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mercredi 5 juin 2024

A Berlin, Airbus dévoile son drone "Wingman" qui précédera le SCAF


Airbus Defence & Space profite du salon aéronautique de Berlin cette semaine pour dévoiler son concept de drone ailier "Wingman", avec notamment une maquette grandeur nature. Ce projet, 100% allemand, n'est pas encore un programme, et semble de prime abord s'inscrire comme une réponse au successeur du drone de combat furtif "Neuron" imaginé pour accompagner le Rafale F5 en France à horizon 2035. 

Images - Airbus au salon ILA de Berlin. 


En matière d'aviation de combat, nous n'avions jamais rien vu d'aussi avancé chez Airbus depuis 2019 et la révélation que le groupe avait travaillé en soufflerie et chambre anéchoïque sur un design de drone furtif. Quelle surprise donc, cette semaine, de découvrir non seulement l'annonce, mais également la maquette grandeur nature d'un drone ailier ("loyal wingman") furtif de la taille d'un avion de combat Eurofighter. Quasiment 12 mètres de large, pour 15,5 mètres de long. 

Dans son communiqué précédant la présentation sur le salon berlinois de l'aéronautique, qui débutait ce mercredi 5 juin, Airbus Defence a révélé la première image du "Wingman", et surtout précisé plusieurs choses: 
  • Wingman est le fruit d'un exercice de design "made in Germany"
  • le concept est amené à évoluer, d'autant plus que le groupe le compare littéralement à un "show car" de l'industrie automobile. Une étrange communication probablement destinée à un public allemand qui a érigé la voiture en fierté nationale, mais qui ne fait pas oublier que les show-car sont plutôt génératrices de déception lorsqu'il s'agit de découvrir le produit final.
  • Wingman est la réponse à un intérêt de la Luftwaffe elle-même, qui entend disposer d'un drone ailier accompagnant le chasseur Eurofighter dès les années 2030. Et donc, avant le SCAF, attendu lui pour 2040 au plus tôt. 

Ce matin à Berlin, la maquette a ainsi été présentée au Chancelier Olaf Scholz, qui inaugurait le salon ILA 2024. Airbus a également profité de ce jour pour annoncer un partenariat avec le groupe allemand Helsing au sujet des briques d'intelligence artificielle qui équiperont le drone (photo ci-dessous). 



Un design qui s'inscrit dans les standards internationaux 

La bête est donc dévoilée, maquette 1:1 à l'appui, ce qui est en soi un événement doublé d'une surprise. On découvre non pas une aile volante façon "Neuron", mais un profil en delta plus effilé qui laisse penser que le drone approchera le domaine supersonique (aucune indication du constructeur à ce sujet). Il semble d'ailleurs, au vu des modèles dévoilés un peu partout dans le monde, excepté en France et en Russie (pour l'instant), que ce type de profil soit désormais celui qui est privilégié par les constructeurs et/ou les forces aériennes, avec un avantage certain en terme de vitesse par rapport à l'aile volante. La motorisation -unique- serait d'ailleurs la même que celle de l'Eurofighter.  

De plus, le design nous montre un haut degré apparent de furtivité, avec plans canard, unique entrée d'air centrale et absence d'empennage… même si cela dépend visiblement de l'architecture choisie, puisque une double dérive apparait sur une autre image ainsi qu'une maquette réduite, laissant croire à l'existence d'options de modularité.  

Concernant l'armement, si ce drone furtif aura nécessairement des emports en soute, on découvre aussi en image des plots extérieurs avec de l'armement air-sol.


Airbus évalue le prix du Wingman au tiers de celui d'un avion de chasse d'aujourd'hui (donc autour de 30 millions d'euros ?). Dans la norme occidentale observée sur les programmes similaires, et loin des fantasmes de drones consommables que l'on peut encore lire ici ou là. Cela permettre en théorie aux flottes de retrouver de la masse de manœuvre. 

Même si ce projet répond visiblement à un intérêt de l'armée de l'air allemande, c'est bien Airbus qui a financé le développement jusqu'ici, pour quelques dizaines de millions d'euros. Le constructeur semble espérer le lancement officiel d'un programme, même si absolument aucun engagement n'a été pris publiquement de la part de Berlin. Si ce n'est en ce jour du 5 juin de commander 20 nouveaux Eurofighter... 


Politique de parité avec la France… ou avec Dassault Aviation ? 

La révélation du Wingman par Airbus est-elle une véritable surprise ? Pas vraiment. On savait depuis quelques mois que l'Allemagne lorgnait sur les plans français visant à pouvoir disposer d'un drone ailier du Rafale durant la décennie 2030, soit ce que je nommerai l'ère "pré-SCAF", ce dernier n'arrivant qu'après 2040. 

Car en effet, en février 2022, le contexte stratégique a changé, et ce que l'on évoquait à longueur de colloques a fini par arriver: la Russie a déclenché une guerre de haute intensité. A Paris, l'Etat-Major de l'armée de l'Air et de l'Espace, comme le politique, ont alors fait un constat selon lequel le niveau de jeu affiché par les "compétiteurs" (ici la Russie, mais il y en a d'autres) venait d'être élevé à un rang supérieur. Des développements ont été lancés sur le potentiel de réalisation d'un drone ailier issu du très convaincant programme "Neuron" mené en collaboration européenne par Dassault Aviation durant toute la décennie 2010. La décision sera ainsi confirmée au salon du Bourget 2023 il y a tout juste un an: le Rafale au standard F5 aura un drone de combat furtif ailier à horizon 2035, ce qui contribuera à maintenir les capacités d'entrée en premier de l'armée de l'Air tout en préparant le SCAF des années 2040. 


Juin 2024: Airbus annonce donc en Allemagne un projet similaire en tout point, maquettes à l'appui. Il s'agit ici selon moi d'une pure politique de parité, non seulement avec Paris, mais aussi avec les autres industriels présents sur le marché international. Airbus montre qu'il aura son drone au catalogue, et que Dassault, son partenaire sur SCAF, n'aura pas cette primauté en Europe. Airbus grille en quelques sortes la politesse à Paris, mais aussi à Londres (BAE, programme GCAP), voire même à Stockholm (Saab), où je me serais davantage attendu à voir ce type de concept apparaître.  

Toutefois, il y a ici plusieurs problèmes, que nous allons résumer très brièvement: 
  • la Luftwaffe n'est pas l'armée de l'Air française. Elle n'en a ni la culture, ni le contrat opérationnel, largement structuré chez nous par les Forces Aériennes Stratégiques (nucléaires). 
  • l'Eurofighter est en retard sur les technologies de fusion de données et de combat collaboratif, du moins à ambitions équivalentes au Rafale F5. Mais c'est là qu'intervient le partenariat d'Airbus avec Helsing sur l'IA, dans le but de développer un environnement collaboratif entre le -seul- pilote de l'Eurofighter et son drone ailier. Attention à la charge cognitive ! C'est tout le défi. 
  • attention également tout de même avec cette notion de drone piloté depuis un autre appareil, ou même d'autonomie par l'IA. La société allemande risque d'être peu réceptive... 
  • enfin, si Airbus veut véritablement un programme, il faudra lutter contre un nouvel arrivant dans la Luftwaffe, lui aussi furtif et taillé pour le combat collaboratif. C'est bien sûr le F-35, dont la fâcheuse réputation est de ne laisser aucune miette dans les budgets des forces concernées.

mercredi 29 novembre 2023

La Belgique annonce qu'elle rejoindra le programme SCAF en 2025

Après avoir s'être vu promis le statut d'observateur, la Belgique devrait pleinement rejoindre le programme SCAF en juin 2025. Mais dans quel but ?


