L'édition 2025 du Salon international de l'aéronautique et de l'espace, mieux connu sous le nom de Salon du Bourget (le 55ème), aura été marquée par une curieuse sensation. Celle d'être devenu un salon de défense.
Images - Thomas Schumacher / @paxaquitania, MINARM, industriels.
Le pesant parfum de la poudre flottait -ou plutôt soufflait vu la puissance nécessaire pour climatiser cette chaude semaine- dans les larges allées du Salon du Bourget 2025. Etonnant ? Oui en fait, car même en 2023, lors de l'édition qui suivait le déclenchement de l'invasion de l'Ukraine un an plus tôt, et bien que les sujets défense soient dans toutes les discussions à l'époque déjà, nous n'avions d'une part, pas le même niveau de maturation des systèmes, et d'autre part, pas ce constat d'isolement stratégique de l'Europe résultant de l'élection de Donald Trump.
Certains parmi les 300 000 visiteurs (record absolu) l'auront d'ailleurs amèrement regretté ce climat, y compris chez les professionnels, et en particulier dans le Paris Space Hub, espace géant exclusivement dédié au spatial, mais c'est tout simplement le signe des temps (ajoutons l'ambiance délétère qui régnait autour de la présence d'armes "offensives" [sic] sur les stands israéliens).
Cette année, les projets (je n'ai pas dit programmes, mais on sent tout de même de la maturité) se présentent également de façon différente, avec une propension à l'auto-financement qui, de façon limitée attention (d'autant plus que ce n'est pas possible pour tout le monde), semble inaugurer un retour à la prise d'initiatives, et donc de risques. Ou au coup politique, on peut le voir comme ça.
Problème, même en ces temps de crises et de promesses de budget géant pour la défense, l'Etat reste avare… et se contente souvent d'observer avec une prétendue bienveillance. Il faudra bien enclencher un jour attention, sous peine de casser la machine à innover, et de voir certaines idées partir à l'étranger. Cela serait bien dommage à l'heure où le catalogue à notre disposition se remplit considérablement, et de façon parfois étonnante. Il y avait en effet sur cette édition du Bourget des propositions dont les forces françaises n'auraient pas imaginé rêver il y a quelques années à peine.
Un tour en quelques grands points 👇
Dassault Aviation maître en sa demeure (sauf pour le futur AWACS)
Pour ce Bourget 2025, l'avionneur de Saint-Cloud, qui à en constater la longue file d'attente pour monter à bord des Rafale ou Falcon, reste sans conteste la star du salon, et a choisi ses priorités. Ces dernières sont énumérés dans les sorties presse du PDG Eric Trappier, et se ressentent sur les exhibitions. Pour le court terme donc, c'est le Rafale F5 (2030+). Pour le moyen terme, le drone UCAS (héritier du Neuron en 2035), et pour le long terme un appareil de combat de sixième générationun avion spatial : VORTEX !
Dassault Aviation est enfin sorti du bois sur ce sujet. L'avion spatial habité, ici en héritage direct de feu la navette européenne Hermes, c'est le grand -et prestigieux- rêve du groupe à horizon 2050, mais l'Etat (CNES, DGA, armée de l'Air), qui manque de moyens, ne semble pas totalement convaincu par cet appareil à tout faire qu'il juge très complexe, bien qu'injectant symboliquement 30 millions d'euros dans les études de développement. Dassault devrait donc aussi aller chercher du soutien du côté de l'Agence spatiale européenne, et tenter de fonctionner par étapes (la fameuse méthode itérative du new space ?!?), avec à court terme plusieurs démonstrateurs de taille réduite, puis un drone. Nous aurons l'occasion d'en reparler, car quoiqu'on en pense, le dossier est relancé !
L'Etat apporte un soutien au projet Vortex de Dassault Aviation - Photo MINARM
Concernant le Rafale, nous avons déjà un peu tout dit sur le standard F5, mais le motoriste Safran confirme s'engager dans la remotorisation de l'avion avec le M88 T-REX (9 tonnes de poussée), et Thales prépare un pod de guerre électronique. Les réservoir conformes de 1 200 litres qui donnent un look différent au Rafale étaient visibles, non pas chez Dassault Aviation, mais sur le stand du ministère des Armées, ce qui est une nuance importante. Il n'est pas dit, que pour des questions de maintenance, cette idée n'aille beaucoup plus loin que le bricolage pour la photo.
