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vendredi 27 juin 2025

HyPrSpace va tirer depuis la France métropolitaine, et se prépare pour la Défense


La start-up bordelaise HyPrSpace, qui développe un lanceur basé sur une motorisation hybride, a annoncé au Bourget que son tir inaugural, qui aura lieu en 2026, se fera depuis un site de la DGA Essais missiles en France métropolitaine. Ce qui laisse deux options: Biscarrosse, ou Toulon. 

Ci-dessus: vue d'artiste de Baguette-One - crédit HyPrSpace.


La belle histoire continue entre HyPrSpace et la DGA, qui travaillent ensemble depuis quelques années maintenant (la DGA EM accueillant les essais moteur de la start-up à Bordeaux). 

HyPrSpace a en effet annoncé lors du Salon du Bourget la semaine dernière, qu'avant d'envisager les lancements orbitaux depuis la Guyane Française, la première étape passerait par la France  métropolitaine grâce à un accord passé avec la DGA EM. Le vol inaugural du démonstrateur Baguette-One, suborbital, se fera donc soit depuis Biscarrosse dans les Landes, soit depuis Toulon. Cet essai est toujours prévu pour 2026. 

Dans le même temps, HyPrSpace, qui se définit désormais comme une entreprise à vocation duale, une entreprise du New Defense (nous reviendrons sur cette thématique en juillet) commence à imaginer des applications militaires pour sa future gamme de lanceurs, à commencer par le lanceur suborbital Baguette-One, dont la flexibilité offerte par l'hybridité de sa motorisation offre des perspectives intéressantes en terme d'emploi (réactivité), de coûts (production, carburants), et même de mobilité (stockage, préparation).

Au Bourget, la start-up -de 90 salariés aujourd'hui tout de même- affichait même des vues d'artistes et des maquettes, illustrant par exemple un lancement de charges militaires (en image ci-dessous avec un planeur hypersonique) depuis la remorque d'un TEL, un tracteur-érecteur-lanceur. Une solution a qui attiré tout l'intérêt du ministre des Armées en personne. 


Des lancements réactifs pour la défense un jour chez HyPrSpace ?
Photo Thomas Schumacher au Bourget 2025.  

Sebastien Lecornu devant le stand HyPrSpace au Bourget 2025 - crédit HyPrSpace

lundi 23 juin 2025

Salon du Bourget 2025, l'édition du signalement stratégique ?


L'édition 2025 du Salon international de l'aéronautique et de l'espace, mieux connu sous le nom de Salon du Bourget (le 55ème), aura été marquée par une curieuse sensation. Celle d'être devenu un salon de défense.

Images - Thomas Schumacher / @paxaquitania, MINARM, industriels.   


Le pesant parfum de la poudre flottait -ou plutôt soufflait vu la puissance nécessaire pour climatiser cette chaude semaine- dans les larges allées du Salon du Bourget 2025. Etonnant ? Oui en fait, car même en 2023, lors de l'édition qui suivait le déclenchement de l'invasion de l'Ukraine un an plus tôt, et bien que les sujets défense soient dans toutes les discussions à l'époque déjà, nous n'avions d'une part, pas le même niveau de maturation des systèmes, et d'autre part, pas ce constat d'isolement stratégique de l'Europe résultant de l'élection de Donald Trump. 

Certains parmi les 300 000 visiteurs (record absolu) l'auront d'ailleurs amèrement regretté ce climat, y compris chez les professionnels, et en particulier dans le Paris Space Hub, espace géant exclusivement dédié au spatial, mais c'est tout simplement le signe des temps (ajoutons l'ambiance délétère qui régnait autour de la présence d'armes "offensives" [sic] sur les stands israéliens).  

Cette année, les projets (je n'ai pas dit programmes, mais on sent tout de même de la maturité) se présentent également de façon différente, avec une propension à l'auto-financement qui, de façon limitée attention (d'autant plus que ce n'est pas possible pour tout le monde), semble inaugurer un retour à la prise d'initiatives, et donc de risques. Ou au coup politique, on peut le voir comme ça. 

Problème, même en ces temps de crises et de promesses de budget géant pour la défense, l'Etat reste avare… et se contente souvent d'observer avec une prétendue bienveillance. Il faudra bien enclencher un jour attention, sous peine de casser la machine à innover, et de voir certaines idées partir à l'étranger. Cela serait bien dommage à l'heure où le catalogue à notre disposition se remplit considérablement, et de façon parfois étonnante. Il y avait en effet sur cette édition du Bourget des propositions dont les forces françaises n'auraient pas imaginé rêver il y a quelques années à peine.  


Un tour en quelques grands points 👇

  • Dassault Aviation maître en sa demeure (sauf pour le futur AWACS)
Pour ce Bourget 2025, l'avionneur de Saint-Cloud, qui à en constater la longue file d'attente pour monter à bord des Rafale ou Falcon, reste sans conteste la star du salon, et a choisi ses priorités. Ces dernières sont énumérés dans les sorties presse du PDG Eric Trappier, et se ressentent sur les exhibitions. Pour le court terme donc, c'est le Rafale F5 (2030+). Pour le moyen terme, le drone UCAS (héritier du Neuron en 2035), et pour le long terme un appareil de combat de sixième génération un avion spatial : VORTEX !

Dassault Aviation est enfin sorti du bois sur ce sujet. L'avion spatial habité, ici en héritage direct de feu la navette européenne Hermes, c'est le grand -et prestigieux- rêve du groupe à horizon 2050, mais l'Etat (CNES, DGA, armée de l'Air), qui manque de moyens, ne semble pas totalement convaincu par cet appareil à tout faire qu'il juge très complexe, bien qu'injectant symboliquement 30 millions d'euros dans les études de développement. Dassault devrait donc aussi aller chercher du soutien du côté de l'Agence spatiale européenne, et tenter de fonctionner par étapes (la fameuse méthode itérative du new space ?!?), avec à court terme plusieurs démonstrateurs de taille réduite, puis un drone. Nous aurons l'occasion d'en reparler, car quoiqu'on en pense, le dossier est relancé !

