ces temps de crises et de promesses de budget géant pour la défense, l'Etat reste avare… et se contente souvent d'observer avec une prétendue bienveillance. Il faudra bien enclencher un jour attention, sous peine de casser la machine à innover, et de voir certaines idées partir à l'étranger. Cela serait bien dommage à l'heure où le catalogue à notre disposition se remplit considérablement, et de façon parfois étonnante. Il y avait en effet sur cette édition du Bourget des propositions dont les forces françaises n'auraient pas imaginé rêver il y a quelques années à peine.
Un tour en quelques grands points 👇
Dassault Aviation maître en sa demeure (sauf pour le futur AWACS)
Pour ce Bourget 2025, l'avionneur de Saint-Cloud, qui à en constater la longue file d'attente pour monter à bord des Rafale ou Falcon, reste sans conteste la star du salon, et a choisi ses priorités. Ces dernières sont énumérés dans les sorties presse du PDG Eric Trappier, et se ressentent sur les exhibitions. Pour le court terme donc, c'est le Rafale F5 (2030+). Pour le moyen terme, le drone UCAS (héritier du Neuron en 2035), et pour le long terme un appareil de combat de sixième générationun avion spatial : VORTEX !
Dassault Aviation est enfin sorti du bois sur ce sujet. L'avion spatial habité, ici en héritage direct de feu la navette européenne Hermes, c'est le grand -et prestigieux- rêve du groupe à horizon 2050, mais l'Etat (CNES, DGA, armée de l'Air), qui manque de moyens, ne semble pas totalement convaincu par cet appareil à tout faire qu'il juge très complexe, bien qu'injectant symboliquement 30 millions d'euros dans les études de développement. Dassault devrait donc aussi aller chercher du soutien du côté de l'Agence spatiale européenne, et tenter de fonctionner par étapes (la fameuse méthode itérative du new space ?!?), avec à court terme plusieurs démonstrateurs de taille réduite, puis un drone. Nous aurons l'occasion d'en reparler, car quoiqu'on en pense, le dossier est relancé !
L'Etat apporte un soutien au projet Vortex de Dassault Aviation - Photo MINARM
Concernant le Rafale, nous avons déjà un peu tout dit sur le standard F5, mais le motoriste Safran confirme s'engager dans la remotorisation de l'avion avec le M88 T-REX (9 tonnes de poussée), et Thales prépare un pod de guerre électronique. Les réservoir conformes de 1 200 litres qui donnent un look différent au Rafale étaient visibles, non pas chez Dassault Aviation, mais sur le stand du ministère des Armées, ce qui est une nuance importante. Il n'est pas dit, que pour des questions de maintenance, cette idée n'aille beaucoup plus loin que le bricolage pour la photo.
Le Rafale avec réservoirs conformes sur le stand MINARM, et la bombe AASM XLR - Photo TS.
Mais le standard F5, c'est aussi un drone de combat partenaire de mission, l'UCAS, qui selon la maquette 1:1 dévoilée est une évolution parfaite du démonstrateur Neuron. Un Neuron "durci", "lourd", si l'on veut. Ce drone furtif fera approximativement la taille d'un Mirage 2000, et sera doté d'un seul moteur, le M88 du Rafale, ainsi que du train d'atterrissage de ce dernier. Il pourra être navalisé, mais seulement à bord du porte-avions de nouvelle génération, qui disposera de catapultes électromagnétiques.
Pour la France qui manque clairement de capacités furtives, ce programme apparaît comme structurant pour nos forces aériennes et leur capacité d'entrée en premier, notamment après les démonstrations réalisées en Iran par Israël, puis par les USA.
UCAS : unmanned combat air system - photo TS
Un mot également sur le futur des AWACS de l'armée de l'Air et de l'Espace. Comme pressenti, cela se fera bien avec le système Global Eye de Saab (sur avion porteur Bombardier), la déclaration d'intention est signée depuis le 18 juin pour quatre appareils, dont deux fermes. Probablement davantage au cours de la LPM suivante.
Je plaidais ici même il y a deux ans pour une intégration de la solution Saab sur le Falcon 10X, et il semble bien que Dassault ait eu son mot à dire avant le choix définitif de la DGA. Cette dernière n'a toutefois pas été convaincue par la proposition, car les E3 Sentry de l'armée de l'Air épuisent leur potentiel à vu d'œil. Bref, il ne fallait pas tergiverser, et l'industrie française a tergiversé. Il en ressort un beau geste de la France envers l'Europe, et pour la Suède, qui fournit en capacité d'alerte avancée une puissance nucléaire, c'est un coup absolument magnifique.
Communication politique, en France puis la réponse suédoise.
L'espace en force, et la force dans l'espace
Au delà du Vortex de Dassault, l'espace était assurément l'un des grands points du Bourget 2025, avec pour la première fois, l'imposant Space Hub, mais pas seulement puisque l'armée de l'Air et de l'Espace avait aussi son showroom dédié. Le Space Hub réunissait bien sûr le CNES et l'ESA (pour son cinquantième anniversaire), ains que les start-up qui y bénéficiaient d'une visibilité accrue. Un lieu où tout ce que le spatial européen a de personnalités est venu faire un coucou. Sauf l'astronaute française Sophie Adenot, en formation à Houston, qui assisté en visio à la révélation du nom et du logo de sa mission de 2026 ("Epsilon"), lors de la venue d'Emmanuel Macron le vendredi 20 juin, visite durant laquelle le Président de la République a tenu, au sein du Space Hub, son seul discours officiel du salon, entièrement consacré au spatial donc, et à la teneur très stratégique. S'il faudra finalement attendre octobre pour avoir la nouvelle stratégie spatiale nationale (résolument orientée vers une convergence avec les alliés que sont l'Allemagne, l'Italie, l'Inde, les Emirats, et le Royaume-Uni), le sujet central sera resté celui du spatial comme "jauge de puissance". Une formule présidentielle qui restera.
Au Paris Space Hub, derrière les Agences, on pouvait trouver le stand très central d'ArianeGroup, où en plus du produit emblématique Ariane 6, l'industriel ne se gênait pas pour promouvoir sa filiale MaïaSpace bien sûr, mais aussi de façon beaucoup plus surprenante, son futur missile balistique conventionnel MBT, sa fusée sonde Sylex capable d'emporter le planeur hypersonique V-MAX, ainsi que… le missile stratégique M-51. On ne se cache plus donc.