Le Rafale avec réservoirs conformes sur le stand MINARM, et la bombe AASM XLR - Photo TS.
Mais le standard F5, c'est aussi un drone de combat partenaire de mission, l'UCAS, qui selon la maquette 1:1 dévoilée est une évolution parfaite du démonstrateur Neuron. Un Neuron "durci", "lourd", si l'on veut. Ce drone furtif fera approximativement la taille d'un Mirage 2000, et sera doté d'un seul moteur, le M88 du Rafale, ainsi que du train d'atterrissage de ce dernier. Il pourra être navalisé, mais seulement à bord du porte-avions de nouvelle génération, qui disposera de catapultes électromagnétiques.
Pour la France qui manque clairement de capacités furtives, ce programme apparaît comme structurant pour nos forces aériennes et leur capacité d'entrée en premier, notamment après les démonstrations réalisées en Iran par Israël, puis par les USA.
UCAS : unmanned combat air system - photo TS
Un mot également sur le futur des AWACS de l'armée de l'Air et de l'Espace. Comme pressenti, cela se fera bien avec le système Global Eye de Saab (sur avion porteur Bombardier), la déclaration d'intention est signée depuis le 18 juin pour quatre appareils, dont deux fermes. Probablement davantage au cours de la LPM suivante.
Je plaidais ici même il y a deux ans pour une intégration de la solution Saab sur le Falcon 10X, et il semble bien que Dassault ait eu son mot à dire avant le choix définitif de la DGA. Cette dernière n'a toutefois pas été convaincue par la proposition, car les E3 Sentry de l'armée de l'Air épuisent leur potentiel à vu d'œil. Bref, il ne fallait pas tergiverser, et l'industrie française a tergiversé. Il en ressort un beau geste de la France envers l'Europe, et pour la Suède, qui fournit en capacité d'alerte avancée une puissance nucléaire, c'est un coup absolument magnifique.
Communication politique, en France puis la réponse suédoise.
L'espace en force, et la force dans l'espace
Au delà du Vortex de Dassault, l'espace était assurément l'un des grands points du Bourget 2025, avec pour la première fois, l'imposant Space Hub, mais pas seulement puisque l'armée de l'Air et de l'Espace avait aussi son showroom dédié. Le Space Hub réunissait bien sûr le CNES et l'ESA (pour son cinquantième anniversaire), ains que les start-up qui y bénéficiaient d'une visibilité accrue. Un lieu où tout ce que le spatial européen a de personnalités est venu faire un coucou. Sauf l'astronaute française Sophie Adenot, en formation à Houston, qui assisté en visio à la révélation du nom et du logo de sa mission de 2026 ("Epsilon"), lors de la venue d'Emmanuel Macron le vendredi 20 juin, visite durant laquelle le Président de la République a tenu, au sein du Space Hub, son seul discours officiel du salon, entièrement consacré au spatial donc, et à la teneur très stratégique. S'il faudra finalement attendre octobre pour avoir la nouvelle stratégie spatiale nationale (résolument orientée vers une convergence avec les alliés que sont l'Allemagne, l'Italie, l'Inde, les Emirats, et le Royaume-Uni), le sujet central sera resté celui du spatial comme "jauge de puissance". Une formule présidentielle qui restera.
Au Paris Space Hub, derrière les Agences, on pouvait trouver le stand très central d'ArianeGroup, où en plus du produit emblématique Ariane 6, l'industriel ne se gênait pas pour promouvoir sa filiale MaïaSpace bien sûr, mais aussi de façon beaucoup plus surprenante, son futur missile balistique conventionnel MBT, sa fusée sonde Sylex capable d'emporter le planeur hypersonique V-MAX, ainsi que… le missile stratégique M-51. On ne se cache plus donc.
Mais les start-up de micro-lanceurs (qui comptent bientôt quasiment 100 employés chacune) n'étaient pas en reste, la bordelaise Hyprspace présentant même une maquette de son lanceur suborbital OB-1 adaptée à la flexibilité des missions de défense. Mais nous en reparlerons.