Malgré les remous, voire petites tempêtes, médiatiques plus que politiques, industrielles plus que militaires, le SCAF (système de combat aérien futur) avance. 

Dernière nouvelle, d'ordre "architecturale": nous devrions connaître le choix définitif du chasseur de nouvelle génération au printemps 2025 (avec design révélé au Bourget ?), quatre concepts d'appareil -ou cinq, selon les sources- étant étudiés au sein du programme.

Mais le printemps 2025 serait aussi la date à laquelle un quatrième partenaire européen, la Belgique, pourrait officiellement rejoindre la France, l'Allemagne, et l'Espagne. C'est en effet ce qu'a annoncé la ministre de la Défense Ludivine Dedonder de façon très informelle -sur le réseau social Linkedin- après un discours devant les industriels belges de l'aéronautique durant un événement consacré au combat aérien futur.  
Rappelons que depuis juin 2023, la Belgique a obtenu le statut d'observateur du SCAF, statut qui n'a pas encore été formalisé d'ailleurs. Il devrait l'être d'ici la fin de l'année.
 

Mais établissons un double constat:

  • Tout d'abord, cela semble très unilatéral, et politique. 
La déclaration, tout à fait prématurée puisque le processus d'évaluation n'est pas achevé, a été faite presque en catimini avant que la presse nationale n'enquête et ne la reprenne, et elle n'est depuis globalement commentée qu'en Belgique, où Flamands et Wallons continuent de disserter sur leur destin stratégique.
Rien, pour le moment, du côté des partenaires européens. On sait que l'arrivée de la Belgique dans le SCAF plaît à l'Elysée, pour des raisons politiques évidentes, mais qu'elle est moins bien accueillie chez les industriels des trois pays, qui négocient déjà assez difficilement calendrier et charge de travail.

Mais soit, la Belgique deviendra a priori membre à part entière du programme SCAF en juin 2025, alors qu'il s'agira de lancer la phase 2 du programme, menant à la conception du démonstrateur dont le design aura été tout juste défini. 

  • Mais la Belgique dans le SCAF, pour y faire quoi ?
Deuxièmement, se pose la question de l'intégration concrète d'un -petit- partenaire à ce stade du programme, que les participants se refusent publiquement d'élargir. D'autant plus que l'on connait déjà l'enveloppe disponible: 360 millions d'euros, ce qui est bien faible quand les autres partenaires parlent en milliards.
Il parait clair que la Belgique tente un coup politique en "candidatant" au SCAF, elle qui a pourtant opté pour le F-35. Les retombées économiques tant promises avec ce marché américain seront à n'en pas douter finalement en deçà des attentes (sans même évoquer les coûts cachés générés par l'emploi du F-35) et Bruxelles se cherche un grand programme européen, un "contrat du siècle" (l'expression a véritablement été employée), pour satisfaire ses entreprises et contribuables. A cette étape du discours politique, c'est surtout le mot "emplois" qui transpire, tandis que les industriels espèrent accéder à des informations critiques sur le programme.
On sait que l'industrie belge a des compétences à offrir, la proposition commerciale française autour du Rafale existait pour le prouver en 2017-18. Elle ne fut pas suivie. Reste à savoir si les places à prendre à l'époque ont été pourvues depuis.    

Enfin, sur un plan purement opérationnel, l'armée de l'Air belge prend possession de ses premiers F-35 (il faudra encore des années avant la mise en service), dont la carrière pourrait s'étendre sur au moins 30 ans. On n'image donc pas, à ce stade, Bruxelles commander l'avion européen de nouvelle génération, ou même intégrer le système de combat futur puisque le F-35 ne collabore qu'avec lui-même.


Pour plus de clarté, attendons donc les discours et sorties médiatiques qui ne sauraient tarder puisque le mois de décembre sera l'occasion de concrétiser ce fameux statut d'observateur. Un statut pas vraiment anticipé avant notre histoire belge, et qui pourrait éventuellement permettre d'accueillir d'autres pays… s'ils ont quelque chose à offrir ?


vendredi 30 juin 2023

Quel avion d'alerte avancée pour le SCAF ?

Le remplacement des vénérables AWACS de l'armée de l'Air et de l'Espace n'est pas au programme de la Loi de programmation militaire 2024-30. Il concernera en revanche la LPM suivante puisque leur potentiel sera épuisé vers 2035. A l'âge du SCAF, quels seront donc les possibilité de remplacement ? 

Ci-dessus: le système GlobalEye de Saab - photo constructeur.


Malgré toute leur magnificence, les légendaires "AWACS" (Airborne Warning and Control System), véritables symboles de la puissance aérienne occidentale, auront bientôt fait leur temps. Les Boeing E-3 Sentry -sur une base Boeing 707 militarisée- sont effet âgés d'un demi-siècle pour la plupart. 32 ans pour les 4 appareils en service dans l'armée de l'Air française. 
Leur remplacement est donc acté dans l'US Air Force, la Royal Air Force britannique, et est au cœur d'un important marché pour l'OTAN. 

Avec le temps, ces appareils d'alerte précoce, dont le fameux "rotodôme" porte deux radars multimodes (primaire & secondaire) analysant la situation tactique sur un rayon de 400 km, sont devenus l'un des éléments clés des dispositifs aériens contemporains. Non seulement pour leur rôle d'alerte avancée, mais aussi pour le développement de leurs capacités de C2 (command & control), ces avions étant en effet au cœur du réseau de décisions. On les voit notamment jouer un rôle très important pour l'Alliance Atlantique sur le flan est du continent européen.

Les imposants AWACS de l'armée de l'Air embarquent aujourd'hui un équipage de 18 personnes.


Ces appareils parfaitement reconnaissables arrivent donc en fin de vie opérationnelle chez les Occidentaux, tandis que depuis une grosse vingtaine d'années, de nouveaux Etats cherchent à s'en doter, notamment en Asie et au Proche & Moyen-Orient. 
Sur ce marché, deux acteurs principaux se démarquent (nous mettons de côté les Israéliens, peu de chance de les voir percer le marché français). Nous y trouvons Boeing qui propose en successeur du Sentry le 737 AEW&C/E-7 "Wedgetail", appareil ayant déjà remporté les marchés australien, turc, coréen, britannique et bien entendu américain. Nous y trouvons également le Suédois Saab avec une solution plus légère -les performances restent globalement les mêmes- incarnée par le GlobalEye, solution implantée sur business jet (nous y reviendrons) et héritée du système à succès "ERieye" lancé dans les années 1990. GlobalEye a convaincu, outre la Suède en 2022, les Emirats Arabes Unis dès 2015.

Que l'on soit chez Boeing ou Saab, la nouvelle génération d'AWACS, déjà opérationnelle mais sujette à de prochaines évolutions, s'avère largement plus performante que l'ancienne développée durant la guerre froide. Dans les deux cas, le radar bénéficie d'une portée étendue à 600km, quand les vieux E-3 n'en couvrent que 400. S'agissant de l'avionique, des autres capteurs, et des systèmes de liaisons de données, ils embarquent nativement des capacités que même les dernières modernisations de l'E-3 Sentry peinent à égaler (modernisation entreprise en 2017 pour l'armée de l'Air). 
Et dans les deux cas, ils nécessitent un équipage moins important que l'ancienne génération, une partie des systèmes pouvant d'ailleurs être gérée à distance grâce aux liaisons de données.