Mais les start-up de micro-lanceurs (qui comptent bientôt quasiment 100 employés chacune) n'étaient pas en reste, la bordelaise Hyprspace présentant même une maquette de son lanceur suborbital OB-1 adaptée à la flexibilité des missions de défense. Mais nous en reparlerons.
A deux pas, Eutelsat pouvait se targuer d'avoir été complètement rattrapé dans sa chute financière par l'Etat français, qui monte à 30% au capital afin de sanctuariser la constellation de connectivité One Web, que Paris considère comme la seule alternative souveraine au Starlink d'Elon Musk. Eutelsat se voit d'ailleurs offrir 10 ans de contrat militaire avec les forces françaises.
A noter également que le Commandement de l'Espace lançait au Bourget le 19 juin le "cercle de confiance Espace", cadre de discussion privilégié avec les entreprises du secteur, avec l'idée que l'offre et la demande se rencontrent plus directement, pour ne plus perdre de temps.
Emmanuel Macron a enfin annoncé que la France organiserait début 2026 son premier "Space Summit", afin de mobiliser, dans son sens on le devine, les partenaires internationaux.
Le salon de l'aéronautique aérobalistique
Présenter une munition a pour avantage que l'on peut se déplacer indifféremment tous les ans à un grand salon français: le Bourget ou Eurosatory (le salon de l'armement terrestre). Et les munitions ne manquaient pas cette année, à commencer par la Hammer 250 XLR de Safran (photo plus haut), une AASM turbopropulsée par microréacteur Roxel, ce qui permettra à la célèbre bombe de précision française de porter jusqu'à 150 km en 2028 quand elle sera tirée depuis un Rafale, contre 50 à 70 aujourd'hui avec son booster à poudre.
Très médiatisée, mais difficilement accessible sur stand, la fameuse munition de saturation One Way Effector (OWE) de MBDA, était présentée comme le Shahed français, ce drone iranien désormais utilisé par les Russes et qui terrorise la population ukrainienne.
OWE, développée avec un droniste, devra être produite en masse (1 000 exemplaires par mois, grâce à l'industrie automobile ?), n'être pas trop chère, et agir en essaim pour découvrir, saturer, et si possible traiter les capacités de défense aérienne adverses jusqu'à 500 km de distance grâce à une charge explosive de 40 kg. Tout cela sans être brouillée grâce au savoir faire de MBDA dans la navigation et le ciblage dynamique.
Sur le même segment ou presque des munitions téléopérées, Eos Technologie (qu'on a autrefois connu chez nous à Mérignac) montrait sa gamme à microréacteur Veloce, qui est désormais intégrée au catalogue de KNDS. La Veloce 330 va entrer en phase de test au sein des forces françaises, tandis qu'Eos travaille sur "Rodeur" pour plus de portée (500 km) et d'autonomie (8h).
MBDA dévoilait aussi une maquette de lanceur à 4 silos pour la version terrestre de son missile de croisière naval, le MDCN devenu MDCT. On parle ici de longue portée pour ce missile de 2 tonnes capable de parcourir 1 000 km en subsonique. Campagne de tir prévue à Biscarrosse chez DGA EM d'ici 2 ans et demi.
Et puisque l'on parle de lanceur, Turgis & Gaillard , qui avait fait sensation avec le drone Aarok en 2023, est de retour pour combler les trous de la raquette française avec un véhicule lanceur de roquettes, dont le démonstrateur a une fois de plus été financé sur fonds propres, sur la base d'un châssis 6x6 Renault Trucks. Le système se veut rustique, aérotransportable, et surtout agnostique de missiles. Un rapport parlementaire récent préconise l'achat de 48 lanceurs.
Le lanceur Foudre de Turgis & Gaillard - Photo TS.
Je le mentionnais avec ArianeGroup, c'est le retour potentiel des capacités balistiques conventionnelles. Ariane se différencie là de l'offre MBDA, que l'on parle de missiles de croisière ou drones comme le OWE. Chez Ariane, on mise en effet avec MBT (missile balistique tactique) sur l'extra atmosphérique comme facteur différentiant, afin de ne pas être interceptée. Cela vient donc compléter l'offre des munitions endoatmosphériques de très longue portée… où Ariane développe son démonstrateur stratosphérique V-MAX, qui lui aussi est théoriquement impossible à abattre en raison de sa vitesse et de sa manœuvrabilité. Complémentaire, ou alternatif ? Cela dépendra du portefeuille, forcément conséquent, que l'Etat décidera d'allouer à ces capacités de frappe dans la profondeur.
Pour conclure, l'on notera quelques éléments, en retrait, voire carrément absents :
le SCAF bien sûr, avec une maquette de NGF -déjà vieille de 6 ans- placée en retrait, chose remarquée avec un certain étonnement par les Européens présents (je vous le traduis : cela veut dire "pas en bien"). Dassault Aviation et son PDG Eric Trappier veulent imposer une pression monstre à Airbus Defence & Space au moment de négocier la phase de développement d'un démonstrateur de futur avion de combat dont la date du premier vol semble une nouvelle fois avoir glissé (2030 aujourd'hui). Un pari osé, très critiqué par les observateurs, mais qui je l'imagine, pourrait s'avérer payant si Airbus se retrouve poussé dans les cordes. D'autant plus qu'en Allemagne, le géant Rheinmettal multiplie les coups de couteau dans le dos, enchainant les accords de production sous licence avec les Américains de Lockheed Martin (fuselage F-35 entre autres) et Anduril (drone de combat Fury). Airbus serait désormais en quête d'alliances.
Combat collaboratif. Et le NGF, en retrait… symboliquement - Photo Thomas Schumacher
Les commandes !?! Où sont les commandes ??? Chez Embraer ! Plus sérieusement, on pouvait espérer a minima 20 Rafale Air et 10 Marine pour les forces françaises, comme cela avait été suggéré dans la presse ce printemps. Et l'accord avec la Suède et Saab pour le Global Eye n'est pas encore au stade de la commande ferme (cela viendra dans les prochains mois). Sur les drones et munitions terrestres, il s'agira aussi de vraiment accélérer, afin que l'armée de Terre s'exerce.