L'Etat apporte un soutien au projet Vortex de Dassault Aviation - Photo MINARM


Concernant le Rafale, nous avons déjà un peu tout dit sur le standard F5, mais le motoriste Safran confirme s'engager dans la remotorisation de l'avion avec le M88 T-REX (9 tonnes de poussée), et Thales prépare un pod de guerre électronique. Les réservoir conformes de 1 200 litres qui donnent un look différent au Rafale étaient visibles, non pas chez Dassault Aviation, mais sur le stand du ministère des Armées, ce qui est une nuance importante. Il n'est pas dit, que pour des questions de maintenance, cette idée n'aille beaucoup plus loin que le bricolage pour la photo. 

Le Rafale avec réservoirs conformes sur le stand MINARM, et la bombe AASM XLR - Photo TS.


Mais le standard F5, c'est aussi un drone de combat partenaire de mission, l'UCAS, qui selon la maquette 1:1 dévoilée est une évolution parfaite du démonstrateur Neuron. Un Neuron "durci", "lourd", si l'on veut. Ce drone furtif fera approximativement la taille d'un Mirage 2000, et sera doté d'un seul moteur, le M88 du Rafale, ainsi que du train d'atterrissage de ce dernier. Il pourra être navalisé, mais seulement à bord du porte-avions de nouvelle génération, qui disposera de catapultes électromagnétiques.

Pour la France qui manque clairement de capacités furtives, ce programme apparaît comme structurant pour nos forces aériennes et leur capacité d'entrée en premier, notamment après les démonstrations réalisées en Iran par Israël, puis par les USA.

UCAS : unmanned combat air system - photo TS 


Un mot également sur le futur des AWACS de l'armée de l'Air et de l'Espace. Comme pressenti, cela se fera bien avec le système Global Eye de Saab (sur avion porteur Bombardier), la déclaration d'intention est signée depuis le 18 juin pour quatre appareils, dont deux fermes. Probablement davantage au cours de la LPM suivante
Je plaidais ici même il y a deux ans pour une intégration de la solution Saab sur le Falcon 10X, et il semble bien que Dassault ait eu son mot à dire avant le choix définitif de la DGA. Cette dernière n'a toutefois pas été convaincue par la proposition, car les E3 Sentry de l'armée de l'Air épuisent leur potentiel à vu d'œil. Bref, il ne fallait pas tergiverser, et l'industrie française a tergiversé. Il en ressort un beau geste de la France envers l'Europe, et pour la Suède, qui fournit en capacité d'alerte avancée une puissance nucléaire, c'est un coup absolument magnifique. 


Communication politique, en France puis la réponse suédoise. 


  • L'espace en force, et la force dans l'espace
Au delà du Vortex de Dassault, l'espace était assurément l'un des grands points du Bourget 2025, avec pour la première fois, l'imposant Space Hub, mais pas seulement puisque l'armée de l'Air et de l'Espace avait aussi son showroom dédié. Le Space Hub réunissait bien sûr le CNES et l'ESA (pour son cinquantième anniversaire), ains que les start-up qui y bénéficiaient d'une visibilité accrue. Un lieu où tout ce que le spatial européen a de personnalités est venu faire un coucou. Sauf l'astronaute française Sophie Adenot, en formation à Houston, qui assisté en visio à la révélation du nom et du logo de sa mission de 2026 ("Epsilon"), lors de la venue d'Emmanuel Macron le vendredi 20 juin, visite durant laquelle le Président de la République a tenu, au sein du Space Hub, son seul discours officiel du salon, entièrement consacré au spatial donc, et à la teneur très stratégique. S'il faudra finalement attendre octobre pour avoir la nouvelle stratégie spatiale nationale (résolument orientée vers une convergence avec les alliés que sont l'Allemagne, l'Italie, l'Inde, les Emirats, et le Royaume-Uni), le sujet central sera resté celui du spatial comme "jauge de puissance". Une formule présidentielle qui restera.   



Au Paris Space Hub, derrière les Agences, on pouvait trouver le stand très central d'ArianeGroup, où en plus du produit emblématique Ariane 6, l'industriel ne se gênait pas pour promouvoir sa filiale MaïaSpace bien sûr, mais aussi de façon beaucoup plus surprenante, son futur missile balistique conventionnel MBT, sa fusée sonde Sylex capable d'emporter le planeur hypersonique V-MAX, ainsi que… le missile stratégique M-51. On ne se cache plus donc. 

Mais les start-up de micro-lanceurs (qui comptent bientôt quasiment 100 employés chacune) n'étaient pas en reste, la bordelaise Hyprspace présentant même une maquette de son lanceur suborbital OB-1 adaptée à la flexibilité des missions de défense. Mais nous en reparlerons.  

A deux pas, Eutelsat pouvait se targuer d'avoir été complètement rattrapé dans sa chute financière par l'Etat français, qui monte à 30% au capital afin de sanctuariser la constellation de connectivité One Web, que Paris considère comme la seule alternative souveraine au Starlink d'Elon Musk. Eutelsat se voit d'ailleurs offrir 10 ans de contrat militaire avec les forces françaises.  

A noter également que le Commandement de l'Espace lançait au Bourget le 19 juin le "cercle de confiance Espace", cadre de discussion privilégié avec les entreprises du secteur, avec l'idée que l'offre et la demande se rencontrent plus directement, pour ne plus perdre de temps. 

Emmanuel Macron a enfin annoncé que la France organiserait début 2026 son premier "Space Summit", afin de mobiliser, dans son sens on le devine, les partenaires internationaux. 
  
  • Le salon de l'aéronautique aérobalistique
Présenter une munition a pour avantage que l'on peut se déplacer indifféremment tous les ans à un grand salon français: le Bourget ou Eurosatory (le salon de l'armement terrestre). Et les munitions ne manquaient pas cette année, à commencer par la Hammer 250 XLR de Safran (photo plus haut), une AASM turbopropulsée par microréacteur Roxel, ce qui permettra à la célèbre bombe de précision française de porter jusqu'à 150 km en 2028 quand elle sera tirée depuis un Rafale, contre 50 à 70 aujourd'hui avec son booster à poudre. 

Très médiatisée, mais difficilement accessible sur stand, la fameuse munition de saturation One Way Effector (OWE) de MBDA, était présentée comme le Shahed français, ce drone iranien désormais utilisé par les Russes et qui terrorise la population ukrainienne.
OWE, développée avec un droniste, devra être produite en masse (1 000 exemplaires par mois, grâce à l'industrie automobile ?), n'être pas trop chère, et agir en essaim pour découvrir, saturer, et si possible traiter les capacités de défense aérienne adverses jusqu'à 500 km de distance grâce à une charge explosive de 40 kg. Tout cela sans être brouillée grâce au savoir faire de MBDA dans la navigation et le ciblage dynamique.  