En 2023, les deux appareils précités sont en compétition dans le marché de remplacement des 14 AWACS (des E-3 vous l'aurez deviné) de l'OTAN, basés en Allemagne. Un marché où les Américains ne comptaient visiblement pas avoir de concurrence. La Suède elle, candidate à l'entrée dans l'Alliance Atlantique, joue crânement sa chance. 

Cela nous amène donc à la question du remplacement des AWACS français. Celle-ci ne fait pas beaucoup débat aujourd'hui, puisque les appareils sont théoriquement en service jusqu'en 2035. Or, nous bouclons à peine le vote de notre Loi de programmation militaire pour la période 2024-2030. C'est donc au cours des prochaines années, en préparation de la période post-2030, que la question devra être posée: à l'orée de son entrée dans le SCAF, système de combat aérien futur, de quel système d'alerte avancée choisira de se doter la France ? 


Un moyen d'embarquer la Suède dans le SCAF ? 

Pour bien comprendre la problématique, il faut poser sur la table les grands principes du système de combat aérien futur (SCAF), tel que généralement conçu selon l'évolution de la doctrine occidentale, et dans notre cas, française. 

Le combat aérien futur tel que conceptualisé aujourd'hui repose essentiellement sur la notion de combat collaboratif. Chaque pièce du dispositif (du drone au satellite) est ainsi interconnectée à toutes les autres, si bien que la "toile" toute entière est au service de la mission, en temps réel. Au cœur du système, l'humain bénéficie d'une aide à la décision rendue possible par le traitement des données issues de l'ensemble des capteurs.
A la base du SCAF, il y a donc les capteurs -et effecteurs- et la façon dont ils interagissent entre eux. Surtout, l'une des pièces maitresses qu'est l'avion de combat est capable de constituer un "nœud de C2", chaque appareil interprétant donc le rôle d'un "mini-AWACS". 

Toute la mission ne repose donc plus, comme cela peut-être le cas aujourd'hui, sur le seul AWACS, qui d'ailleurs constitue de facto une cible prioritaire pour l'ennemi.

Néanmoins, ce réseau ne peut se passer d'un avion spécialisé, le radar d'un avion de combat n'égalant par exemple qu'une fraction de la surface couverte par les systèmes d'un AWACS dédié. 



La France perdra dans les années 2030, et ses avions de patrouille maritime (les ATL-2), et ses AWACS (le E-3 Sentry). Dans les deux cas, il n'y a aujourd'hui aucune solution française ni même européenne disponible sur étagère*… mise à part le GlobalEye en remplacement des AWACS.
Mais dans la configuration du SCAF, à savoir un réseau collaboratif bien plus distribué que ce que nous connaissons aujourd'hui, aura t-on besoin d'aussi gros appareils que par le passé ? Pas nécessairement. D'autant plus qu'une solution "imposante" comme le Boeing E-7 n'est pas vraiment optimisée (la miniaturisation des systèmes fait en effet qu'à bord d'un appareil comme le Boeing 737, la cabine n'est pas utilisée à son plein potentiel !), et est également bien plus chère si l'on en croît les marchés déjà établis. A budget égal, un business jet permettrait à la fois plus de souplesse dans l'emploi, et éventuellement de pouvoir disposer de plus d'appareils en flotte (oui, on peut rêver), comme c'est le cas par exemple dans le renseignement avec les 3 Falcon 8X "Archange" qui remplaceront 2 Transall Gabriel**. Ceci dit toutefois, on ne réalise pas de posé d'assaut avec un Falcon…

Enfin, le rôle de la Suède. 

Initialement partenaire du programme britannique Tempest (qui associe aujourd'hui Italiens… et Japonais), la Suède a plus récemment semblé prendre de la distance avec le programme concurrent de notre SCAF "continental" (France, Allemagne, Espagne… et Belgique en observateur). 
Au regard de la situation géostratégique du pays (il est européen), de la performance reconnue de son industrie de défense (voir la victoire récente de Saab sur le marché des systèmes de guerre électronique de la Luftwaffe), ou encore des programmes menés en partenariat par le passé, comme le démonstrateur de drone de combat furtif nEUROn dont le maître d'œuvre était Dassault Aviation (démonstrateur qui aura visiblement un héritier au sein du SCAF), il y a naturellement matière à penser que Stockholm, et en particulier Saab, ont peut-être une carte à jouer au sein du SCAF, étant susceptibles d'apporter de véritables briques à l'édifice. Ce qui n'est pas le cas de tout le monde en Europe.


Et pourquoi pas sur Dassault Falcon ?

Dans notre scénario d'élargissement du SCAF, un seul pays européen propose donc une solution éprouvée en matière d'alerte avancée: Saab avec son GlobalEye.

Petit bémol à ce projet. L'avion porteur du système est aujourd'hui un business jet certes, mais un business jet canadien: le Bombardier Global 6000. Depuis les années 1990, Saab a fait le choix d'installer son système sur plusieurs porteurs, tous dans la gamme des avions d'affaires. Ces avions sont au nombre de 4. Il s'agit du Bombardier Global 6000 donc, mais aussi du Saab 340, du Saab E-2000, et de l'Embraer 145H.
Le Global 6000 est un "gros" jet, aux performances assez remarquables. Ceci dit, la totalité de ses capacités seront bientôt dépassées par un nouvel appareil qui entre à peine production pour le marché civil. Le Dassault Falcon 10X, "le plus grand, le plus avancé, et le plus spacieux" des business jets.  


Les performances affichées par le dernier né chez Dassault Aviation en terme d'endurance, rayon d'action, vitesse… mais aussi espace cabine (primordial dans notre cas d'espèce), laissent augurer d'un formidable potentiel pour un avion de missions. Sans parler d'une empreinte logistique sans commune mesure avec celle d'un Boeing. 

De là à imaginer le partenariat franco-suédois autour d'un Falcon 10X "GlobalEye"... il n'y a qu'un pas que nous ne franchirons pas aujourd'hui ! 




*S'agissant de la PATMAR, on sait depuis cet hiver 2023 que la DGA a ouvert la compétition entre Dassault Aviation et Airbus. L'heureux élu sera l'A320néo (Airbus) ou le Falcon 10X (Dassault). Là encore, ce sont deux philosophies qui s'opposent.

**Une précision sur le programme Archange et la solution intérimaire SOLAR. Les Transall Gabriel de renseignement étant retirés du service depuis 2022, et les Falcon 8X de remplacement n'arrivant qu'à partir de 2028, la DRM va utiliser une solution intérimaire à travers le contrat "SOLAR". Il s'agit ici d'externalisation via le service d'une société (bien connue) spécialisée dans le renseignement. Cette dernière utilisera comme avion porteur un Saab 340, mais le marché n'a pas été passé avec Saab elle-même. Il y a parfois confusion.

mercredi 14 juin 2023

On doute du programme F-35 en Belgique... tout en tentant de rejoindre le SCAF


La Belgique a choisi. Le F-35 au détriment du Rafale ? Oui, mais plus encore: la Belgique fait le choix du programme européen SCAF plutôt que du concurrent "Tempest". Dans une sortie médiatique tout à fait officielle, la ministre de la Défense Ludivine Dedonder annonce la volonté belge de rejoindre le SCAF. Un vrai coup de poker qui sera tenté au salon du Bourget la semaine prochaine. 