A deux pas, Eutelsat pouvait se targuer d'avoir été complètement rattrapé dans sa chute financière par l'Etat français, qui monte à 30% au capital afin de sanctuariser la constellation de connectivité One Web, que Paris considère comme la seule alternative souveraine au Starlink d'Elon Musk. Eutelsat se voit d'ailleurs offrir 10 ans de contrat militaire avec les forces françaises.
A noter également que le Commandement de l'Espace lançait au Bourget le 19 juin le "cercle de confiance Espace", cadre de discussion privilégié avec les entreprises du secteur, avec l'idée que l'offre et la demande se rencontrent plus directement, pour ne plus perdre de temps.
Emmanuel Macron a enfin annoncé que la France organiserait début 2026 son premier "Space Summit", afin de mobiliser, dans son sens on le devine, les partenaires internationaux.
Le salon de l'aéronautique aérobalistique
Présenter une munition a pour avantage que l'on peut se déplacer indifféremment tous les ans à un grand salon français: le Bourget ou Eurosatory (le salon de l'armement terrestre). Et les munitions ne manquaient pas cette année, à commencer par la Hammer 250 XLR de Safran (photo plus haut), une AASM turbopropulsée par microréacteur Roxel, ce qui permettra à la célèbre bombe de précision française de porter jusqu'à 150 km en 2028 quand elle sera tirée depuis un Rafale, contre 50 à 70 aujourd'hui avec son booster à poudre.
Très médiatisée, mais difficilement accessible sur stand, la fameuse munition de saturation One Way Effector (OWE) de MBDA, était présentée comme le Shahed français, ce drone iranien désormais utilisé par les Russes et qui terrorise la population ukrainienne.
OWE, développée avec un droniste, devra être produite en masse (1 000 exemplaires par mois, grâce à l'industrie automobile ?), n'être pas trop chère, et agir en essaim pour découvrir, saturer, et si possible traiter les capacités de défense aérienne adverses jusqu'à 500 km de distance grâce à une charge explosive de 40 kg. Tout cela sans être brouillée grâce au savoir faire de MBDA dans la navigation et le ciblage dynamique.
Sur le même segment ou presque des munitions téléopérées, Eos Technologie (qu'on a autrefois connu chez nous à Mérignac) montrait sa gamme à microréacteur Veloce, qui est désormais intégrée au catalogue de KNDS. La Veloce 330 va entrer en phase de test au sein des forces françaises, tandis qu'Eos travaille sur "Rodeur" pour plus de portée (500 km) et d'autonomie (8h).
MBDA dévoilait aussi une maquette de lanceur à 4 silos pour la version terrestre de son missile de croisière naval, le MDCN devenu MDCT. On parle ici de longue portée pour ce missile de 2 tonnes capable de parcourir 1 000 km en subsonique. Campagne de tir prévue à Biscarrosse chez DGA EM d'ici 2 ans et demi.
Et puisque l'on parle de lanceur, Turgis & Gaillard , qui avait fait sensation avec le drone Aarok en 2023, est de retour pour combler les trous de la raquette française avec un véhicule lanceur de roquettes, dont le démonstrateur a une fois de plus été financé sur fonds propres, sur la base d'un châssis 6x6 Renault Trucks. Le système se veut rustique, aérotransportable, et surtout agnostique de missiles. Un rapport parlementaire récent préconise l'achat de 48 lanceurs.
Le lanceur Foudre de Turgis & Gaillard - Photo TS.
Je le mentionnais avec ArianeGroup, c'est le retour potentiel des capacités balistiques conventionnelles. Ariane se différencie là de l'offre MBDA, que l'on parle de missiles de croisière ou drones comme le OWE. Chez Ariane, on mise en effet avec MBT (missile balistique tactique) sur l'extra atmosphérique comme facteur différentiant, afin de ne pas être interceptée. Cela vient donc compléter l'offre des munitions endoatmosphériques de très longue portée… où Ariane développe son démonstrateur stratosphérique V-MAX, qui lui aussi est théoriquement impossible à abattre en raison de sa vitesse et de sa manœuvrabilité. Complémentaire, ou alternatif ? Cela dépendra du portefeuille, forcément conséquent, que l'Etat décidera d'allouer à ces capacités de frappe dans la profondeur.