Sur le même segment ou presque des munitions téléopérées, Eos Technologie (qu'on a autrefois connu chez nous à Mérignac) montrait sa gamme à microréacteur Veloce, qui est désormais intégrée au catalogue de KNDS. La Veloce 330 va entrer en phase de test au sein des forces françaises, tandis qu'Eos travaille sur "Rodeur" pour plus de portée (500 km) et d'autonomie (8h). 



MBDA dévoilait aussi une maquette de lanceur à 4 silos pour la version terrestre de son missile de croisière naval, le MDCN devenu MDCT. On parle ici de longue portée pour ce missile de 2 tonnes capable de parcourir 1 000 km en subsonique. Campagne de tir prévue à Biscarrosse chez DGA EM d'ici 2 ans et demi. 



Et puisque l'on parle de lanceur, Turgis & Gaillard , qui avait fait sensation avec le drone Aarok en 2023, est de retour pour combler les trous de la raquette française avec un véhicule lanceur de roquettes, dont le démonstrateur a une fois de plus été financé sur fonds propres, sur la base d'un châssis 6x6 Renault Trucks. Le système se veut rustique, aérotransportable, et surtout agnostique de missiles. Un rapport parlementaire récent préconise l'achat de 48 lanceurs

Le lanceur Foudre de Turgis & Gaillard - Photo TS. 


Je le mentionnais avec ArianeGroup, c'est le retour potentiel des capacités balistiques conventionnelles. Ariane se différencie là de l'offre MBDA, que l'on parle de missiles de croisière ou drones comme le OWE. Chez Ariane, on mise en effet avec MBT (missile balistique tactique) sur l'extra atmosphérique comme facteur différentiant, afin de ne pas être interceptée. Cela vient donc compléter l'offre des munitions endoatmosphériques de très longue portée… où Ariane développe son démonstrateur stratosphérique V-MAX, qui lui aussi est théoriquement impossible à abattre en raison de sa vitesse et de sa manœuvrabilité. Complémentaire, ou alternatif ? Cela dépendra du portefeuille, forcément conséquent, que l'Etat décidera d'allouer à ces capacités de frappe dans la profondeur. 


Pour conclure, l'on notera quelques éléments, en retrait, voire carrément absents : 
  • le SCAF bien sûr, avec une maquette de NGF -déjà vieille de 6 ans- placée en retrait, chose remarquée avec un certain étonnement par les Européens présents (je vous le traduis : cela veut dire "pas en bien"). Dassault Aviation et son PDG Eric Trappier veulent imposer une pression monstre à Airbus Defence & Space au moment de négocier la phase de développement d'un démonstrateur de futur avion de combat dont la date du premier vol semble une nouvelle fois avoir glissé (2030 aujourd'hui). Un pari osé, très critiqué par les observateurs, mais qui je l'imagine, pourrait s'avérer payant si Airbus se retrouve poussé dans les cordes. D'autant plus qu'en Allemagne, le géant Rheinmettal multiplie les coups de couteau dans le dos, enchainant les accords de production sous licence avec les Américains de Lockheed Martin (fuselage F-35 entre autres) et Anduril (drone de combat Fury). Airbus serait désormais en quête d'alliances. 

Combat collaboratif. Et le NGF, en retrait… symboliquement - Photo Thomas Schumacher  

  • Les commandes !?! Où sont les commandes ??? Chez Embraer ! Plus sérieusement, on pouvait espérer a minima 20 Rafale Air et 10 Marine pour les forces françaises, comme cela avait été suggéré dans la presse ce printemps. Et l'accord avec la Suède et Saab pour le Global Eye n'est pas encore au stade de la commande ferme (cela viendra dans les prochains mois). Sur les drones et munitions terrestres, il s'agira aussi de vraiment accélérer, afin que l'armée de Terre s'exerce. 
  • Concernant les retards, comme je le disais plus haut, la publication de la stratégie spatiale nationale est décalée, ce sera pour octobre à Toulouse lors de l'inauguration des nouvelles installations du Commandement de l'Espace. Et si la stratégie pour la THA (très haute altitude) a bien été présentée par le ministre Sébastien Lecornu, le fameux tir sur ballon atmosphérique qui devait se dérouler en ce mois de juin n'avait toujours pas été réalisé au moment du salon. [MISE A JOUR : succès de plusieurs tirs sur ballons en THA annoncé ce lundi 23 juin !]
  • Eté toujours, où l'on attend le premier vol du drone Aarok de Turgis & Gaillard. Cela s'est joué à peu pour une annonce au Bourget, mais la météo en a décidé autrement à la date prévue début juin. Une question de semaines désormais, le temps de tout remettre en place. Là encore, j'attends plus d'engagement de la part de l'Etat, T&G ne pourra pas tout faire sur fonds propres. Mais le Aarok continue bien de surfer sur la hype générée en 2023, pendant que l'Eurodrone (Airbus) et le Patroller (Safran) se montraient bien timides une fois de plus. A juste titre…   
  • Les "territoires" : difficile en effet d'exister pour la province quand les questions qui dominent concernent la géopolitique, et donc Paris, ses centres de décisions et ses sièges sociaux. On notera d'ailleurs que les start-up ou PME qui font le plus parler sont celles qui ont été prises sous l'aile du ministère des Armées ou d'un grand groupe. Difficile également sans argent public disponible au niveau régional. Difficile enfin quand on a subi la désindustrialisation, et que ce sont des capacités de production dont on a désormais besoin (par exemple : on ne parle pas cette année de faire financer et construire des usines, mais plutôt d'utiliser celles des géants de l'automobile). A oui au fait… l'Aquitaine et Bordeaux-Mérignac ont perdu Hynaero et son projet de bombardier d'eau Fregate F-100, qui filent à Istres. Mais comme dirait l'autre: "Ce n'est pas grave on va faire des dirigeables !". Heureusement il y a Eurenco, qui signe des accords structurants avec Saab en Suède, et FN Herstal en Belgique.  
  • L'envie d'ajouter tout le secteur civil, où le choses vont bien, très bien même, mais clairement pas sous le feu des projecteurs médiatiquement parlant, surtout quand on connait la chute vertigineuse d'attention (ou pire, d'intérêt ?) que connaissent les problématiques de RSE, en premier lieu la décarbonation. Mais dans ce dernier domaine, les choses vont tout de même bon train, en particulier chez Safran. Quant aux taxis volants, il y en a peut-être deux fois moins qu'en 2023. 
  • Les absents: les Falcon de mission dont on parle vraiment trop peu (ce qui a laissé la place au Global Eye, sur Bombardier G6000). Pas de Mirage non plus, mais les verra-t-on encore ? Tout comme les appareils d'ancienne génération comme l'ATL-2 ? Plus étonnant, l'A330 MRTT n'était pas là non plus. Quand à l'actualité hélicoptère, elle était surtout contemplative avec les vols quotidiens du magnifique démonstrateur Racer d'Airbus, que l'on voit tout de même mal trouver un marché…