Photo: la maquette du "Next Generation Fighter" et ses "remote carriers", au Bourget en 2019.


Cela fait trois semaines que le PDG de Dassault Aviation, Eric Trappier, a déclaré lors d'une audition au Sénat -qui concernait la Loi de programmation militaire française- qu'il n'était pas favorable à l'élargissement rapide du programme SCAF (système de combat aérien futur) à d'autres membres, citant notamment les pays européens clients du F-35 américain, et encore plus explicitement la Belgique, qui chercherait dans le SCAF des contreparties industrielles.  


Trois semaines donc, et un silence médiatique quasi absolu en France, où la bataille du partage industriel semble désormais derrière. En Belgique cependant, l'intervention d'Eric Trappier a déclenché une véritable tempête politico-médiatique. Autorités comme industriels ont en effet été choqués que la France, par la voix du PDG du principal avionneur militaire du continent, annonce un rejet aussi catégorique de toute hypothétique participation belge au programme SCAF. 

Pour rappel, le SCAF, c'est un programme annoncé en juillet 2017 par la France et l'Allemagne, et associant dès le départ Dassault Aviation et Airbus Defence & Space. Le programme va par la suite s'ouvrir à d'autres industriels (intégrateurs, motoristes..) et surtout à un troisième pays, l'Espagne. Il aura fallu, pendant des mois, des années, négocier à niveau politique, militaire et industriel sur le partage des tâches, pour enfin obtenir une série d'accords qui doit mener à la réalisation d'un démonstrateur pour l'avion de combat de nouvelle génération (horizon 2028/29), dont la maîtrise d'œuvre est confiée à Dassault. Mais le SCAF, c'est bien plus que ça, avec aussi un cloud de combat, des effecteurs déportés, etc... 

Dès le départ le SCAF "continental" s'est retrouvé face à un projet britannique concurrent, le "Tempest" -renommé depuis… FCAS, soit SCAF en anglais- rejoint par l'Italie, et lié récemment au programme d'avion de nouvelle génération japonais. La Belgique a elle, depuis le départ, annoncé qu'elle étudierait sa participation aux deux programmes. Jusqu'à ce jour… où elle annonce donc sa préférence pour le SCAF.


Le SCAF vu comme une véritable bouée économique

On peut en effet lire depuis le 10 juin dans La Libre que le "vrai contrat du siècle" (sic) n'est pas pour la Belgique celui du F-35 mais bien celui du système de combat aérien futur, dit de "6ème génération". Et avec ce programme "SCAF", on parle effectivement du programme franco-allemand-espagnol, Bruxelles semblant juger qu'il y a plus à y gagner sur le plan économique et industriel qu'avec les Britanniques. Un choix murement réfléchi qui explique peut-être les inquiétudes entendues depuis la sortie d'Eric Trappier au Sénat. 

La ministre belge, que l'on attend la semaine prochaine au salon du Bourget, revient justement sur ce passage, se disant "choquée" par les propos du PDG de Dassault Aviation, accusant par la même la France de jouer à contre courant de l'Europe de la Défense. Lunaire. 

En vérité, que peut à ce stade obtenir la Belgique dans le programme SCAF, outre éventuellement une concession politique (pas impossible, l'Elysée fait plutôt dans la mansuétude) qui la mènerait au statut d'observateur du programme ?
La presse belge regorge pourtant d'interviews ces derniers jours, de la part d'industriels nationaux ventant les apports que pourraient fournir leurs entreprises. Cependant, chez nous, les partages industriels ont été faits, dans la douleur, et les acteurs ont été plutôt clairs à ce sujet. Rien ne bougera plus à court ni moyen terme

Restons ici loin des problématiques opérationnelles (le dossier de l'interopérabilité en particulier), car c'est bien en effet sur le plan économique que l'on peut commencer à déterrer la racine du problème. La Belgique, qui recevra ses deux premiers F-35A (sur 34) à la fin de l'année, en retard et pas forcément au standard attendu, attendait des Américains des retombées très importantes pour son industrie aéronautique. Chose que promettait également la France avec la candidature du Rafale. 
Or, depuis, on déchante, et certains patrons n'hésitent pas à parler de "miettes" (les chiffres parlent d'au mieux 700 millions d'euros, quand des milliards étaient espérés), appelant à ne pas se tromper lorsqu'il s'agira d'obtenir une part du prochain gâteau. Et ce prochain gâteau: c'est le SCAF.

Selon la conjoncture actuelle, il est plutôt facile de conclure que le dossier de la victoire du F-35 en Belgique -qui remonte déjà à 2018- va laisser des traces sur le long terme dans les relations franco-belges. Au Bourget, obtenir un statut d'observateur dans le programme SCAF serait en soi une victoire politique significative. Le ticket d'entrée serait de 350 millions d'euros selon la presse flamande. Un chiffre déterminé par la Belgique elle-même.

Dans cette affaire, le problème de fond réside surtout dans le fait que la Belgique n'a pas besoin d'un avion (elle a le F-35 pour 40 ans). Elle a besoin d'emplois. 


>>>MISE À JOUR SAMEDI 17 JUIN<<<
En Belgique, le conseil des ministres a approuvé vendredi 16 juin la demande de candidature du pays au programme SCAF. A Bruxelles on a directement évoqué l'ouverture de négociations entre les industriels nationaux et ceux des trois pays partenaires au SCAF. Cependant, il n'y aura aucune signature au Bourget, pas même pour un statut d'observateur. La France ferait trainer le dossier selon la presse flamande.

>>>MISE À JOUR MARDI 20 JUIN<<<
Le ministère des Armées confirme l'information délivrée en ouverture du salon du Bourget par le Président Macron. La Belgique va se voir accorder le statut d'observateur au sein du programme SCAF. Le PDG de Dassault Aviation se déclare "satisfait" de la forme de cette participation, même s'il avoue douter d'un besoin belge pour un avion avant 40 ans (car elle a le F-35). A suivre donc, pour voir les réactions ici et là… mais la porte s'ouvre donc pour d'autres partenaires. 


Ces pays qui doutent… 

La Belgique n'est pas le seul pays où se concentrent ouvertement des doutes, quand ce ne sont pas des inquiétudes quant aux surcoûts, à la réalité des compensations industrielles, ou même au processus d'acquisition qui touchent le programme F-35. C'est en particulier le cas en Suisse, qui avait opté pour le F-35 au détriment, notamment, du Rafale en juin 2021.

C'est dans ce contexte que la télévision publique propose un excellent documentaire (visible gratuitement ci-dessous) sur les problématiques qui entourent le choix du F-35 en Suisse. Les journalistes y étendent leurs investigations jusqu'en Norvège. 
On notera qu'en conclusion de celui-ci, un intervenant se pose la question de l'absence de réaction des opinions publiques face aux scandales dans le monde des acquisitions d'armement, affaires qui coûtent des milliards aux contribuables de ces démocraties pourtant exemplaires. Il explique peut-être ce phénomène par une confusion générée par la complexité de ces questions… ce qui ici nous conforte dans l'idée qu'il faut encore -et toujours- mieux informer sur les questions de défense, et plus largement, sur les questions stratégiques. 



lundi 5 juin 2023

Le couple Rafale-Neuron n'a pas peut-être pas dit son dernier mot

Un amendement de la Loi de programmation militaire précise que dans les années 2030, le Rafale porté au standard F5 pourra être accompagné d'un drone issu du démonstrateur Neuron. Le temps de capitaliser sur les enseignements de ce superbe programme débuté il y a 20 ans serait-il enfin venu ? 