Concernant les retards, comme je le disais plus haut, la publication de la stratégie spatiale nationale est décalée, ce sera pour octobre à Toulouse lors de l'inauguration des nouvelles installations du Commandement de l'Espace. Et si la stratégie pour la THA (très haute altitude) a bien été présentée par le ministre Sébastien Lecornu, le fameux tir sur ballon atmosphérique qui devait se dérouler en ce mois de juin n'avait toujours pas été réalisé au moment du salon. [MISE A JOUR : succès de plusieurs tirs sur ballons en THA annoncé ce lundi 23 juin !]
Eté toujours, où l'on attend le premier vol du drone Aarok de Turgis & Gaillard. Cela s'est joué à peu pour une annonce au Bourget, mais la météo en a décidé autrement à la date prévue début juin. Une question de semaines désormais, le temps de tout remettre en place. Là encore, j'attends plus d'engagement de la part de l'Etat, T&G ne pourra pas tout faire sur fonds propres. Mais le Aarok continue bien de surfer sur la hype générée en 2023, pendant que l'Eurodrone (Airbus) et le Patroller (Safran) se montraient bien timides une fois de plus. A juste titre…
Les "territoires" : difficile en effet d'exister pour la province quand les questions qui dominent concernent la géopolitique, et donc Paris, ses centres de décisions et ses sièges sociaux. On notera d'ailleurs que les start-up ou PME qui font le plus parler sont celles qui ont été prises sous l'aile du ministère des Armées ou d'un grand groupe. Difficile également sans argent public disponible au niveau régional. Difficile enfin quand on a subi la désindustrialisation, et que ce sont des capacités de production dont on a désormais besoin (par exemple : on ne parle pas cette année de faire financer et construire des usines, mais plutôt d'utiliser celles des géants de l'automobile). A oui au fait… l'Aquitaine et Bordeaux-Mérignac ont perdu Hynaero et son projet de bombardier d'eau Fregate F-100, qui filent à Istres. Mais comme dirait l'autre: "Ce n'est pas grave on va faire des dirigeables !". Heureusement il y a Eurenco, qui signe des accords structurants avec Saab en Suède, et FN Herstal en Belgique.
L'envie d'ajouter tout le secteur civil, où le choses vont bien, très bien même, mais clairement pas sous le feu des projecteurs médiatiquement parlant, surtout quand on connait la chute vertigineuse d'attention (ou pire, d'intérêt ?) que connaissent les problématiques de RSE, en premier lieu la décarbonation. Mais dans ce dernier domaine, les choses vont tout de même bon train, en particulier chez Safran. Quant aux taxis volants, il y en a peut-être deux fois moins qu'en 2023.
Les absents: les Falcon de mission dont on parle vraiment trop peu (ce qui a laissé la place au Global Eye, sur Bombardier G6000). Pas de Mirage non plus, mais les verra-t-on encore ? Tout comme les appareils d'ancienne génération comme l'ATL-2 ? Plus étonnant, l'A330 MRTT n'était pas là non plus. Quand à l'actualité hélicoptère, elle était surtout contemplative avec les vols quotidiens du magnifique démonstrateur Racer d'Airbus, que l'on voit tout de même mal trouver un marché…
Le -magnifique- Racer d'Airbus Helicopters - Photo TS
Pour la première fois, des éléments du chasseur Rafale vont être produits hors de France. Et plus précisément en Inde, dans le cadre du partenariat stratégique qui unit les deux pays et leurs industriels. C'est en effet ce qu'ont annoncé Dassault Aviation et Tata Advanced Systems ce 5 juin.
Ci-dessus: un Rafale dans l'usine de Mérignac (33) - Dassault Aviation
Après des années de spéculations, en raison des offsets négociés dans le cadre du premier contrat Rafale de 2015, Dassault Aviation et Tata Advanced Systems ont annoncé jeudi 5 juin par communiqué la signature de quatre accords de transfert de production pour la fabrication du fuselage du Rafale pour l'Inde "et d'autres marchés internationaux".
Plus précisément, Tata Advanced Systems mettra en place un site de production à Hyderabad pour fabriquer des sections clés du Rafale, dont les corps latéraux du tronçon arrière, le tronçon arrière complet, le fuselage central et la section avant. Les premières sections de fuselage devraient sortir de la chaîne d'assemblage en 2028, avec l'objectif de long terme de produire jusqu'à deux fuselages complets par mois.
Rappelons que l'ouverture d'une seconde chaîne de production, au moins partielle (certains éléments ne pouvant pas être fabriqués hors de France pour des raisons de sécurité nationale), est nécessaire pour atteindre l'objectif, non officiel mais potentiellement nécessaire en cas de nouvelle crise internationale, de cinq Rafale par mois.
Etant donné l'actuel carnet de commande de Dassault, et l'évolution du marché, l'usine de Mérignac elle, peut voir venir pour quasiment une décennie.
L'Inde, qui vient de commander 26 Rafale pour sa Marine au mois d'avril, est cliente de l'appareil depuis 2015, lorsqu'elle avait opté pour 36 appareils pour son armée de l'air. Il y a quelques semaines, au cours d'un affrontement historique avec le Pakistan, elle a perdu son premier Rafale au combat.
Du 12 au 23 mai se déroule sur la côte aquitaine le grand exercice des forces spéciales Air, Athena. L'occasion de découvrir des images exceptionnelles impliquant A400M, hélicoptères Caracal, et Rafale de l'armée de l'Air et de l'Espace.
Images : armée de l'Air et de l'Espace.
Alors que les premières qualifications de pilotes concernant le ravitaillement en vol des hélicoptères Caracal des forces spéciales (régiment basé à Cazaux) par l'Airbus A400M ne datent que de la fin de cet hiver 2025, l'armée de l'Air et de l'Espace nous offre de splendides images provenant de l'exercice "Athena", dont la dernière édition se déroule du 13 ou 23.
Athena, exercice sur-mesure -et même un "entraînement qualifiant"- pensé par et pour les forces spéciales Air, voit la conduite d'une dizaine de missions aux scénarios variés: contre-terrorisme, action dans la profondeur, renseignement et activité en zone grise militarisée. Ceux-ci impliquent la base aérienne 120 de Cazaux, la base aérienne 126 de Solenzara (Corse), la base aérienne 118 de Mont-de-Marsan et le champ de tir de Captieux (Landes).