Le -magnifique- Racer d'Airbus Helicopters - Photo TS

mercredi 23 avril 2025

Aerix Systems dévoile son nouveau drone d'intervention AXS-µ1


La start-up AERIX SYSTEMS dévoile officiellement le 22 avril son drone AXS-µ1, un produit dont les caractéristiques ne laissent aucun doute quant à sa finalité: les interventions tactiques militaires. 

Source & images : Aerix Systems.


Nous en parlions il y a tout juste un an, Aerix Systems développe au sein de l'incubateur de Bordeaux Technowest, à Mérignac, une technologie de propulsion omnidirectionnelle pour les drones. Ces derniers deviennent ainsi plus agiles que jamais, et surtout plus robustes dans certaines conditions climatiques (en particulier face au vent). La jeune entreprise, qui continue de viser certains marchés comme l'inspection des hautes structures exposées (éoliennes, lignes haute-tension...), vise également le secteur très porteur de la défense et de la sécurité, dans lequel les drones connaissent une véritable révolution des usages dans le domaine tactique. Y compris lorsqu'il s'agit de chasser le drone adverse...  


Aerix Systems dévoile donc son nouveau produit (il existe déjà une première plateforme, l'AXS-M1) : l’AXS-µ1, une plateforme d'intervention compacte développée, assemblée et testée en France. Conçue pour s’adapter aux contraintes opérationnelles, l’AXS-µ1 combine propulsions omnidirectionnelles, architecture modulaire et interopérabilité multi-supports. Le résultat est selon la start-up une agilité tactique optimale, même en environnements complexes, pour des déploiements rapides sur tous types de théâtres d’opérations.



Les caractéristiques principales du drone, selon le communiqué, sont les suivantes :

• Vitesse : jusqu’à 200 km/h.

• Endurance : jusqu’à 20 km.

• Résistance au vent : jusqu’à 100 km/h.

• Dimensions : 40 cm x 40 cm.

• Charge utile : jusqu’à 1,5 kg (reco.750g).

• Autonomie (chargée) : 15 min.

L'appareil, seul ou en essaim, peut être contrôlé via tablette ou directement avec la vision intégrée dans un casque FPV (first personn view).  



Surtout, Aerix annonce être opérationnelle, avec des premières unités qui sont prêtes à être livrées. Elle lance donc un appel aux "intégrateurs, opérateurs, ou acteurs de la défense et de la sécurité, en France ou à l’international", se déclarant disposée à procéder à des démonstrations, PoC (preuve de concept) ou précommandes.



lundi 7 avril 2025

SOFINS 2025 - Milton dévoile son drone tactique Sky Watcher


Le droniste bordelais MILTON, racheté et intégré au groupe Etienne Lacroix depuis l'automne 2023, présentait au salon SOFINS la dernier né de sa gamme de drones tactiques, le Sky Watcher. Voulu aussi polyvalent que modulaire, le système prouve que la filière française est enfin en mesure de répondre aux besoins d'un marché bouleversé depuis la guerre en Ukraine.


Projet dévoilé, mais pas vraiment montré (phase de prototypage) à Eurosatory en juin 2024, le mini-drone Sky Watcher de Milton a été présenté au salon des forces spéciales SOFINS 2025, début avril. Il s'agit du troisième drone tactique pour la PME bordelaise d'une trentaine de salariés -dont 15 ingénieurs- qui a été rachetée en 2023 par le groupe de défense Etienne Lacroix.


Bien que considéré comme un drone tactique, le quadrirotor Sky Watcher se veut avant tout compact (ses rotors sont pliables, ses patins démontables), et capable d'être opéré par un seul homme muni d'un sac à dos, en quelques minutes. 

Pour développer son nouveau produit, Milton a bien évidemment pris en compte le retour d'expérience du conflit ukrainien, avec un appareil qui se veut à la fois robuste (électroniquement parlant) et ultra fiable, tout en étant extrêmement modulaire et facile à produire. Son autonomie est d'une heure jusqu'à 10 kilomètres, avec une capacité d'emport de "plusieurs kilos" (autour de 3 a priori, en plus de la boule optronique). 

Niveau emport justement, c'est sa modularité qui doit faire sa force en termes de charges utiles tactiques : boule optronique (le catalogue est varié), charge ROEM (renseignement d'origine électromagnétique), et le fameux DLC, un dispositif de libération de cartouches capable de délivrer différents types de grenades de 40 ou 56mm, fumigènes, incapacitantes, ou même pyrotechniques.

A noter que Milton travaille d'arrache bien sur la robustesse de ses liaisons de données. Il n'est à ce stade pas envisagé de doter le drone d'un système filaire à fibre optique comme on peut le voir sur le front ukrainien, un des seuls moyens infaillibles face au brouillage.  

Des efforts de R&D, au niveau de la miniaturisation notamment, ont spécifiquement été fournis par l'entreprise afin d'intégrer des capteurs & antennes GNSS. Les équipes ont également développé un nouveau système de “batterie intelligente” avec un partenaire français (tout le système est naturellement ITAR FREE).

Comme tous les drones de Milton (LRO, SkyKeeper) le Sky Watcher sera opéré à partir de l’une des trois stations sol de la gamme GCS Milton. Les logiciels (opérations, simulation, formation) sont aussi développés par l'entreprise. Ils intègrent d'ores et déjà les cas de figure de pilotage en essaims.