Pour conclure, l'on notera quelques éléments, en retrait, voire carrément absents :
le SCAF bien sûr, avec une maquette de NGF -déjà vieille de 6 ans- placée en retrait, chose remarquée avec un certain étonnement par les Européens présents (je vous le traduis : cela veut dire "pas en bien"). Dassault Aviation et son PDG Eric Trappier veulent imposer une pression monstre à Airbus Defence & Space au moment de négocier la phase de développement d'un démonstrateur de futur avion de combat dont la date du premier vol semble une nouvelle fois avoir glissé (2030 aujourd'hui). Un pari osé, très critiqué par les observateurs, mais qui je l'imagine, pourrait s'avérer payant si Airbus se retrouve poussé dans les cordes. D'autant plus qu'en Allemagne, le géant Rheinmettal multiplie les coups de couteau dans le dos, enchainant les accords de production sous licence avec les Américains de Lockheed Martin (fuselage F-35 entre autres) et Anduril (drone de combat Fury). Airbus serait désormais en quête d'alliances.
Combat collaboratif. Et le NGF, en retrait… symboliquement - Photo Thomas Schumacher
Les commandes !?! Où sont les commandes ??? Chez Embraer ! Plus sérieusement, on pouvait espérer a minima 20 Rafale Air et 10 Marine pour les forces françaises, comme cela avait été suggéré dans la presse ce printemps. Et l'accord avec la Suède et Saab pour le Global Eye n'est pas encore au stade de la commande ferme (cela viendra dans les prochains mois). Sur les drones et munitions terrestres, il s'agira aussi de vraiment accélérer, afin que l'armée de Terre s'exerce.
Concernant les retards, comme je le disais plus haut, la publication de la stratégie spatiale nationale est décalée, ce sera pour octobre à Toulouse lors de l'inauguration des nouvelles installations du Commandement de l'Espace. Et si la stratégie pour la THA (très haute altitude) a bien été présentée par le ministre Sébastien Lecornu, le fameux tir sur ballon atmosphérique qui devait se dérouler en ce mois de juin n'avait toujours pas été réalisé au moment du salon. [MISE A JOUR : succès de plusieurs tirs sur ballons en THA annoncé ce lundi 23 juin !]
Eté toujours, où l'on attend le premier vol du drone Aarok de Turgis & Gaillard. Cela s'est joué à peu pour une annonce au Bourget, mais la météo en a décidé autrement à la date prévue début juin. Une question de semaines désormais, le temps de tout remettre en place. Là encore, j'attends plus d'engagement de la part de l'Etat, T&G ne pourra pas tout faire sur fonds propres. Mais le Aarok continue bien de surfer sur la hype générée en 2023, pendant que l'Eurodrone (Airbus) et le Patroller (Safran) se montraient bien timides une fois de plus. A juste titre…
Les "territoires" : difficile en effet d'exister pour la province quand les questions qui dominent concernent la géopolitique, et donc Paris, ses centres de décisions et ses sièges sociaux. On notera d'ailleurs que les start-up ou PME qui font le plus parler sont celles qui ont été prises sous l'aile du ministère des Armées ou d'un grand groupe. Difficile également sans argent public disponible au niveau régional. Difficile enfin quand on a subi la désindustrialisation, et que ce sont des capacités de production dont on a désormais besoin (par exemple : on ne parle pas cette année de faire financer et construire des usines, mais plutôt d'utiliser celles des géants de l'automobile). A oui au fait… l'Aquitaine et Bordeaux-Mérignac ont perdu Hynaero et son projet de bombardier d'eau Fregate F-100, qui filent à Istres. Mais comme dirait l'autre: "Ce n'est pas grave on va faire des dirigeables !". Heureusement il y a Eurenco, qui signe des accords structurants avec Saab en Suède, et FN Herstal en Belgique.