L'armée de l'Air y aligne les hélicoptères Caracal de Cazaux, l’escadron de transport (ET) 3/61 “Poitou” venu d'Orléans, les commandos parachutistes de l’air n° 10 et n° 30, ainsi que les Rafale de l’escadron de chasse (EC) 2/30 “Normandie-Niémen”, depuis Mont-de-Marsan. Sans oublier de mentionner les modules d’appui aux opérations spéciales (sapeurs du génie de l’air, spécialistes du renseignement, des systèmes d’information et communication).
Mais encore, de façon plus générale, le COS, dans son sens large, ainsi que les alliées, étaient aussi présents aux côtés de l'armée de l'Air: 1er RPIMa, 4e régiment d’hélicoptères forces spéciales (RHFS), commandos et équipages d’hélicoptères espagnols de l’Ejercito del aire, et enfin des C-130J américains de l’Air Force.
Ce lundi 28 avril, l'Inde a signé avec la France un accord pour l'acquisition de 26 avions de combat Rafale, produits par le groupe Dassault Aviation. Alors que l'Indian Air Force possède déjà 36 Rafale, il s'agit ici plus spécifiquement d'appareils destinés à son aéronavale. Et donc, du premier succès à l'export pour le Rafale Marine.
Ci-dessus: des Rafale M français sur le pont du porte-avions Charles de Gaulle.
Via communiqué officiel, Dassault Aviation confirme que l’Accord Intergouvernemental entre la France et l'Inde a été signé ce jour permettant la signature, en présence d’Éric Trappier, Président-Directeur général de Dassault Aviation, du contrat d’acquisition par l'Inde de 26 Rafale Marine pour équiper la marine indienne (Indian Navy).
Le montant du contrat est de 6,5 milliards d'euros, pour 26 Rafale (22 Rafale M, et 4 Rafale B pour la formation). Livraisons entre 2029 et 2031.
Le Rafale avait été choisi par l'Inde en juillet 2023 pour équiper son nouveau porte-avions, l'INS Vikrant, en remplacement d'antiques Mig-29 de fabrication soviétique. Durant le processus de sélection le Rafale faisait face au F-18 Super Hornet de l'américain Boeing.
Notons que dans le cas très précis de l'Inde, l'appareil français a dû être qualifié pour décoller avec tremplin, et non catapulte comme sur le Charles de Gaulle.
Outre le fait que ce contrat renforce encore (et ce n'est pas fini) le partenariat stratégique entre l'Inde et la France, celui-ci est historique puisque l'Indian Navy devient la première force aéronavale à se doter du Rafale, après la Marine Nationale française donc.
Pour rappel, l'Indian Air Force dispose déjà de 36 Rafale -qu'elle pourrait aligner face au Pakistan ces prochaines semaines- et attend encore au moins 114 appareils de combat multirôle dans les prochaines années (nouvelle compétition).
Pour Dassault, c'est la confirmation que New Delhi est son meilleur client. De là à planifier l'ouverture d'une hypothétique seconde chaine d'assemblage en Inde, alors que celle de Mérignac a un plan de charge pour 10 ans…
Pour la France, qui pourrait/devrait passer une commande d'une trentaine d'appareils au mois de juin afin de se renforcer dans le nouveau contexte stratégique européen (et pas seulement européen), le retour du Rafale M sur la ligne d'assemblage est l'occasion de recompléter une flotte qui stagne depuis 2016 et la livraison du 46ème appareil de ce type à la Marine Nationale. 4 appareils ayant été perdus depuis 2001, cette dernière n'en dispose dont que de 42 aujourd'hui, dont un est réservé aux essais.
La piste du F-35 se refroidit très largement au Portugal, après les déclarations dans la presse du ministre de la défense jeudi 13 mars. Le pays avait pourtant ouvertement privilégié cet avion pour le futur remplacement de ses F-16. Désormais, dans un contexte géopolitique historique, la porte est ouverte pour les avions de combat européens, dont le Rafale.
Ci-dessus: Emmanuel Macron au Portugal fin février 2025 - photo Elysée.
Cela devait arriver, commencer quelque part en Europe. Conséquence directe de la nouvelle politique diplomatique américaine, brutale, le Portugal annonce par la voix de son ministre de la défense (jeudi 13 mars dans la presse locale) qu'il ne prévoit plus de se doter du chasseur F-35 de Lockheed Martin. Le choix se fera donc en faveur de matériels fabriqués par des alliés "qui seront à nos côtés en toute circonstances". "La position récente des États-Unis, au sein de l'OTAN et sur la scène géostratégique internationale, doit nous inciter à réfléchir aux meilleures options, car la prévisibilité de nos alliés est un atout majeur à prendre en compte". Les mots sont forts.
Si le Portugal n'a encore rien signé avec les Etats-Unis pour le remplacement de ses 28 F-16, l'armée de l'air avait indiqué au printemps 2024 que le choix se porterait sur l'avion furtif américain, en raison de l'interopérabilité que ce dernier offrait avec les pays de l'OTAN. Lisbonne préparait donc cette transition sur "deux décennies", menant des ateliers sur la "cinquième génération". Le montant du renouvellement avait été chiffré à 5,5 milliards d'euros.
L'élection de Donald Trump, et surtout la conduite de son administration depuis, constituent donc évidemment un bouleversement qui mène à ce revirement majeur. Ironique, quand on sait comment un tel marché aurait pu être retourné par les Américains par le passé, au hasard, en Suisse…
Et alors que le schisme transatlantique se porte visiblement sur le terrain industriel et commercial, avec pour ce qui concerne la défense un véritable mouvement de défiance des Européens qui s'inquiètent ENFIN de leurs dépendances technologiques, en particulier s'agissant du F-35 et de ses restrictions d'utilisation, plusieurs pays dans le monde (et donc, aussi en Asie) doutent désormais du fournisseur historique. Au grand dam du complexe militaro industriel américain, dont les valeurs s'effondrent en bourse.
Le Portugal n'est certes pas la plus grande armée d'Europe, mais une trentaine de Rafale ne serait pas de trop sur le flan sud européen, d'autant plus que ces derniers seraient projetables vers l'est aux côtés des appareils et ravitailleurs français. Ce serait une façon pertinente pour Lisbonne de participer à la défense de l'Europe.
