lundi 5 juin 2023

Le couple Rafale-Neuron n'a pas peut-être pas dit son dernier mot

Un amendement de la Loi de programmation militaire précise que dans les années 2030, le Rafale porté au standard F5 pourra être accompagné d'un drone issu du démonstrateur Neuron. Le temps de capitaliser sur les enseignements de ce superbe programme débuté il y a 20 ans serait-il enfin venu ? 

Ci-dessus: un Rafale Marine rejoint le Neuron en patrouille lors d'un vol au dessus du groupe aéronaval en 2016 - Dassault Aviation. 


La nouvelle Loi de programmation militaire qui couvrira la période 2024-2030 (pour un montant record de 413 milliards d'euros) est actuellement en cours d'examen parlementaire. Des débats qui nous permettent de découvrir plusieurs amendements des plus élégants: on pensera ici d'abord à l'ajout d'une étude de faisabilité pour doter le porte-avions de nouvelle génération d'un sister ship (très strictement, un second porte-avions, sans groupe aéronoval), mais aussi et surtout à cette possibilité de voir un jour le Rafale accompagné d'un drone issu du programme nEUROn. 

C'est le gouvernement lui-même qui a déposé cet amendement N°292 le 16 mai: « Le standard F5 du Rafale sera développé pendant cette loi de programmation militaire. Il comprend notamment le développement d’un drone accompagnateur du Rafale, issu des travaux du démonstrateur Neuron ». Un amendement validé le 25 mai.

On a déjà beaucoup écrit sur le Neuron sur Pax Aquitania, et sans trop s'étendre aujourd'hui concernant ce démonstrateur de drone de combat furtif européen, je vous invite plutôt à consulter le billet ci-dessous, qui incitait dès 2019 à poursuivre l'option d'un duo Rafale F5/drone furtif. Tout est encore valable !

>>> Lire sur le blog: Penser un avenir au drone nEUROn <<<


Si le tout récent standard F4 du Rafale (2023) fait entrer l'appareil dans l'ère du combat collaboratif (au sens numérique du terme) grâce à des capacités de fusion de données, c'est avec le standard F5, d'ores et déjà annoncé pour les années 2030, que se fera la vraie révolution du système de combat aérien futur. Le Rafale pourra alors être accompagné de systèmes dronisés, autonomes ou semi-autonomes, avec lequel le chasseur "habité", au cœur du cloud de combat, pourra interagir. 

Au vu de cet amendement gouvernemental dans la LPM 2024-30, deux questions peuvent être posées ? 
  1. qui a intérêt à pousser pour le développement d'un drone de combat furtif "accompagnateur" du Rafale F5 dès les années 2030 ?
  2. parle t-on bien ici d'un drone furtif strictement issu du programme nEUROn, ou bien des fameux effecteurs déportés, les "remote carriers" qui doivent accompagner en masse le chasseur du futur au sein du programme SCAF, prévu pour les années 2040 ? 

A la première question, nous pouvons répondre en rappelant que nEUROn fut bel et bien un exemple réussi de collaboration européenne entre 6 pays, chacun apportant une expertise spécifique -ainsi qu'un financement- au sein d'un environnement de collaboration innovant. Point essentiel, il n'y avait qu'un seul décideur, la DGA française, et un seul maitre d'œuvre, Dassault Aviation. Et alors que l'on a pas évoqué le programme depuis 2019, date de la dernière campagne de vol, il semble donc que la partie française (les armées ? la DGA ? l'industriel ?) n'ait pas oublié le nEUROn et ses enseignements. 
Reste à savoir avec quel œil cette nouvelle évolution sera regardée par les autres pays concernés à l'époque (Italie, Suède, Espagne, Suisse, Grèce), et si cela peut augurer d'une nouvelle collaboration fructueuse. Car quoiqu'on en dise, la taille du marché potentiel importe.

A la seconde question, il n'y pas vraiment de réponse à ce stade, en tout cas sans clarification. En commission comme dans les médias, Eric Trappier le PDG de Dassault Aviation a néanmoins donné un indice en précisant que ce serait à l'Etat de choisir quel accompagnateur il veut pour le Rafale F5, différenciant bien les « petits remote carrier, comme pour le Scaf, ou des drones de type Neuron. C'est quasiment un avion de combat qui opère en liaison avec le Rafale ». Il faut donc croire que sémantiquement, "Neuron" signifie bien drone de combat furtif.
Cela a son importance, non seulement sur le plan opérationnel (on ne fait pas la même chose avec des effecteurs déportés qu'avec un drone armé furtif), mais également en terme de partage industriel. Les remote carriers du SCAF ayant été confiés à MBDA et Airbus DS , un véritable héritier du nEUROn restera lui plutôt dans le giron de Dassault Aviation, et plus largement de la "Team Rafale" (Safran et Thales).

Pour finir je me contenterai de reprendre mes propres mots, publiés en 2019 (déjà) : c'est sur le couple Rafale/nEUROn que doit dès aujourd'hui se construire la première itération du SCAF. Opérationnels et industriels disposent d'une occasion unique de capitaliser sur un programme de démonstrateur à succès.

Alors, verra t-on un jour un ligne d'assemblage Neuron apparaître à Mérignac aux côtés du Rafale* ? D'aucuns se rappelleront même que c'est ainsi qu'on imaginait le SCAF il y a encore une quinzaine d'années ! 


*mais des Neuron, est-ce moins de Rafale ?


3 commentaires:


  1. Il faudra attendre le vrai tempo du Rafale F5:
    https://www.opex360.com/2023/06/08/pour-le-ministre-des-armees-le-rafale-porte-au-standard-f5-devra-etre-mis-en-service-a-lhorizon-2030/

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  2. Si c'est pas allemand, pas de subvention de l'UE...
    https://www.opex360.com/2024/03/27/le-futur-drone-male-europeen-pourrait-obtenir-une-nouvelle-subvention-europeenne-de-100-millions-deuros/

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  3. Cela s'annonce compliqué l'avenir pour les chevaliers du ciel...
    https://meta-defense.fr/2024/04/12/drones-de-combat-boulversement-chasse/

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