L'envie d'ajouter tout le secteur civil, où le choses vont bien, très bien même, mais clairement pas sous le feu des projecteurs médiatiquement parlant, surtout quand on connait la chute vertigineuse d'attention (ou pire, d'intérêt ?) que connaissent les problématiques de RSE, en premier lieu la décarbonation. Mais dans ce dernier domaine, les choses vont tout de même bon train, en particulier chez Safran. Quant aux taxis volants, il y en a peut-être deux fois moins qu'en 2023.
Les absents: les Falcon de mission dont on parle vraiment trop peu (ce qui a laissé la place au Global Eye, sur Bombardier G6000). Pas de Mirage non plus, mais les verra-t-on encore ? Tout comme les appareils d'ancienne génération comme l'ATL-2 ? Plus étonnant, l'A330 MRTT n'était pas là non plus. Quand à l'actualité hélicoptère, elle était surtout contemplative avec les vols quotidiens du magnifique démonstrateur Racer d'Airbus, que l'on voit tout de même mal trouver un marché…
Le -magnifique- Racer d'Airbus Helicopters - Photo TS
La start-up AERIX SYSTEMS dévoile officiellement le 22 avril son drone AXS-µ1, un produit dont les caractéristiques ne laissent aucun doute quant à sa finalité: les interventions tactiques militaires.
Source & images : Aerix Systems.
Nous en parlions il y a tout juste un an, Aerix Systems développe au sein de l'incubateur de Bordeaux Technowest, à Mérignac, une technologie de propulsion omnidirectionnelle pour les drones. Ces derniers deviennent ainsi plus agiles que jamais, et surtout plus robustes dans certaines conditions climatiques (en particulier face au vent). La jeune entreprise, qui continue de viser certains marchés comme l'inspection des hautes structures exposées (éoliennes, lignes haute-tension...), vise également le secteur très porteur de la défense et de la sécurité, dans lequel les drones connaissent une véritable révolution des usages dans le domaine tactique. Y compris lorsqu'il s'agit de chasser le drone adverse...
Aerix Systems dévoile donc son nouveau produit (il existe déjà une première plateforme, l'AXS-M1) : l’AXS-µ1, une plateforme d'intervention compacte développée, assemblée et testée en France. Conçue pour s’adapter aux contraintes opérationnelles, l’AXS-µ1 combine propulsions omnidirectionnelles, architecture modulaire et interopérabilité multi-supports. Le résultat est selon la start-up une agilité tactique optimale, même en environnements complexes, pour des déploiements rapides sur tous types de théâtres d’opérations.
Les caractéristiques principales du drone, selon le communiqué, sont les suivantes :
• Vitesse : jusqu’à 200 km/h.
• Endurance : jusqu’à 20 km.
• Résistance au vent : jusqu’à 100 km/h.
• Dimensions : 40 cm x 40 cm.
• Charge utile : jusqu’à 1,5 kg (reco.750g).
• Autonomie (chargée) : 15 min.
L'appareil, seul ou en essaim, peut être contrôlé via tablette ou directement avec la vision intégrée dans un casque FPV (first personn view).
Surtout, Aerix annonce être opérationnelle, avec des premières unités qui sont prêtes à être livrées. Elle lance donc un appel aux "intégrateurs, opérateurs, ou acteurs de la défense et de la sécurité, en France ou à l’international", se déclarant disposée à procéder à des démonstrations, PoC (preuve de concept) ou précommandes.
Le droniste bordelais MILTON, racheté et intégré au groupe Etienne Lacroix depuis l'automne 2023, présentait au salon SOFINS la dernier né de sa gamme de drones tactiques, le Sky Watcher. Voulu aussi polyvalent que modulaire, le système prouve que la filière française est enfin en mesure de répondre aux besoins d'un marché bouleversé depuis la guerre en Ukraine.
Projet dévoilé, mais pas vraiment montré (phase de prototypage) à Eurosatory en juin 2024, le mini-drone Sky Watcher de Milton a été présenté au salon des forces spéciales SOFINS 2025, début avril. Il s'agit du troisième drone tactique pour la PME bordelaise d'une trentaine de salariés -dont 15 ingénieurs- qui a été rachetée en 2023 par le groupe de défense Etienne Lacroix.