J'ajouterai enfin trois éléments:
attention, il s'agit de la décision d'un gouvernement démissionnaire. De nouvelles élections législatives sont prévues en avril. Il faudra donc voir le point de vue des partis politiques;
la compétition (non datée) sera probablement ouverte aux trois appareils européens. Sur ce point, l'Eurofighter offre une interopérabilité avec les Espagnols, et le Gripen suédois fait sens (prix et capacités);
Emmanuel Macron était en visite d'Etat au Portugal il y a deux semaines, pour évoquer notamment les sujets défense, avec par exemple la vente de canons Caesar. Hasard ?
Un mot rapide pour signaler une double parution: d'une part cette étude de l'IFRI particulièrement interessante, datant de la fin du mois de janvier. Et d'autre part la synthèse de cette dernière que j'ai réalisé sur un blog secondaire, pour ceux qui n'auraient pas le temps de digérer les 116 pages du document. Suivre CE LIEN !
Alors que la Syrie connait enfin, on l'espère, le dénouement de sa guerre civile, appelée désormais révolution, la France a rappelé le 31 décembre 2024 qu'elle maintenait la pression militaire sur le groupe Etat islamique. Des frappes aériennes ont en effet été réalisées par l'armée de l'Air à l'aide de Rafale et d'un drone Reaper.
C'est le type d'exercice de communication auquel on s'était largement habitué durant ce premier quart de siècle, mais qui se faisait beaucoup plus rare dernièrement, notamment depuis le retrait partiel (et bientôt total) des forces françaises de leurs bases africaines. Le -toujours- ministre des Armées, Sebastien Lecornu, a annoncé mardi 31 décembre, vidéo à l'appui, que l'armée de l'Air et de l'Espace avait frappé deux positions du groupe Etat islamique (EI) en Syrie dans le cadre de la coalition anti-jihadiste internationale. Il s'agit de la première opération de ce type depuis deux ans.
Ce sont des Rafale et un (des) drone(s) Reaper qui ont participé à l'opération, depuis la Jordanie, où la France dispose d'une base aérienne projetée depuis une décennie. 600 hommes et femmes sont toujours impliqués sur Chammal, essentiellement depuis la Jordanie, les Emirats Arabes Unis, et plus confidentiellement, l'Irak. Le dispositif est aussi renforcé par la Marine lors des passages dans la région du groupe aéronaval.
Malgré l'actualité brulante sur la zone (Syrie, Liban, Israël/Palestine, Iran… Yémen), il est vrai que l'on parle moins de l'activité aérienne française sur zone. Elle demeure importante et parfois intense, puisque même si la France n'avait pas frappé Daesh depuis deux ans, des appareils français avaient participé au printemps 2024 à la défense d'Israël face aux salves de missiles et drones tirées depuis l'Iran.
Et voilà donc que l'on a enfin des nouvelles officielles de la flotte de drones MQ-9 Reaper en opérations. Après le départ -ou même l'expulsion- du Niger à l'été 2023, il se murmurait que l'activité opérationnelle des Reaper se concentrerait désormais sur le Moyen-Orient, avec comme base la Jordanie. Or, ayant personnellement tenté de me renseigner auprès de l'escadre concernée, ses représentants n'avaient à l'époque pas souhaité commenter l'actualité. La preuve est désormais établie qu'une partie des drones opèrent bien désormais depuis la Jordanie.
A noter qu'en France, le standard Block 5 vient d'être qualifié pour les vols au dessus du territoire métropolitain. Les Reaper sont basés au sein de la 33ème escadre à Cognac, qui comptabilise 12 de ces appareils.
Au fait, j'en profite pour vous souhaiter, chères lecteurs et lectrices, une excellente année 2025 ! En espérant que certaines situations très chaudes le soient nettement moins à la fin de l'année qui débute.
Le motoriste français Safran aurait dans ses cartons un projet "T-Rex" de remotorisation du Rafale, pour son standard F5 prévu pour entrer en service dans les années 2030. Or, il faudra non seulement adapter cette évolution à la structure de l'appareil, mais surtout la financer.
C'est le retour d'un marronnier vieux de 15 ans. Le Rafale aura t-il droit un jour à plus de poussée moteur ? Même si l'appareil, "combat proven/export proven", se défend très honorablement avec ses deux moteurs M88 et leur poussée de 50 kn, ou 7,5 tonnes, dont la maintenance est facilitée et qui ont d'ailleurs passé en 2022 le chiffre symbolique du million d'heures de vol, la question s'est régulièrement posée de savoir s'il fallait lui offrir plus de puissance.
D'emblée, évacuons la question de l'avion du futur, quel qu'il soit. Le "NGF" -européen ou pas- sera un avion de nouvelle génération, avec un tout nouveau moteur. Aujourd'hui il est question du Rafale et seulement du Rafale… à moins que, peut-être aussi du futur drone de combat ? Peu probable à mon humble avis, puisqu'un drone furtif n'est généralement pas supersonique. Mais nous verrons en temps voulu.
Safran a toujours défendu l'évolutivité de son moteur, et étudierait donc avec le programme "T-REX"un moteur M88 d'une poussée de 9 tonnes. Le motoriste défend publiquement le projet depuis une décennie (avec de précédentes études très concrètes), mais se présente aujourd'hui devant le politique et militaire avec trois arguments : l'avion de nouvelle génération ne sera pas opérationnel avant 2045 ou 2050 d'une part, et il faut donc s'appuyer sur la capacité Rafale, vouée à équiper à 100% nos forces aériennes à horizon 2035. D'autre part, des clients importants comme l'Inde ou les Emirats Arabes Unis seraient demandeurs. Enfin, Safran doit maintenir ses savoir-faire avec un programme majeur et intermédiaire avant le SCAF.
Ces trois argument se valent, et surtout sont vrais. D'autant plus que le Rafale F5 s'annonce comme une belle révolution "à mi-vie" pour le fleuron de Dassault Aviation, avec cependant une prise de poids que l'arrivée d'une nouvelle motorisation pourrait compenser.
Problème: il faudra le financer, ce qui n'est absolument pas prévu à ce jour dans la Loi de programmation militaire 2024-30. Et l'on parle tout de même ici d'environ 600 millions d'euros… [Mise à jour 3 décembre : l'armée de l'Air en ferait une priorité]
De plus, du peu d'informations dont je dispose, je pense pouvoir confirmer que Rafale F5 ne connaitra pas d'augmentation de cellule (il faudra aussi arrêter avec ce mythe du Super Rafale). Il s'agit d'une ligne rouge. Si nouveaux moteurs il y a, ils devront faire avec la place qu'il reste. Et il en reste. Le challenge apparaît surmontable sur ce point.