Ci-dessus: un Rafale Marine rejoint le Neuron en patrouille lors d'un vol au dessus du groupe aéronaval en 2016 - Dassault Aviation. 


La nouvelle Loi de programmation militaire qui couvrira la période 2024-2030 (pour un montant record de 413 milliards d'euros) est actuellement en cours d'examen parlementaire. Des débats qui nous permettent de découvrir plusieurs amendements des plus élégants: on pensera ici d'abord à l'ajout d'une étude de faisabilité pour doter le porte-avions de nouvelle génération d'un sister ship (très strictement, un second porte-avions, sans groupe aéronoval), mais aussi et surtout à cette possibilité de voir un jour le Rafale accompagné d'un drone issu du programme nEUROn. 

C'est le gouvernement lui-même qui a déposé cet amendement N°292 le 16 mai: « Le standard F5 du Rafale sera développé pendant cette loi de programmation militaire. Il comprend notamment le développement d’un drone accompagnateur du Rafale, issu des travaux du démonstrateur Neuron ». Un amendement validé le 25 mai.

On a déjà beaucoup écrit sur le Neuron sur Pax Aquitania, et sans trop s'étendre aujourd'hui concernant ce démonstrateur de drone de combat furtif européen, je vous invite plutôt à consulter le billet ci-dessous, qui incitait dès 2019 à poursuivre l'option d'un duo Rafale F5/drone furtif. Tout est encore valable !

>>> Lire sur le blog: Penser un avenir au drone nEUROn <<<


Si le tout récent standard F4 du Rafale (2023) fait entrer l'appareil dans l'ère du combat collaboratif (au sens numérique du terme) grâce à des capacités de fusion de données, c'est avec le standard F5, d'ores et déjà annoncé pour les années 2030, que se fera la vraie révolution du système de combat aérien futur. Le Rafale pourra alors être accompagné de systèmes dronisés, autonomes ou semi-autonomes, avec lequel le chasseur "habité", au cœur du cloud de combat, pourra interagir. 

Au vu de cet amendement gouvernemental dans la LPM 2024-30, deux questions peuvent être posées ? 
  1. qui a intérêt à pousser pour le développement d'un drone de combat furtif "accompagnateur" du Rafale F5 dès les années 2030 ?
  2. parle t-on bien ici d'un drone furtif strictement issu du programme nEUROn, ou bien des fameux effecteurs déportés, les "remote carriers" qui doivent accompagner en masse le chasseur du futur au sein du programme SCAF, prévu pour les années 2040 ? 

A la première question, nous pouvons répondre en rappelant que nEUROn fut bel et bien un exemple réussi de collaboration européenne entre 6 pays, chacun apportant une expertise spécifique -ainsi qu'un financement- au sein d'un environnement de collaboration innovant. Point essentiel, il n'y avait qu'un seul décideur, la DGA française, et un seul maitre d'œuvre, Dassault Aviation. Et alors que l'on a pas évoqué le programme depuis 2019, date de la dernière campagne de vol, il semble donc que la partie française (les armées ? la DGA ? l'industriel ?) n'ait pas oublié le nEUROn et ses enseignements. 
Reste à savoir avec quel œil cette nouvelle évolution sera regardée par les autres pays concernés à l'époque (Italie, Suède, Espagne, Suisse, Grèce), et si cela peut augurer d'une nouvelle collaboration fructueuse. Car quoiqu'on en dise, la taille du marché potentiel importe.

A la seconde question, il n'y pas vraiment de réponse à ce stade, en tout cas sans clarification. En commission comme dans les médias, Eric Trappier le PDG de Dassault Aviation a néanmoins donné un indice en précisant que ce serait à l'Etat de choisir quel accompagnateur il veut pour le Rafale F5, différenciant bien les « petits remote carrier, comme pour le Scaf, ou des drones de type Neuron. C'est quasiment un avion de combat qui opère en liaison avec le Rafale ». Il faut donc croire que sémantiquement, "Neuron" signifie bien drone de combat furtif.
Cela a son importance, non seulement sur le plan opérationnel (on ne fait pas la même chose avec des effecteurs déportés qu'avec un drone armé furtif), mais également en terme de partage industriel. Les remote carriers du SCAF ayant été confiés à MBDA et Airbus DS , un véritable héritier du nEUROn restera lui plutôt dans le giron de Dassault Aviation, et plus largement de la "Team Rafale" (Safran et Thales).

Pour finir je me contenterai de reprendre mes propres mots, publiés en 2019 (déjà) : c'est sur le couple Rafale/nEUROn que doit dès aujourd'hui se construire la première itération du SCAF. Opérationnels et industriels disposent d'une occasion unique de capitaliser sur un programme de démonstrateur à succès.

Alors, verra t-on un jour un ligne d'assemblage Neuron apparaître à Mérignac aux côtés du Rafale* ? D'aucuns se rappelleront même que c'est ainsi qu'on imaginait le SCAF il y a encore une quinzaine d'années ! 


*mais des Neuron, est-ce moins de Rafale ?


lundi 5 décembre 2022

Voici venir la 6ème génération


Northrop Grumman et l'US Air Force ont très officiellement lancé vendredi 2 décembre, avec la présentation du bombardier stratégique furtif B-21, l'ère de la "6ème génération" de l'aviation militaire. La même semaine, en Europe, les projets SCAF et Tempest faisaient l'objet d'annonces significatives. 

Images: Northrop Grumman/US Air Force.


"6th Gen": ce terme très marketing (d'autant plus qu'on définit encore mal ce que sera cette fameuse sixième génération, la cinquième étant marquée par la consécration de la fusion de données), soyez prêts à l'entendre de plus en plus couramment désormais. 
Il concerne "notre" SCAF (système de combat aérien futur) et une pincée de projets semblables dans le monde. Il concerne surtout en premier lieu les programmes américains comme ce bombardier stratégique furtif B-21, ou le fameux NGAD (next generation air dominance), dont le chasseur de nouvelle génération, sorte d'anti-F35 dans l'idée, aurait bel et bien volé ces derniers mois, dans le plus grand secret. 

Développé depuis -seulement- 2015 par Northrop Grumman, le B-21 "Raider" se veut le successeur du mythique B-2 (et du B1) au sein de l'US Air Force. Nous parlons ici d'un bombardier stratégique furtif, capable donc de délivrer le feu nucléaire. Au même titre que le vénérable B-52, lorsque de tels appareils décollent, même pour des missions conventionnelles, c'est que l'Amérique envoie un message clair. 

Cette première sortie du B-21, teasée depuis des semaines, en a finalement peu révélé sur l'appareil, mais s'il s'agit bien comme attendu, d'une aile volante quadriréacteur, de taille plus réduite que celle du B-2. L'appareil reste -et restera- très secret, ses entrailles renfermant la grande partie de ses technologies clés. 

On peut cependant parier sur une furtivité améliorée, une allonge sans précédent, une électronique sans équivalent dans le monde… et, c'est important, la promesse d'une maintenance bien moins lourde (grâce aux technologies de l'industrie 4.0) que celle nécessaire pour le B-2.