Le Sky Watcher sera commercialisable dès la fin de cette année 2025. 


Une filière drones française enfin structurée ? 

Dans les allées du SOFINS, il y avait un certain nombre de drones, mais pas autant qu'on pourrait le penser, d'autant plus que finalement, ils sont peu parmi les Français à avoir atteint la maturité nécessaire en termes de R&D comme d'offre commerciale sur ce segment. Surprenant, quand on sait que la filière drones a eu plus d'une décennie pour se développer après les terrifiants constats d'échec du début des années 2010. Au tournant de 2020, elle [la filière] semblait pourtant encore se chercher, et c'est le grand bouleversement apporté par l'invasion de l'Ukraine en 2022 qui a changé la donne. 

Désormais, les objectifs, ou plutôt devrais je dire les exigences, ont changé, alors que l'Etat entend expérimenter à tout va. Les produits (et cela concerne en particulier les drones, soudainement devenus la nouvelle AK-47 du combat futur) doivent non seulement répondre à des besoins, des missions prioritaires sur le terrain des opérations, mais aussi offrir des capacités de modularités, d'évolution rapides (une technologie peut aujourd'hui être obsolète en un mois sur le front ukrainien), et bien entendu de production de masse sans précédent. S'agissant de cette dernière question, le prix devient de facto un argument clé à l'heure du low cost et du "consommable". Chez Milton, on assure ne pas être très éloigné des prix pratiqués par les Chinois. 

Et tandis que les grands de l'aéronautique, comme Thales, Safran ou Airbus ont dû s'adapter, voire se réinventer (certains d'entre eux n'ont d'ailleurs pas du tout terminé ce cheminement), des acteurs comme Milton avec Eugène Lacroix, ou tout dernièrement Hexadrone avec Rivolier, ont eu la chance d'intégrer de solides projets au sein d'ETI qui cherchaient à mettre un pied dans ce domaine forcément porteur, car stratégique, ce qui leur apporte enfin la colonne vertébrale nécessaire à un développement plus serein, centré sur l'innovation permanente.   

On pensera également à d'autres entreprises, comme EOS ou Delair, qui ont su convaincre et embarquer dans des programmes structurants de l'Agence de l'Innovation de Défense, sous la tutelle de grands comme MBDA et KNDS. La preuve avec ce dernier point que ce segment du ciel est désormais mieux appréhendé par les spécialistes du combat (aéro)terrestre que par ceux de l'aéronautique ? Nous aurons l'occasion de nous reposer la question au prochain salon du Bourget. 

Pour ce qui nous concerne sur le blog, les drones continueront de rester un sujet tout au long de cette année, puisque se déroule à la rentrée prochaine à Bordeaux une nouvelle édition du salon UAV Show, où le militaire prendra une place certaine, et même inédite pour cet événement. Nous y retrouverons quelques locaux, dont la prometteuse start-up Aeryx Systems


Ci dessous en image sur le salon, le Sky Watcher de Milton, ici replié et équipé  : 



Autre exemple de système prometteur, chez Hexadrone (source Mars Attaque blog): 



Mais aussi, la munition rodeuse Toutatis de Thales, qui se tire depuis un mortier :


mercredi 19 mars 2025

Icarus Swarm a testé des essaims de drones avec l'armée de Terre

La société bordelaise Icarus Swarm a testé aux côtés de l'armée de Terre la mise en oeuvre d'essaims de drones depuis des véhicules blindés. 

Images : armée de Terre / Icarus Swarm.


Icarus Swarm est une PME bordelaise à la notoriété plutôt confidentielle, mais vous les connaissez peut-être sous le nom de leur société sœur -ou plutôt mère- Dronisos, spécialiste des spectacles géants impliquant des milliers de drones. Depuis la déclenchement de la guerre en Ukraine en effet, et l'impact que constitue la révolution des drones sur le champ de bataille, Dronisos a fondé Icarus pour mettre à profit son expérience des essaims de drones dans une collaboration avec le monde de la défense.

Présente en Californie pour l'exercice multinational "Capstone 5" (Etats-Unis, Royaume-Uni, Australie, Canada, Nouvelle-Zélande), consacré à la robotique et à ses ruptures, Icarus Swarm et la 13e DBLE (demi-brigade de blindés légers) ont mené des essais grandeur nature en installant des "ruches" directement sur le toit d'un blindé Griffon de l'armée de Terre. Le test incluait aussi un 4x4 Masstech. 


Même si l'exercice impliquait une zone plutôt réduite (quoique, les opérations drones vs drones en Ukraine se limitent à une bande de quelques kilomètres d'épaisseur), on comprend ici tout l'intérêt de s'exercer au déploiement et à l'action rapide (environ 20 minutes tout compris) pour une équipe d'opérateurs à bord de deux véhicules seulement. 

La campagne touchait au domaine du C2, le Command & Control. Dans cas d'espèce en effet, pas de drone suicide, ou du moins pas encore, mais un essaim qui durant le survol d'une zone, permet sa modélisation en trois dimensions, au service des planificateurs. 

Plus généralement, la maîtrise de cette capacité à déployer des essaims, qui va bien au delà de l'utilisation faite aujourd'hui (1 opérateur pour 1 drone), est évidemment urgente.  



lundi 3 mars 2025

HyprSpace tirera ses lanceurs depuis la plateforme NuPad de SpaceDreamS


HyprSpace (lanceurs) et SpaceDreamS (infrastructures sol) poursuivent leur partenariat et annoncent que le lanceur OB-1 sera tiré depuis la plate-forme mobile NuPad. 


Il était normalement prévu ce soir de parler du lancement d'Ariane 6 et du satellite militaire CSO-3, mais celui-ci est une nouvelle fois reporté. Cela commence à faire… depuis 2021 (le média La Tribune évalue à 30 millions d'euros  le surcoût du aux retards pour le ministère des Armées).

Ce sera donc du new space avec HyPrSpace ! Les bordelais, pionniers dans la conception de micro-lanceurs à propulsion hybride, se sont associés depuis octobre 2023 à SpaceDreamS (Paris & Toulouse), spécialiste des infrastructures sol,  pour la qualification des moteurs de leurs futurs lanceurs. Jusqu'à ce 24 février 2025, où les deux entreprises annoncent une nouvelle étape dans leur collaboration. Cette alliance, déjà couronnée par les succès des essais moteur Terminator, les avancées du projet PADA11 et la signature du contrat R2D22, entre dans sa seconde phase et accélère avec le développement du « NuPad » : premier pas de tir modulaire et multisite de lancement.