Attention donc, car contrairement à ce qu'annoncent certains médias, il n'y a absolument rien d'acté. Le dossier, et l'opportunité, sont néanmoins sur la table.
De l'IA sur le pod Talios dès 2026
Un mot supplémentaire pour parler de concret, avec la confirmation que Thales va intégrer des logiciels d'intelligence artificielle (dont deep learning) à son module de ciblage Talios dès 2026. C'est une première pour un avion de combat français.
Le Rafale sera alors au standard F4.3, et l'arrivée de l'IA permettra de délester la charge de travail de l'équipage en matière de ciblage, le module étant à même de détecter et de classer automatiquement et en temps réel les objets d'intérêt, tels que les véhicules et les bâtiments. Les algorithmes de reconnaissance d'image ont été entrainés pour cela grâce à des banques de données enrichies en matériels miltiaires. Ils devraient même pouvoir distinguer des détails invisibles à l'oeil humain.
Détail importantissime qu'il est nécessaire de toujours rappeler. Il s'agit seulement d'aide à la décision, et c'est l'humain, in fine, qui décidera de délivrer la munition ou non.
Plusieurs annonces importantes sont tombées ce mardi 8 octobre, et elles concernent en particulier l'armée de l'Air et de l'Espace, et ses systèmes futurs. Hasard du calendrier, les technologies en question sont toutes au cœur de l'actualité stratégique brulante.
Sur la base aérienne 113 de Saint-Dizier pour les 60 ans des Forces aériennes stratégiques (c'est en effet le 8 octobre 1964 qu'un Mirage IV décollait pour la première alerte des forces aériennes stratégiques depuis la base aérienne 118 de Mont-de-Marsan), le -toujours- ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a annoncé une "évolution majeure pour la dissuasion nucléaire aéroportée française".
Cette évolution, c'est le nouveau standard du Rafale, le F5, qui emportera le futur missile nucléaire ASN4G. Et si l'annonce n'arrive que ce 8 octobre, cela fait en réalité "plusieurs mois" que Dassault Aviation s'est vu confier le premier contrat de développement par la DGA. Le Rafale F5 est attendu dans une dizaine d'années.
Cette annonce ne vient pas seule, puisque le ministre a également confirmé le lancement du programme de drone de combat furtif, "qui sera opéré directement depuis le cockpit du Rafale". Ce drone constituera l'héritage du programme de démonstrateur nEUROn, mais l'appareil qui en résultera devrait être largement différent. Ce drone est attendu pour 2035, si l'on se réfère aux propos tenus lors du salon du Bourget en 2023.
C'est probablement un pur hasard du calendrier, ce partenariat Rafale-Drone étant imaginé de longue date, mais ce programme 100% français débute officiellement alors que la Russie a perdu en Ukraine le 5 octobre l'un de ses rares drones de combat furtif Soukhoï S-70 Okhotnik-B. Le drone a visiblement été abattu à courte portée -via l'usage d'un missile IR- par l'appareil qui l'accompagnait (un SU-57 ?) car il était devenu hors de contrôle et se dirigeait de l'autre côté de la ligne de front. Trop tard puisque ses restes ont néanmoins été récupérés en zone ukrainienne...
Premier tir réussi pour l'Aster 30 B1 à Biscarrosse
Avant de se rendre à Saint-Dizier, le ministre était présent sur une autre implantation mardi matin, le Centre d'essais militaires des Landes (DGA essais de missiles).
Il y assistait en effet au premier tir du système franco-italien de nouvelle génération, le SAMPT-NG avec son missile Aster 30 B1 "Nouvelle technologie" (NT). La grande particularité de l'évolution du "Mamba" sera sa capacité à pouvoir intercepter les missiles hypersoniques. Une question devenue essentielle dans le contexte stratégique actuel, alors qu'Israël vient de subir deux attaques balistiques massives venues d'Iran, et que la défense sol-air ukrainienne est mise à l'épreuve quotidiennement depuis février 2022.
Et c'est en tout début de soirée que l'on a appris (via le communiqué et la vidéo ci-dessous) que l'essai avait été mené avec succès. A ce stade, aucune information sur la cible qui a été utilisée, mais pour un premier tir, il s'agissait probablement d'un drone-cible standard. Loin de la gamme hypersonique donc…
La maîtrise du ciel est vitale et se joue dans les airs comme au sol.
Étape importante franchie ce matin sur le site de Biascarosse de la @DGA : succès du premier tir d’essai du missile Aster 30 B1 Nouvelle technologie.
Un dernier mot sur une autre mission de la DGA, confirmée par le ministre ce mardi. Il s'agit de la modification à Cazaux chez DGA Essais en vol des Mirage 2000-5F que la France va céder à l'Ukraine au premier semestre 2025. Ils y seront équipés d'armements air-sol et d'une suite de guerre électronique renforcée.
Après des années d'intérêt affirmé, et des mois de négociations confidentielles, le contrat Rafale entre la France et la Serbie a enfin été officialisé jeudi 29 août lors de la visite d'Emmanuel Macron à Belgrade. La Serbie se dotera donc de 12 Rafale à horizon 2028-29. Un marché éminemment politique.
Dans la région des Balkans, après la Grèce, après la Croatie (rivale des Serbes), la Serbie se dote à son tour d'une flotte d'avions de combat Rafale, devenant le 8ème client export pour cet appareil conçus et fabriqué par Dassault Aviation. Le Rafale dépasse ainsi son aîné le Mirage 2000 avec quasiment 300 appareils commandés à l'étranger.
Les forces aériennes serbes, qui doivent remplacer d'antédiluviens Mig-29 et Soko J-22 Orao, recevront donc 12 Rafale au standard F3 à horizon 2028-29 (il faudra d'abord en effet fournir les Emirats, l'Indonésie ou encore la Marine indienne). Le standard des appareils serait le F-3 (-R ?), comme en Croatie. Si certains médias évoquent le standard F4.1, je me fie pour l'instant -faute de détails officiels dans le communiqué de l'Elysée ou de Dassault- aux confirmations de Michel Cabirol de La Tribune, qui fait office de référence.