Rappelons que le coût du programme s'élève à 80 milliards d'euros, que 80 à 100 bombardiers seront produits. Six sont actuellement à l'assemblage. Le coût d'un B-21 s'élèverait à 700 millions de dollars pièce (on parlait plutôt jusque ici, avec exagération sûrement, de deux milliards par avion)… ce qui ravira les fana de la loi d'Augustine !

Le B-21 devrait voler pour la première fois au début de l'année 2023. En attendant d'en savoir plus du côté du NGAD...


En Europe, accord conclu pour de bon sur le SCAF

Cette semaine historique dans l'histoire de la "6ème génération" de l'aviation de combat (je n'invente rien, les Américains le revendiquent ainsi dans leur communication) nous rappelle, presque brusquement, le niveau d'avance technologique des forces américaines. Vingt ans. Au bas mot. 

Brusquement car rappelez vous, sous la menace technologico-économique du F-35 (vendu à quasiment toute l'Europe) et de son écosystème, la France s'était montrée pro-active en poussant l'Allemagne à se lancer dans un programme de coopération européenne sur la 6ème génération, et ce dès 2017: le SCAF, ou FCAS à l'international (il y eu bien un premier FCAS, franco-britannique entre 201' et 2017). 
Un projet, pas encore programme, qui suit bon gré mal gré son cours aujourd'hui, malgré un embarrassant temps mort de plus d'un an. 

Après le vrai-faux accord de la mi-novembre, annoncé par Airbus et les partenaires allemands et espagnols, mais démenti par Dassault Aviation en France, l'accord sur la nouvelle phase d'études du SCAF a bel et bien été signé. C'est ce qu'a confirmé Dassault jeudi 1er décembre, par voie de presse puis par communiqué officiel.  

Rappelant dans Le Figaro que « Le SCAF est un projet politique lancé par le président Emmanuel Macron et la chancelière Angela Merkel en 2017, et au point mort depuis l'été 2021 », Eric Trappier, PDG de Dassault Aviation, a finalement annoncé l'accord qui confirme pour l'avionneur Français le rôle de maître d'œuvre et d'architecte du futur chasseur de 6ème génération, pièce centrale du futur système de combat aérien européen. 

L'accord ouvre la voie à la prochaine phase d'études, dite 1B, pour préparer le développement d'un démonstrateur, qui devrait voler vers 2029 (nous avons donc glissé de 3 ou 4 ans). 


Dassault Aviation, qui surfe à raison sur le succès du Rafale (la rumeur bruisse aujourd'hui sur un énorme contrat en Arabie Saoudite), aurait eu tort de lâcher prise, sur la propriété industrielle notamment, et semble se satisfaire de cet accord qui le confirme comme maître d'œuvre… tout en le consacrant donc comme champion de l'aviation de combat européenne, au sein d'un pays qui met en œuvre une force aérienne stratégique ainsi qu'une aéronavale. 

Ce qui nous amène donc à rebondir sur l'annonce américaine et la 6ème génération. La coopération européenne est un chemin semé d'embuches, de divergences culturelles, voire d'incompréhensions quand il ne s'agit pas  directement -et trop souvent- de contradictions ou de coups bas. 
Cependant, si le SCAF est bien le projet ambitieux "de 6ème génération" que ses initiateurs prétendent, celui-ci aura un coût: 80 à 100 milliards d'euros, soit le double du programme Rafale (qui a lui moins coûté que le programme de coopération Eurofighter). Il est donc vital de fédérer au plus vite autour d'une architecture politique et industrielle qui permettra de garantir la cohérence du projet, en particulier en ce qui concerne cette question du chasseur de nouvelle génération. D'autant plus que les coûts devront absolument être maitrisés si l'on tient à éviter l'écueil d'une réduction de la flotte de combat, qui ne doit pas être une fatalité.

Avec pourquoi pas l'intégration, plus tard, de junior partners, y compris hors Europe (pays du Golfe, Inde). 

Et oui, il y a toujours cette idée d'un plan B franco-français, autour par exemple, d'un "Super Rafale" qui couterait moins cher, et arriverait plus tôt. Mais le plan B est bien ce qu'il est: un plan de secours qui ne signifierait ni plus ni moins que l'abandon des ambitions technologiques initiales. 


Un mot sur la team Tempest

Décidemment. Ce vendredi 2 décembre fut aussi le jour de l'annonce d'une collaboration internationale sur le Tempest (pour résumer: le SCAF britannique). L'annonce d'une annonce en réalité, puisque nous devrions en savoir plus dans les jours qui viennent sur ce qui pourrait bien être l'intégration du programme japonais F-X (Mitsubishi) au programme britannique Tempest, dont BAE Systems a la maîtrise d'œuvre, et qui associe déjà officiellement l'Italie (via Leonardo).

Deux questions subsistent: la première concerne le véritable niveau d'ambition du Tempest, qui, même avec les Japonais (ou surtout avec les Japonais), ne pourrait au final constituer qu'un pilier international du futur NGAD américain. Tout cela reste aujourd'hui assez nébuleux et nous attendrons donc avec impatience de nouveaux éléments.

L'autre question est celle du rôle de la Suède, étonnamment absente de la dernière annonce sur le Tempest. Quelle sera sa place dans cette équation ? Le nouveau contexte stratégique en Baltique relance t-il Saab dans la recherche d'un meilleur partenariat en Europe ? 
Un axe SCAF-Stockholm n'est pas, ou plus, à écarter, car il y aura à court terme dans les forces européennes la place pour un appareil léger monoréacteur, le fameux "compagnon trainer" demandé par certains stratèges. Un appareil apte à la formation des pilotes, au red air, ou même à des missions de défense en environnement moins contesté.    


lundi 21 novembre 2022

SCAF: désaccord sur l'accord

Too big to fail ? Imbroglio sur le SCAF, qui n'en avait pas besoin. La partie allemande semble avoir un peu précipitamment annoncé un accord industriel concernant la prochaine phase de développement du programme de système de combat aérien futur européen. Calcul politique ou non, il semble bien néanmoins que l'accord sera effectivement signé dans les prochains jours. 

Illustrations: l'accord sur le SCAF tel qu'annoncé par les partenaires européens.


Décidemment, cela fait quelque temps, bientôt deux ans déjà, que la communication autour de SCAF a pris un ton essentiellement politique, pendant que dans le même temps, les industriels (en premier lieu Dassault Aviation et Airbus) bloquent sur les termes du partage industriel qui concerne(ra) la pièce centrale du système: l'avion de combat de nouvelle génération (ou NGF). 

Soyons bref : vendredi 18 novembre, après un teasing de la part de responsables dans les jours qui avaient précédé, l'Allemagne, puis Airbus (Allemagne), puis Indra (Espagne) annonçaient tour à tour un accord industriel concernant la prochaine phase du programme. L'Elysée confirmait à demi-mot dans la soirée, par voie de presse. 

En revanche, silence assourdissant du côté de Dassault Aviation. Cela pour la simple et bonne raison qu'il n'existe en réalité pas d'accord. Ou pas encore. 