Les deux entreprises, qui vont jusqu'à parler de « symbiose industrielle », veulent afficher une vision commune ouvrant la voie vers un accès à l’espace véritablement rentable, pérenne et interopérable. Et c'est dans ce contexte que l'on découvre le NuPad, un pas de tir mobile à déploiement rapide,  transportable via conteneurs maritimes. Doté d'interfaces universelles pour intégrer des lanceurs de dimensions variables (pour de l'orbital ou du suborbital), il est annoncé comme compatible avec tous types de propulsion et mises en œuvre standardisées.

Il sera ainsi en capacité de tirer, depuis la Guyane Française, les lanceurs d'HyprSpace, à savoir Baguette One le lanceur suborbital monoétage de 10 mètres dont le premier vol inaugural est prévu pour 2026, et OB-1 (Orbital Baguette One), le lanceur orbital qui volera lui fin 2027. 


vendredi 28 février 2025

Vers un rachat américain du corrézien LMB Aerospace


Le sous-traitant corrézien LMB Aerospace, qui fabrique principalement des ventilateurs électriques pour l’aéronautique, la défense, ou encore le ferroviaire, devrait être racheté par le groupe américain Loar. Une nouvelle qui interroge dans le contexte géopolitique actuel, mais qui rappelle encore une fois les limites de développement dont pâtissent les petites entreprises en France.

Installée en Corrèze depuis 1956, LMB Aerospace est une PME d'environ 75 collaborateurs réalisant 40 millions d'euros de chiffres d'affaires. Elle fabrique moteurs et systèmes de refroidissement (ventilateurs) pour des industries stratégiques. C'est ainsi que l'on retrouve ses équipements sur des avions de combat partout dans le monde, des hélicoptères, trains à grande vitesse, chars… et même le porte-avions Charles de Gaulle.

Or, LMB réalise aujourd'hui le tiers de son CA en Amérique du Nord, où ses perspectives de croissance sont les plus prometteuses. 

C'est donc dans ce contexte que le groupe new yorkais Loar Group (fabricant de composants sur le même segment, mais 10x plus important que LMB) est entré en négociations avec les différents groupes actionnaires de LMB (principalement Tikehau Capital) pour un rachat de cette dernière. Le montant de la vente serait de 365 millions d’euros, soit une rentabilité de 100% pour Tikehau Capital qui avait acquis LMB en 2022. 

Alors est ce une nouvelle affaire Photonis (qui a changé de nom en 2023 pour devenir Exosens), ce spécialiste français de l'optique militaire qui était il y a quelques années au cœur d'un imbroglio politique suite à sa tentative de rachat par un groupe américain ?

Dans un contexte transatlantique tendu comme jamais, l'affaire ne devrait cependant pas prendre trop d'ampleur, malgré quelques signes d'irritation aperçus dans la presse depuis une semaine. Etant donné son implication dans la défense nationale, comme "actif stratégique", la vente devra dans tous les cas être approuvée à la fois par le ministère des Armées et par Bercy. Afin d'être complet, il faut aussi rappeler que LMB a déjà appartenu à un groupe américain, de 2000 à 2012.

Enfin, cette nouvelle vente est aussi et surtout le symptôme des manques criants de mobilisation financière "made in France" pour soutenir l'industrie, en particulier les PME et ETI sous-traitantes aux finances fragiles et clientèles en nette position de domination (l'exemple le plus connu étant celui d'Airbus face à ses sous-traitants), laissant ces entreprises à la merci de la première belle opportunité venue du monde anglo-saxon ou d'Asie. 

Mais avec le bouleversement stratégique en cours, et le sommet à venir sur le financement de la défense, annoncé pour le 20 mars au ministère de l'Economie, nous sommes enfin en droit d'espérer une libération -de leurs chaînes- des capitaux nationaux, au profit des activités stratégiques.  

Liste des matériels comportant des équipement LMB, et exemple avec le NH90 : 



mercredi 20 novembre 2024

Dark va mener une étude de simulation d'interception en orbite pour les Armées

L'Agence de l'innovation de défense et la start-up Dark ont annoncé lundi 18 novembre avoir passé un contrat d'étude préliminaire pour la simulation d'interception d'objets spatiaux dangereux en orbite basse. Les deux acteurs se positionnent ainsi sur une question absolument préoccupante. 

Ci-dessus : vue d'artiste du concept de lanceur aérolarguée de Dark - source Dark.


Alors même, ce 18 novembre, que le commandant de l'espace, le général Philippe Adam, nous apprenait dans une longue et riche interview à La Tribune que parmi les acteurs provocateurs en orbite, il fallait désormais compter sur l'Iran, l'Agence de l'innovation de défense (AID) annonçait l'étude "Salazar". 

Salazar est une étude qui consiste à simuler via un ensemble de modèles numériques développés par la start-up Dark -à qui l'étude est donc notifiée- des missions de capture d’objets spatiaux dangereux en orbite basse (LEO).
L'AID précise qu'elle évaluera le potentiel des moyens développées par Dark pour répondre aux exigences des opérations en orbite basse (LEO) à l'horizon post-2030. Cette étude permettra aussi de tester la faisabilité du transfert et de la manœuvre de charges utiles en orbite, contribuant ainsi aux missions de caractérisation des situations critiques ainsi qu'aux opérations de surveillance et de réponse face à d'éventuelles tentatives d'ingérence spatiale. Dans le cadre de cette étude préliminaire, l’Agence de l’innovation de défense proposera à DARK une cible fictive dotée de systèmes d’évasion ou d’alerte qui, en retour, présentera plusieurs scénarios possibles.

Ce faisant, les armées françaises se positionnent publiquement sur une problématique que toutes les puissances spatiales jugent extrêmement préoccupante. Avant donc d'être active, la solution technologique n'étant clairement pas encore mature, la France se veut d'ores et déjà dissuasive. Et ce n'est pas un hasard si l'AID fait appel à Dark... 