La valeur du marché est de 2,7 milliards d'euros, ce qui est assez important pour Belgrade. Le contrat concerne aussi des radars de Thalès et des batteries de missiles Mistral de défense anti-aérienne. Aucun armement pour le Rafale ne semble en revanche avoir été négocié, même si le médias Air&Cosmos évoque une sous-traitance israélienne via Elbit Systems. Elbit ayant pénétré la BITD de tous les pays du continent européen sauf le nôtre, l'information est jugée crédible tout en restant à vérifier.
Mais les appareils n'arriveront que dans cinq ans. En fin de décennie donc. De quoi restreindre les fortes inquiétudes émises par certains observateurs (avant tout quelques diplomates, des universitaires et des think tankers) ?
Car en effet, outre le fait que la Serbie fasse un bon capacitaire indéniable (mais dans 5 ans je le rappelle), que la Russie perde, une fois encore face à la France, un client historique pour ses avions de combat, et que Paris s'engage dans un partenariat stratégique via ce qu'on appelle désormais très officiellement le "club Rafale"... ce marché est critiqué. Critiqué car la Serbie est une "amie" de la Russie sur le plan international (quoique cela est à nuancer car elle soutient matériellement l'Ukraine), et que sur le plan intérieur, la dérive autoritaire est palpable, à grand coup d'instrumentalisation explosive de la diplomatie régionale.
Si l'industriel se félicite naturellement, le politique lui, assume (voir la vidéo ci-dessous). Ce contrat, exercice de realpolitik, est censé arrimer la Serbie, non pas à l'Occident, mais à l'Europe. Evidemment, l'affaire des navires Mistral russes est dans toutes les têtes.
Mais revenons dans le concret, avec côté production, désormais 300 Rafale à assembler à Mérignac, soit dix ans d'activité. La cadence de trois appareils produits par mois, malgré les difficultés multiples (recrutement, matières premières, supply chain...), devrait être atteinte en 2025, tandis qu'un total de 20 Rafale aura été sorti en 2024.
Le Rafale représente aujourd'hui près de 65% de l'activité de Dassault Aviation par rapport à l'activité Falcon, soit un inversement total par rapport à il y a dix ans, époque où fut créé ce blog et où aucun Rafale n'avait encore été vendu à l'export.
Les honneurs funèbres militaires seront rendus au capitaine Sébastien Mabire et au lieutenant Matthis Laurens ce jeudi 22 août sur la base aérienne 118 de Mont-de-Marsan.
Comme annoncé par l'armée de l'Air de l'Espace il y a trois jours, le ministre des Armées Sébastien Lecornu confirme ce 19 août que la cérémonie d'hommage aux deux jeunes pilotes de Rafale disparus mercredi 14 août dans l'Eure lors de la collision de leur appareil biplace avec un autre Rafale (monoplace, dont le pilote s'est éjecté et est sain et sauf), se tiendra bien sur la base aérienne 118 de Mont-de-Marsan jeudi 22 août, en présence de leur famille et de leurs frères d'armes.
Le capitaine Sébastien Mabire, 36 ans, et le lieutenant Matthis Laurent, 29 ans, ont tous les deux perdu la vie à bord du même appareil, à bord duquel ils étaient équipiers.
Le premier, après avoir appartenu au régiment de chasse 2/30 "Normandie-Niémen" à Mont-de-Marsan, occupait désormais le poste d'instructeur au sein de l'escadron de transformation Rafale 3/4 "Aquitaine" basé à Saint-Dizier. Il était un pilote chevronné (2000 heures de vol et 47 missions de combat).
Le lieutenant Matthis Laurens suivait les mêmes traces (déjà 800h de vol) puisqu'affecté au "Normandie-Niémen" depuis la fin de l'année dernière. Il était toutefois encore en formation sur Rafale, poursuivant son instruction au sein de l'escadron de transformation Rafale de Saint-Dizier.
Les deux hommes étant tous les deux passés par le prestigieux "neu-neu" (surnom du Normandie-Niemen), escadron au grand prestige dans la chasse française et même mondiale, il était donc naturel que ce soit à Mont-de-Marsan que prenne place ce dernier hommage.
Une enquête est en cours. Elle devra déterminer les raisons de cet accident tragique. L'armée de l'Air n'avait pas connu de tel incident sur Rafale depuis 2007. La Marine Nationale a de son côté perdu quatre appareils, tous en mer, entre 2009 et 2012, dont deux dans des conditions a priori similaires à la semaine dernière: une collision aérienne au large de Perpignan en 2009, qui causa la mort d'un des deux pilotes.
Un mot également pour saluer la mémoire de Didier Berger, ancien pilote de Jaguar disparu tragiquement vendredi 16 août au Lavandou lors du crash de son Fouga Magister, dont il assurait la démonstration dynamique lors d'un show aérien. Il avait 65 ans.
Ce jeudi 27 juin marquait le point de départ d'un été intense pour l'armée de l'Air. C'est en effet le lancement de la mission Pégase 2024, grand exercice de projection et de coopération avec les forces aériennes de la zone indopacifique. Cette aventure, au prisme très européen cette année, ne prendra fin que le 15 août.
Images: armée de l'Air & de l'Espace, Luftwaffe, Ejército del Aire y del Espacio.
Au moment même où l'institution célèbre au château de Versailles ses 90 ans, et alors que le pays -en plein tumulte politique- s'apprête à accueillir les Jeux Olympiques de Paris, l'armée de l'Air et de l'Espace ouvre un autre "front" en entamant un déploiement exceptionnel.
Avec le départ pour le Canada, diffusé en direct jeudi 27 juin, de quatre Rafale de la 30ème escadre de Mont-de-Marsan, c'est donc parti pour la désormais traditionnelle grande aventure estivale de l'armée de l'Air, qui marquera probablement l'intégralité de cette décennie, devant d'une part montrer les capacités de projection des forces aériennes, non plus seulement françaises mais européenne -ou devrait on dire otaniennes- sur la longueur et la durée (pour la masse, c'est autre chose), mais aussi faire un acte de présence à forte valeur diplomatique sur l'immense théâtre IndoPacifique.
Plus encore, cette édition 2024 montre à quel point ce "pivot" vers l'Asie prend pour les Européens une dimension mondiale, tant accéder aux antipodes demandent une logistique et des points d'appui reposant entièrement sur la géopolitique.