En effet, Eric Trappier, PDG de Dassault Aviation, a confirmé ce matin sur RTL ce que la presse spécialisée française a dénoncé durant le week end: l'accord industriel n'est pas effectif, et la communication allemande est avant tout la conséquence de mouvements politiques propres à Berlin et à ses processus décisionnels bien moins verticaux que chez nous (sans compter que l'on soupçonne Airbus d'en avoir profité pour avancer ses pions, mettant la partie française, Dassault, devant le fait accompli).

Pour Eric Trappier, "Il y a une pseudo-annonce politique qui a été faite. Je pense que les autorisations allemandes - qui étaient difficiles à obtenir - sont sorties et ça a donné lieu à des fuites. Ce n'est pas encore tout à fait fait". Il confirme cependant durant son interview que l'accord est effectivement en bonne voie, peut-être même pour une signature dans la semaine. 

Dans tous les cas, il ne s'agira que d'une nouvelle étape de franchie. Il en reste de nombreuses, mais pour un programme estimé entre 80 et 100 milliards d'euros, la marge de manœuvre s'amenuise, et ce pour tous les acteurs. Dans le même temps, l'avion de combat américain de 6ème génération (programme NGAD) aurait volé. 

Pour plus de détails, sur les sujets qui coincent notamment, je vous invite à consulter les articles précédents sur ce sujet. Et pour la suite, rendez-vous, donc, à courte échéance, une fois que le fameux accord aura été conclu. 


vendredi 1 juillet 2022

SCAF : la nécessité d'un arbitrage politique

Voilà près d'un an que le dossier stratégique du SCAF (système de combat aérien futur) n'a pas connu d'avancées significatives. La dernière grande étape en effet, fut l'accord politique validé par l'Allemagne à l'été 2021. Depuis, les discussions entre industriels sont dans l'impasse, tandis que les sorties médiatiques s'enchaînent. L'été sera chaud.

Illustration: l'insoluble équation tourne autour du futur chasseur - montage Pax Aquitania


Cette semaine à Mérignac, Eric Trappier, PDG de Dassault Aviation, a de nouveau mis en garde: si le dossier SCAF n'avance pas, en raison principalement des mésententes franco-allemandes avec Airbus Defence & Space, l'avionneur français saura proposer seul une solution. 

Le débat tourne principalement autour du partage technologique concernant les commandes de vol du futur chasseur, véritable joyau de la couronne chez Dassault Aviation. D'autres paquets de l'accord ont bien été validés (voir précédents articles sur ce blog) au début du printemps 2021. La ligne rouge est claire: pas de codéveloppement, et une solution du best athlete qui prime. Cela semble s'opposer frontalement à la stratégie allemande, qui n'est même plus cachée, d'acquisition de compétences.
Et sur la question du "NGF" (next generation fighter), le best athlete, c'est bien évidemment Dassault qui peut légitimement s'appuyer sur l'Histoire et un programme Rafale qui mène de plusieurs longueurs sur son opposant Eurofighter. 

Or, on le comprend, la stratégie de Dassault Aviation est de maintenir une pression ferme sur Airbus, et plus généralement, la partie allemande. Cette pression, elle est aujourd'hui incarnée par le fameux "plan B". Avec un argument selon lequel la France (puissance nucléaire, et puissance aéronavale, des données qui comptent) a déjà connu cette situation par le passé, et saura de nouveau s'en sortir, en faisant un avion seul si besoin est. Elle saura également, toujours selon ce discours, le financer. 

Mais c'est bien là le problème du plan B. Tous les scénarios le concernant amènent à déduire qu'un tel programme, mené seul donc, conduira fatalement à une réduction drastique des ambitions initiales. Cela, l'opérationnel est-il enclin à l'accepter ? Et le politique ? Que deviendra le système de systèmes si la France fait cavalier seul (il faudra d'ailleurs le standardiser OTAN, a minima) ? Et ses effecteurs déportés (les fameux remote carrier) ?

Deux choses: 

Premièrement, il va s'agir de déterminer dans quelle mesure le nouveau contexte stratégique européen influe sur le dossier. L'Allemagne se découvre de nouvelles ambitions après les annonces militaro-financières du mois de mars au Bundestag, ce qui la place -supposément- en position de force. Cela ne durera à mon humble avis qu'un temps, relativement court, tant le pays est culturellement désaxé en matière de questions stratégiques (c'est même générationnel désormais). Alors certes, mais le temps manque désormais, et l'Europe connaît la guerre.
De plus, même dans ce contexte, Airbus DS n'est pour l'instant pas gagnant, et doit se battre à domicile contre ces lignes budgétaires tout entières qui vont droit à l'industrie américaine. 

Deuxièmement, quid du politique ? Ces joutes verbales entre industriels ne sont pas éternelles et à la fin, ce sera aux dirigeants d'arbitrer. Le principe du best athlete avait été validé politiquement du temps d'Angela Merkel. Il est pourtant remis en cause chez Airbus DS aujourd'hui (qui a changé de PDG entre temps), et en Allemagne plus globalement. Enfin, on oublie souvent qu'il y a un troisième partenaire, espagnol.
Notre nouveau ministre des Armées, Sébastien Lecornu, ne s'est pas encore exprimé publiquement sur le sujet, concentré sur la tâche "économie de guerre pour la BITD", mais il est plus probable que la clé se situe plutôt du côté de l'Elysée que de Balard.

Quoiqu'il en soit, les prochains mois seront déterminants pour un programme qui selon Eric Trappier a déjà pris 5 à 10 ans de retard. C'est en effet l'horizon 2045-2050 qui est visé mais là encore, il s'agit d'un discours qui ressemble surtout à un gros coup de pression.


Enfin, on se rassurera comme on peut en observant que côté britannique, le programme Tempest n'avance guère plus, avec quelques couacs remarqués. Arrive t-on à la fameuse bascule qui verra ces programmes se rejoindre ? Encore improbable, et de toute manière trop tôt pour le dire… sachant que l'on cherche avant tout aujourd'hui à éviter de complexifier d'avantage l'équation. 


lundi 14 mars 2022

L'Allemagne va remplacer ses Tornado par des F-35


Retournement prévisible à Berlin, qui éjecte finalement le F/A-18 Super Hornet au profit du F-35A dans le programme de remplacement de ses avions d'attaque Tornado. Un choix très atlantiste qui ne remet cependant pas en cause le programme européen SCAF. 

Ci-dessus: F-35 et Typhoon de la RAF britannique. Un binôme que l'on pourra aussi voir en Allemagne en 2030. 


D'abord une révélation dans la presse ce matin. Puis une annonce officielle en ce lundi après-midi: l'Allemagne fait le choix du F-35 pour le remplacement de ses Tornado avant 2030. On parle d'une grosse trentaine d'appareils à ce stade, sans précisions. 

Trois (voire quatre) enseignements :
  • Washington a tout fait ou presque pour torpiller l'offre de Boeing (le F/1-18 Super Hornet tenait en effet la corde sur ce marché en 2020) en ne permettant pas à son appareil d'emporter la bombe nucléaire de l'OTAN, la fameuse B-61 (objet à vocation purement politique aujourd'hui)...
  • … car oui, les Allemands justifient leur choix par la capacité d'emport de la B-61 par le F-35. Le "Nuclear sharing" est assuré.
  • Berlin réaffirme son engagement dans le programme européen SCAF.
  • l'Allemagne commandera d'autres Eurofighter à Airbus, avec une version de guerre électronique. Cette capacité aurait dû initialement être comprise dans la commande de F-18, avec quelques versions "Growler". 

