La start-up AndroMach s’installera à Mérignac au printemps 2025. Dans ses cartons, un projet d'avion spatial inédit en France. Une capacité réutilisable d'emport, et de retour, qui pourrait intéresser le monde de la recherche en microgravité, ainsi que la défense.
Ci-dessus: vue d'artiste du drone spatial suborbital d'AndroMach.
C'était un secret de polichinelle, puisque la start-up
AndroMach disposait d'un stand bien visible -avec maquette !- sur les événements bordelais de la rentrée aérospatiale, mais c'est
dans un article de La Tribune Bordeaux en date du 30 octobre que l'information a finalement été rendue publique:
le premier avion spatial français devrait être conçu à Bordeaux, ou plutôt à Mérignac, puisque c'est la technopole
Bordeaux Technowest qui accueillera la start-up courant mars 2025 dans les murs de son nouveau QG, le "Cockpit".
AndroMach, qui réunit aujourd'hui en région parisienne un peu moins d'une dizaine d'employés, a pour ambition de développer un avion suborbital (200 km d'altitude) de 4 mètres de long pour 1,2 mètre d'envergure, capable d'embarquer en soute une charge utile de 10 kilos dès 2026. Pour commencer… car en cas de succès, des évolutions importantes sont d'ores et déjà prévues au sein d'une roadmap comprenant les dates de 2028 (150 kg en orbite, avec l'aide d'un microlanceur "partenaire") et 2031 pour des développements itératifs, avec notamment un aéronef plus imposant (18m) capable d'emporter 600 kg sur orbite héliosynchrone.
Pour la start-up qui a mené depuis un an ses études de faisabilité, et qui vient de réaliser sa première levée de fonds, les essais de propulsion et d'aérodynamique auront lieu début 2025. Son installation au Cockpit pourrait ensuite s'accompagner de quelques recrutements.
L'avion spatial est un sujet qui fascine autant qu'il peut décourager. La technologie intéresse un nombre assez important de start-up, mais n'est réellement maitrisée qu'au sein des armées américaine et chinoise. En France, le ministère des Armée a pu évoquer il y a deux ans la volonté de mener des études sur le sujet, qui auraient pu aboutir à ce que l'armée de l'Air et de l'Espace se dote un jour de son propre "X-37B" (le fameux drone spatial de l'US Space Force). Il semble cependant que le sujet soit au point mort.
Ajoutons enfin, bien sûr, qu'il est de notoriété publique que Dassault Aviation est activement concerné par la question, pour des usages ambitieux qui iraient jusqu'au vol commercial habité.
Car l'avion spatial a, sur le papier, des avantages évidents en termes de réutilisabilité, de besoins réduits d'infrastructures (une mission suborbitale pourrait être entièrement menée depuis une base aérienne), ou encore d'emport -et de retour intact- de charges utiles.
Concernant les missions justement, AndroMach communique sur le fait que le premier véhicule suborbital pourrait trouver des usages dans le domaine des recherches en microgravité, un domaine également visé par la luxembourgeoise Space Cargo Unlimited. Quelques minutes à 200 km d'altitude et l'opportunité de développements pour le secteur pharmaceutique, biologique, ou même informatique.
A échéance plus lointaine, sur orbite basse, et pour des missions de plusieurs jours ou mois cette fois, s'ouvrent les marchés de l'intervention sur des satellites, vaisseaux spatiaux, ou débris (maintenance, réparation, désorbitation…). Ceci dit, est ce vraiment un marché porteur ?
Et il y a, bien entendu, la défense qui faute d'un grand programme national de drone spatial, pourrait trouver dans les projets de cette start-up une solution souveraine estampillée "new space". Ce domaine est explicitement évoqué par les fondateurs d'AndroMach.
Mais pour en arriver là, de nombreux défis techniques, qui touchent à la structure de l'aéronef comme à sa propulsion, seront à surmonter, le drone devant évoluer dans des milieux (la haute atmosphère et l'espace) où les contraintes sont intenses. Le design exposé à ce jour présente en tout cas des aspects très intéressants, tout comme la démarche itérative.
Les centres d'essais, la pièce maîtresse du territoire Bordelais
A ce stade, il s'agit là d'un nouveau joli coup pour l'agglomération (avec encore le travail remarquable de Bordeaux Technowest et de l'agence Invest in Bordeaux) qui attire un projet que l'on pourrait qualifier "de rupture". Après Hynaéro (projet de "Canadair" français), The Exploration Company, HyprSpace ou encore Dark… ce ne sont pas les ambitions qui manquent.
Ce qui a convaincu AndroMach ? La proximité des sites disponibles pour mener des essais de propulsion: « Pour les essais opérationnels, propulsion et essais en vol, toutes les infrastructures sont disponibles sur le territoire », peut-on lire dans La Tribune. Outre la proximité, pratique, de l'océan, il faut dire en effet que l'ouest bordelais dispose d'un sacré héritage en matière de structures dédiées à la pyrotechnie.
Cet argument, on le retrouve d'ailleurs partout chez les pépites du spatial ces derniers mois sur le territoire. Récemment, c'est d'ailleurs The Exploration Company qui a montré son nouveau banc d'essai de Mérignac (images ci-dessous), mis en place durant l'été sur un ancien site à Mérignac. Déjà impressionnant de maîtrise, et destiné à grossir dès l'an prochain.
On ne peut que se féliciter de la multiplication des start up dans le domaine aérospatial en France.
RépondreSupprimerMais au gré de l'avancement des projets se pose le problème de leur financement. La France étant quasiment en défaut de paiement, un financement public significatif est exclu. Par ailleurs, la France, du fait d'une idéologie d'un autre âge, ne dispose pas de fonds de pension. Les possibilités de financement privé d'un montant élevé sont donc quasiment exclues. Reste la solution la plus probable, se vendre à un investisseur étranger, américain la plupart du temps.
Quelle tristesse !
Nous savons tous de ce qu'il advient des fonds de pension en cas de crise économico-monétaire et/ou spéculatif. Sans rejeter un mode souverain, si "Bruxelles" ne s'y oppose pas dans le cadre de la libre concurrence des banques et du Droit économique, la problématique des investissements est réelle. La France n'ayant plus les moyens, même si les Francais en disposent encore.... Pendant ce temps, les Européens financent l'industrie de l'armement et les GAFAM des USA qui rachète nos industries et PME. La boucle est bouclée et il sera très difficile d'en sortir pour trouver fortune.
RépondreSupprimer