Sur le blog: Dark achève la campagne de tirs de son moteur-fusée "Sheitan"



En effet, on connait Dark depuis sa fondation en 2021 à Paris, puis l'annonce en 2023 de son installation sur l'aéroport de Bordeaux, prévue pour 2025 (à confirmer). Aux dernières nouvelles, l'entreprise qui s'est dès le départ positionnée avec une solution réactive de micro lanceur aérolargué -via un Airbus commercial- pour des missions de désorbitation ou "nettoyage" de l'orbite basse*, a mené avec succès des essais moteur en Allemagne durant l'été 2024. 

Rappelons également qu'il s'agit d'une solution complète, qui ne se limite pas au lanceur, puisque Dark travaille tous les aspects de la missions, avec le développement de logiciels ou encore d'un bras robotisé. 

Dans le cas de l'étude Salazar, l'AID semble avoir été séduite par la solution de simulation développée par Dark, qui, basée sur les paramètres orbitaux d’une cible, propose "le meilleur scénario d’interception, en prenant en compte la stratégie, les performances et la temporalité de la mission". Dark profite également de son expérience de simulation d'interception d'urgence d'un débris spatial (un étage d'Ariane 5), menée auprès du CNES en 2023. 

On retiendra enfin notre attention sur un des modèles de simulation présenté par Dark le mois dernier, baptisé RAVEN et réalisé avec… des drones ! (source photo LinkedIn de Dark)



* dans ce domaine, deux types de mission évidents se dégagent : l'espace durable (ou dit autrement, "dépolluer" l'orbite), et bien sûr, la défense. 

lundi 4 novembre 2024

AndroMach et son projet d'avion spatial s'installeront à Bordeaux en 2025


La start-up AndroMach s’installera à Mérignac au printemps 2025. Dans ses cartons, un projet d'avion spatial inédit en France. Une capacité réutilisable d'emport, et de retour, qui pourrait intéresser le monde de la recherche en microgravité, ainsi que la défense. 

Ci-dessus: vue d'artiste du drone spatial suborbital d'AndroMach. 


C'était un secret de polichinelle, puisque la start-up AndroMach disposait d'un stand bien visible -avec maquette !- sur les événements bordelais de la rentrée aérospatiale, mais c'est dans un article de La Tribune Bordeaux en date du 30 octobre que l'information a finalement été rendue publique: le premier avion spatial français devrait être conçu à Bordeaux, ou plutôt à Mérignac, puisque c'est la technopole Bordeaux Technowest qui accueillera la start-up courant mars 2025 dans les murs de son nouveau QG, le "Cockpit". 

AndroMach, qui réunit aujourd'hui en région parisienne un peu moins d'une dizaine d'employés, a pour ambition de développer un avion suborbital (200 km d'altitude) de 4 mètres de long pour 1,2 mètre d'envergure, capable d'embarquer en soute une charge utile de 10 kilos dès 2026. Pour commencer… car en cas de succès, des évolutions importantes sont d'ores et déjà prévues au sein d'une roadmap comprenant les dates de 2028 (150 kg en orbite, avec l'aide d'un microlanceur "partenaire") et 2031 pour des développements itératifs, avec notamment un aéronef plus imposant (18m) capable d'emporter 600 kg sur orbite héliosynchrone

Pour la start-up qui a mené depuis un an ses études de faisabilité, et qui vient de réaliser sa première levée de fonds, les essais de propulsion et d'aérodynamique auront lieu début 2025. Son installation au Cockpit pourrait ensuite s'accompagner de quelques recrutements. 

L'avion spatial est un sujet qui fascine autant qu'il peut décourager. La technologie intéresse un nombre assez important de start-up, mais n'est réellement maitrisée qu'au sein des armées américaine et chinoise. En France, le ministère des Armée a pu évoquer il y a deux ans la volonté de mener des études sur le sujet, qui auraient pu aboutir à ce que l'armée de l'Air et de l'Espace se dote un jour de son propre "X-37B" (le fameux drone spatial de l'US Space Force). Il semble cependant que le sujet soit au point mort. 
Ajoutons enfin, bien sûr, qu'il est de notoriété publique que Dassault Aviation est activement concerné par la question, pour des usages ambitieux qui iraient jusqu'au vol commercial habité. 

Car l'avion spatial a, sur le papier, des avantages évidents en termes de réutilisabilité, de besoins réduits d'infrastructures (une mission suborbitale pourrait être entièrement menée depuis une base aérienne), ou encore d'emport -et de retour intact- de charges utiles. 
Concernant les missions justement, AndroMach communique sur le fait que le premier véhicule suborbital pourrait trouver des usages dans le domaine des recherches en microgravité, un domaine également visé par la luxembourgeoise Space Cargo Unlimited. Quelques minutes à 200 km d'altitude et l'opportunité de développements pour le secteur pharmaceutique, biologique, ou même informatique. 

A échéance plus lointaine, sur orbite basse, et pour des missions de plusieurs jours ou mois cette fois, s'ouvrent les marchés de l'intervention sur des satellites, vaisseaux spatiaux, ou débris (maintenance, réparation, désorbitation…). Ceci dit, est ce vraiment un marché porteur ? 

Et il y a, bien entendu, la défense qui faute d'un grand programme national de drone spatial, pourrait trouver dans les projets de cette start-up une solution souveraine estampillée "new space". Ce domaine est explicitement évoqué par les fondateurs d'AndroMach.

Mais pour en arriver là, de nombreux défis techniques, qui touchent à la structure de l'aéronef comme à sa propulsion, seront à surmonter, le drone devant évoluer dans des milieux (la haute atmosphère et l'espace) où les contraintes sont intenses. Le design exposé à ce jour présente en tout cas des aspects très intéressants, tout comme la démarche itérative. 

Les centres d'essais, la pièce maîtresse du territoire Bordelais 

A ce stade, il s'agit là d'un nouveau joli coup pour l'agglomération (avec encore le travail remarquable de Bordeaux Technowest et de l'agence Invest in Bordeaux) qui attire un projet que l'on pourrait qualifier "de rupture". Après Hynaéro (projet de "Canadair" français), The Exploration CompanyHyprSpace ou encore Dark… ce ne sont pas les ambitions qui manquent.

Ce qui a convaincu AndroMach ? La proximité des sites disponibles pour mener des essais de propulsion: « Pour les essais opérationnels, propulsion et essais en vol, toutes les infrastructures sont disponibles sur le territoire », peut-on lire dans La Tribune. Outre la proximité, pratique, de l'océan, il faut dire en effet que l'ouest bordelais dispose d'un sacré héritage en matière de structures dédiées à la pyrotechnie.