Un danger pour le programme SCAF ?

Disons le franchement, le choix du F-35 en Allemagne n'est pas une grande nouvelle de notre point de vue français. C'est surtout un mauvais signal qu' Angela Merkel a semble t-il tout fait pour éviter d'envoyer, laissant cette responsabilité à la nouvelle coalition au pouvoir. La crise ukrainienne n'y change rien.

Et avec des F-35 partout à ses frontières (Belgique + Pays Bas, Allemagne, Suisse, Italie), il ne manque désormais plus que l'Espagne, qui aura elle un jour bien le besoin de remplacer les Harrier de son aéronavale. Il n'y aura pas 35 36 choix, ce sera le F-35B. 

En bref, les partisans français d'une Europe de la Défense souveraine s'arrachent les cheveux, car avec le F-35, ces pays de l'OTAN s'engagent dans une longue et difficile relation avec Lockheed Martin. Transferts de données tactiques, dépassements de coûts, et autres problèmes de maintenance à prévoir… mais cela, nous l'avons déjà développé. Et leur choix doit être respecté.   

Faut il s'inquiéter pour le programme SCAF (système de combat aérien futur) donc, dans lequel France, Allemagne et Espagne sont à ce stade engagés ?
Berlin réaffirme aujourd'hui son engagement dans ce programme. Il faudra bien remplacer en Europe tant les Rafale que les Eurofighter, mais politiquement, Olaf Scholz va devoir donner certaines garanties à la partie française, en poussant par exemple Airbus à enfin valider la notification de la phase 1B du SCAF qui doit mener au développement du démonstrateur NGF (next generation fighter). 

Les autorités françaises n'ont pas encore réagi. Ni Dassault Aviation qui ne cesse d'alerter -encore ces derniers jours- sur un choix allemand du F-35. 

Nous attendons donc une réponse rapide, sans quoi l'ambiance autour du SCAF pourrait largement se détériorer. Or, ce n'est plus le moment de se perdre en hésitations.


lundi 7 mars 2022

Dassault Aviation au sommet, mais inquiet au sujet du SCAF


Avec le Covid qui s'éloigne dans le rétroviseur, Dassault Aviation confirme son année 2021 exceptionnelle. Portée par le Rafale, 2022 s'annonce encore plus folle. Mais des choix stratégiques se présentent. 

Source: Dassault Aviation


Dassault Aviation présente comme on pouvait s'y attendre des résultats 2021 en hausse. Ce fut en effet une année exceptionnelle durant laquelle 100 appareils ont été commandés pour 12,1 milliards d'euros: 49 Rafale et 51 Falcon. Le chiffre d'affaires du groupe s'établit lui à 7,2 milliards d'euros. 

On notera donc que l'avionneur n'a pas inscrit à son résultat 2021 les commandes Rafale des Emirats (80), de l'Indonésie (42), ou encore du supplément grec (6). Il y a d'ores et déjà du lourd pour les chiffres de 2022 donc.

30 Falcon et 25 Rafale ont été livrés (l'Indian Air Force a par exemple quasiment toute sa flotte). 

Concernant ces derniers, Eric Trappier, PDG, confirme que l'on va bientôt passer à une production de 3 appareils par mois à Mérignac, même si "seulement"13 Rafale seront produits cette année 2022. 

Pour la France, Dassault Aviation compte sur l'année 2023 pour la commande de la Tranche 5 du Rafale (42 avions pour l'instant), à livrer à partir de 2027. 

Il réalisera aussi les commandes de vol de l'Eurodrone. 

D'autre part un 4ème Atlantique 2 a été modernisé chez Dassault, tandis qu'un 5ème (sur 7) est en phase finale.

Sur le système de combat aérien futur, le SCAF, le groupe commence ouvertement à se montrer impatient, via la parole d'Eric Trappier, qui considère que si la Phase 1B du développement n'a pas encore été notifiée, c'est en raison de l'absence de décision chez Airbus DS en Allemagne. Le PDG évoque d'ailleurs des retards actuels qui seront forcément la cause de retards futurs sur la production du NGF (next generation fighter) prévue pour 2040 dans son standard initial. 

En bref, la pression est mise sur Airbus pour une signature rapide. 

Tout cela pourrait aujourd'hui largement dépendre du nouveau contexte stratégique qui voit l'Allemagne se lancer dans un immense effort de modernisation de sa défense. Au profit du F-35 et du SCAF en même temps ? La question concentre à la fois les inquiétudes et les espoirs.


lundi 21 février 2022

Chez Airbus, premier largage en vol d'un "remote carrier" depuis un A400M


Airbus Defence & Space a mené un essai en vol fondamental dans le cadre du programme de système de combat aérien futur. Un A400M a largué un drone avec succès, préfigurant de l'avenir du combat collaboratif. 

Source: Airbus Defence & Space


Les équipes d'Airbus DS en Allemagne viennent de mener un test déterminant pour les futurs capacités du FCAS (Future Combat Air System, ou SCAF chez nous). En effet, après plusieurs mois de préparation, un gros porteur militaire A400M a déployé un drone depuis sa rampe de chargement arrière. Tout cela bien sûr, en vol. 

Sur le papier, il n'existe pas de moyens infinis de lancer un effecteur déporté (ou remote carrier dans le jargon): soit l'aéronef dispose des éléments nécessaires pour être autonome sur piste - voire catapulte - tant pour le décollage que pour l'atterrissage, soit il peut être déployé directement en vol par un chasseur, à condition bien sûr que son gabarit n'excède pas celui d'un missile de croisière comme le SCALP. Dernière solution, le larguer, possiblement en essaim, depuis un plus gros avion, comme le C-130 ou l'A400M, qui deviendrait littéralement un "porte-drones".  


Pour cette démonstration depuis l'A400M, Airbus DS a collaboré avec la Luftwaffe. Le nouveau Modular Airborne Combat Cloud Services (MACCS), également un produit d'Airbus, a permis une connectivité complète entre l'avion de transport et le drone. Tout au long du test, le drone était connecté et transmettait des données à « l'avion mère ». 
Ce transfert de données illustre comment les effecteurs déportés peuvent être connectés à un cloud de combat, jouant le rôle de senseurs/capteurs sur le champ de bataille, tout en leur permettant d'être commandés par les opérateurs des avions pilotés pendant leurs missions. Il faudra voir quel niveau d'autonomie attribuer à ces appareils, mais le champ est large.


L'essai en vol réalisé par l'avionneur européen impliquait un drone Airbus Do-DT25. Le drone a fini son vol en parachute, et n'a pas subi de dommage à l'atterrissage. Nous avions déjà pu voir ces démonstrateurs lors de précédents essais, notamment en 2018 pour un vol en essaim de 5 drones (voir lien ci-dessous). Ils ont également volé aux cotés d'un Eurofighter des forces allemandes. 



Airbus, qui est responsable des remote carriers dans le cadre du programme FCAS, a désormais de grands projets pour l'A400M dans ce domaine, expliquant que la soute pourrait emporter jusqu'à 40 drones (!) largables en essaims. Les années qui viennent seront le cadre de diverses expérimentations. 
De surcroit, l'A400M ne joue pas ici le simple rôle de "mule", mais collectant un grand nombre de données, il s'intègre à part entière dans le dispositif de combat.

Les prochain essais en vol sont prévus pour cette année.



Vidéos précédentes sur les préparatifs de l'essai en vol :