Mais comment ? Comment résumer autrement qu'en cartes le déroulement de ce qui est désormais bien plus qu'un exercice (25 pages de dossier de presse !) ?
13. C'est le nombre de pays dans lesquels l'armée de l'Air et de l'Espace va faire escale en un mois et demi. Ce qui n'était en 2018 que l'ébauche d'un déploiement pensé pour justifier la stratégie française pour l'indopacifique, a fini par devenir régulier grâce aux planificateurs, et, grande réussite, par essaimer en Europe.
En effet, la mission 2024 aura une dimension européenne particulière avec un déploiement conjoint français, espagnol et allemand, les pays du Système de combat aérien du futur SCAF (l'armée insiste sur cette donnée), qui renforceront ainsi leur capacité à se déployer ensemble, et de mieux définir leurs besoin dans le cadre du SCAF. Cette première phase a été nommée « Pacific Skies ».
Pacific Skies verra les Rafale, Eurofighter, A400M Atlas et A330 Phénix passer par l'ouest afin de rejoindre l'Alaska via le Canada. Il y participeront à l'exercice premium « Arctic Defender ».
Le 6 juillet, une nouvelle vague de départ verra Français (trois Rafale des FAS) et Britanniques prendre cette fois la route de l'Orient, destination de l’Australie pour l’exercice de très haute intensité « Pitch Black », auquel participeront 18 pays.
A noter que les Rafale se présentent sous leurs meilleurs atours, puisqu'ils iront participer à ces exercice en étant dotés de leur dernier standard 4.1. L'A400M et l'A330 MRTT, qui complètent le triptyque, permettent eux de faciliter la projection de forces avec un impact logistique jugé minimal. Au total, le dispositif français comptera sept Rafale, cinq ravitailleurs A330 MRTT et quatre A400M.
Comme je le disais, le dossier de presse fait 25 pages. Impossible de décrire toutes les étapes aujourd'hui et nous ferons donc en sorte de suivre l'actualité de la mission Pégase 2024, d'autant plus que comme d'habitude, de superbes images nous seront proposées. Nous tenons donc un dossier de l'été.
D'ailleurs, dans le même temps, nous remarquerons que ce qui est pour nos voisins allemands et espagnols une nouveauté, génère énormément d'enthousiasme au sein de leur communauté aéronautique. J'en veux pour preuve l'excitation qui régnait autour des publications de la Luftwaffe et de l'Ejercito del Aire hier sur les réseaux sociaux, au moment du départ. Cela est en sens, déjà une petite victoire pour la France, qui en associant ses partenaires à ce type de mission, cherche à diffuser sa "culture stratégique" sur le continent européen.
La Croatie a officiellement reçu ses six premiers Rafale ce 23 février, apprend on via le ministère croate de la Défense.
Image: les premiers Rafale arborant la livrée croate - source Mindef Croatie.
Un bref mot tardif ce vendredi pour signaler qu'un nouveau pays est désormais possesseur officiel de l'avion de combat Dassault Rafale. Je l'annonçais d'ailleurs pour le printemps, mais c'est bien ce 23 février que les forces aériennes croates ont reçu le premier lot de six Rafale des mains de l'armée de l'Air et de l'Espace française.
Cette livraison arrive quasiment cinq mois après que les pilotes croates ont eu accès à l'appareil sur la base 118 de Mont-de-Marsan. Nous étions alors au tout début du mois d'octobre.
Un second lot similaire sera livré à l'hiver 2025, pour un total donc, de 12 appareils. Le retrait de ces Rafale des forces françaises sera compensé par l'arrivée d'avions neufs.
Cet hiver se déroule sur la base aérienne 118 de Mont-de-Marsan l'exercice SAPHIR, qui doit permettre de préparer les forces aériennes de la 30ème escadre de chasse à un déploiement d'ampleur, en préparant tous les rouages de la logistique, du hangar jusqu'au pilote, sans oublier l'industriel.
Images: armée de l'Air et de l'Espace
Pour la première fois, la base aérienne 118 de Mont-de-Marsan accueille en février 2024 la troisième édition -après 2022 & 2023- de l’exercice SAPHIR (Séquence d’Activité et de Production de Haute Intensité et de Régénération).
SAPHIR est un exercice de l’armée de l’Air et de l’Espace conduit par la Brigade aérienne de l’aviation de chasse (BAAC). Il mobilise l’ensemble des forces de soutien technique et logistique (mécaniciens, logisticiens, industriels), dont l’objectif est d’accroître la disponibilité des aéronefs, permettant d’optimiser l’entraînement des équipages de Rafale de la 30e escadre de chasse, basée à Mont-de-Marsan. Les précédents exercices SAPHIR avaient été réalisés à Nancy, puis Luxeuil.
L’exercice se déroule en trois phases, précise le ministère des Armées : la planification qui a débuté début janvier, la montée en puissance et génération de potentiel qui est actuellement en cours, puis la phase de conduite dite « Livex », qui se déroulait du lundi 12 au vendredi 16 février.
Comme vous l'aurez compris, l’ensemble de la chaîne technique y concentre ses efforts avec un but commun : "optimiser les performances de la chaîne de production, la disponibilité des avions, et augmenter le volume d’activité de la 30e escadre".
L'exercice semble s'être parfaitement déroulé si l'on en croît les quelques retours communiqués ces dernières heures. Il aura de plus permis à la 30ème escadre de réaliser 180 sorties, et de fournir de superbes images d'un déploiement simultané (avec formation de vol en chevron) de 21 Rafale ! …même si seulement 18 apparaissent sur la photo, "pour des raisons de symétrie" nous précise l'institution.
La réalisation d'un tel exercice n'est évidemment pas sans lien avec le contexte international, toute démonstration de puissance étant désormais scrutée par nos "compétiteurs". On se remémorera que la France n'était pas vraiment coutumière de ce type de show of force, avant de se replonger dans la pratique avec le remarquable et remarqué cinquantenaire des Forces Aériennes Stratégiques en 2019.
✈️ Clap de fin pour l’exercice de haute intensité #Saphir, conduit cette semaine sur la base aérienne 118 !
L'engagement des forces du soutien opérationnel et industriel a permis à l'AAE de conduire plus de 180 sorties au profit de l’entraînement de la 30e escadre de chasse. pic.twitter.com/WzSFlpoplu