Cet argument, on le retrouve d'ailleurs partout chez les pépites du spatial ces derniers mois sur le territoire. Récemment, c'est d'ailleurs The Exploration Company qui a montré son nouveau banc d'essai de Mérignac (images ci-dessous), mis en place durant l'été sur un ancien site à Mérignac. Déjà impressionnant de maîtrise, et destiné à grossir dès l'an prochain.
 


lundi 30 septembre 2024

Asman Technology présente sa solution de services ISR sur P.68 Observer


La PME charentaise Asman Technology, spécialisée dans les services de renseignement aérien, a présenté lors du salon AD2S sa solution de mission sur avion italien Vulcanair P.68.

Ci-dessus: le P.68 d'Asman Aero Services à Mérignac, le 25 septembre - photo Pax Aquitania
  

Parce qu'il n'y pas que les drones dans la vie… et qu'opérer un petit avion civil demandera généralement moins de ressources en matériel (sans parler du coût d'un drone tactique) et surtout en hommes, la discrète PME Asman Technology, basée près de Jonzac en Charente-Maritime depuis huit ans, entretient une flotte mixte dont elle loue les services pour des missions de surveillance ou renseignement.   

Présente la semaine dernière sur la base aérienne 106 de Bordeaux-Mériganc pour le salon AD2S, dédié aux "activités technico-opérationnelles" dans l'aéronautique de défense, l'entreprise en a profité pour présenter le tout nouvel appareil qui a rejoint ses opérations en septembre, un bimoteur six places P.68 "Observer" de la marque italienne Vulcanair (autrefois Partenavia). 

Visible sur les photos, un panel d'équipements ISR, dont une boule optronique, a été intégré sur l'avion, qui dispose encore d'emports disponibles sous les ailes. Il permet notamment la retransmission vidéo en direct vers le sol. 


Il complète une flotte constituée de drones et d'un ULM. Ces appareils sont tous consacrés aux capacités fournies par la section services d'Asman, "pour des missions stratégiques comme l'ISR (Intelligence, Surveillance, Reconnaissance), les expérimentations de nouvelles technologies embarquées, et les opérations de travail aérien".

Asman Technology dispose d'une base sur l’Aéropôle Antoine de Saint-Exupéry, une pépinière d'entreprises située sur l'aérodrome Jonzac-Neulles.


mercredi 25 septembre 2024

Le salon AD2S marque le grand retour du sujet MCO à Mérignac

Du 25 au 27 septembre se déroule sur la base aérienne 106 de Bordeaux-Mérignac la première édition du salon AD2S, dédié aux  "activités technico-opérationnelles" dans l'aéronautique de défense. Ou en d'autres termes, au MCO, le maintien en condition opérationnelle. Une question qui a toujours été centrale, mais dont les fondements sont bousculés par l'évolution du contexte stratégique international. 


Il faut un -tout petit- peu de mémoire pour se rappeler que AD2S (Aerospace & Defence Support and Services), dont c'est officiellement la première édition en 2024, ne naît pas de rien, et se situe dans la filiation quasi directe (même thème, même lieu, certains organisateurs communs) d'un salon qui avait pris une belle ampleur durant la décennie 2010. 

Le salon ADS Show avait en effet culminé en 2018 avant que l'édition 2020 ne soit purement et simplement annulée… pour cause de pandémie. Culminé à une époque où, pour les armées françaises surengagées en opérations extérieures, la question de la disponibilité des matériels aéronautiques était devenue absolument cruciale, et sujette à d'importants travaux au niveau de l'Etat Major ou de l'Assemblée Nationale. La Députée PS de la 6ème circonscription de la Gironde, Marie Récalde -qui vient de retrouver ce poste en juillet- était d'ailleurs co-autrice d'un rapport que nous avions détaillé sur ce blog. Il en avait notamment découlé une grande réforme du MCO aéronautique, dont l'un des  principes était la verticalisation des contrats avec les industriels, réforme qui semble être largement saluée aujourd'hui.

Les chiffres de la disponibilité se sont améliorés en effet, mais il faut aussi dire que la longue parenthèse des "OPEX", africaines en particulier, est pour le moment refermée.

Mais la renaissance, pour ainsi dire, de ce salon aquitain dédié à la maintenance se déroule dans un contexte stratégique bouleversé. En 2024, la haute intensité n'est plus aujourd'hui un concept lointain, elle est réelle, et aux portes de l'Europe. 

Au milieu des centaines d'exposants et du millier de visiteurs attendu (dont le ministre des Armées Sébastien Lecornu, ce jeudi), AD2S s'ouvrait donc ce matin sur le sujet crucial de l'engagement majeur et des réponses apportées par les forces armées et les industriels en matière de support

Comme l'ont reconnu les grands commandants français du soutien aux opérations ce matin, "On ne parlait plus d'attrition dans les forces occidentales depuis des décennies". L'invasion de l'Ukraine a remis les responsables devant des réalités. Désormais, on identifie les points forts, ou faibles. On appuie là où ça fait mal, dans des exercices comme Orion, et sa déclinaison pour le MCO aéronautique Orionis. On joue (simule) en mode dégradé: un avion rentre de mission endommagé ? La force manque de munitions ? Soit. L'avion devra être de nouveau opérationnel en quelques heures. Et tant pis s'il n'est plus vraiment multirôle (au diable également les normes de sécurité aérienne). "Avec Orion nous sommes passés de soutenir l'entraînement des forces à entraîner les forces de soutien". Cette disparition d'un certain confort opérationnel en Occident impose de changer d'état d'esprit à niveau politique, militaire, industriel… mais aussi à l'échelle du citoyen (par exemple, ce dernier supporterait il des réquisitions en cas de crise majeure ?). Cette révolution doit être entretenue au quotidien désormais.



Le cycle de conférence continuera en abordant jeudi et vendredi les sujets de l'innovation et du facteur humain. Longue vie à AD2S ! 

Je note enfin qu'en bon salon néo-aquitain, AD2S est aussi l'occasion de quelques annonces qui dépassent le simple cadre du support. Mais nous en reparlerons dans les prochains jours. 

En parlant de stratégique... on est toujours bien accueilli sur la BA-106 ! - photo Pax Aquitania