Bien que considéré comme un drone tactique, le quadrirotor Sky Watcher se veut avant tout compact (ses rotors sont pliables, ses patins démontables), et capable d'être opéré par un seul homme muni d'un sac à dos, en quelques minutes.
Pour développer son nouveau produit, Milton a bien évidemment pris en compte le retour d'expérience du conflit ukrainien, avec un appareil qui se veut à la fois robuste (électroniquement parlant) et ultra fiable, tout en étant extrêmement modulaire et facile à produire. Son autonomie est d'une heure jusqu'à 10 kilomètres, avec une capacité d'emport de "plusieurs kilos" (autour de 3 a priori, en plus de la boule optronique).
Niveau emport justement, c'est sa modularité qui doit faire sa force en termes de charges utiles tactiques : boule optronique (le catalogue est varié), charge ROEM (renseignement d'origine électromagnétique), et le fameux DLC, un dispositif de libération de cartouches capable de délivrer différents types de grenades de 40 ou 56mm, fumigènes, incapacitantes, ou même pyrotechniques.
A noter que Milton travaille d'arrache bien sur la robustesse de ses liaisons de données. Il n'est à ce stade pas envisagé de doter le drone d'un système filaire à fibre optique comme on peut le voir sur le front ukrainien, un des seuls moyens infaillibles face au brouillage.
Des efforts de R&D, au niveau de la miniaturisation notamment, ont spécifiquement été fournis par l'entreprise afin d'intégrer des capteurs & antennes GNSS. Les équipes ont également développé un nouveau système de “batterie intelligente” avec un partenaire français (tout le système est naturellement ITAR FREE).
Comme tous les drones de Milton (LRO, SkyKeeper) le Sky Watcher sera opéré à partir de l’une des trois stations sol de la gamme GCS Milton. Les logiciels (opérations, simulation, formation) sont aussi développés par l'entreprise. Ils intègrent d'ores et déjà les cas de figure de pilotage en essaims.
Le Sky Watcher sera commercialisable dès la fin de cette année 2025.
Une filière drones française enfin structurée ?
Dans les allées du SOFINS, il y avait un certain nombre de drones, mais pas autant qu'on pourrait le penser, d'autant plus que finalement, ils sont peu parmi les Français à avoir atteint la maturité nécessaire en termes de R&D comme d'offre commerciale sur ce segment. Surprenant, quand on sait que la filière drones a eu plus d'une décennie pour se développer après les terrifiants constats d'échec du début des années 2010. Au tournant de 2020, elle [la filière] semblait pourtant encore se chercher, et c'est le grand bouleversement apporté par l'invasion de l'Ukraine en 2022 qui a changé la donne.
Désormais, les objectifs, ou plutôt devrais je dire les exigences, ont changé, alors que l'Etat entend expérimenter à tout va. Les produits (et cela concerne en particulier les drones, soudainement devenus la nouvelle AK-47 du combat futur) doivent non seulement répondre à des besoins, des missions prioritaires sur le terrain des opérations, mais aussi offrir des capacités de modularités, d'évolution rapides (une technologie peut aujourd'hui être obsolète en un mois sur le front ukrainien), et bien entendu de production de masse sans précédent. S'agissant de cette dernière question, le prix devient de facto un argument clé à l'heure du low cost et du "consommable". Chez Milton, on assure ne pas être très éloigné des prix pratiqués par les Chinois.
Et tandis que les grands de l'aéronautique, comme Thales, Safran ou Airbus ont dû s'adapter, voire se réinventer (certains d'entre eux n'ont d'ailleurs pas du tout terminé ce cheminement), des acteurs comme Milton avec Eugène Lacroix, ou tout dernièrement Hexadrone avec Rivolier, ont eu la chance d'intégrer de solides projets au sein d'ETI qui cherchaient à mettre un pied dans ce domaine forcément porteur, car stratégique, ce qui leur apporte enfin la colonne vertébrale nécessaire à un développement plus serein, centré sur l'innovation permanente.
On pensera également à d'autres entreprises, comme EOS ou Delair, qui ont su convaincre et embarquer dans des programmes structurants de l'Agence de l'Innovation de Défense, sous la tutelle de grands comme MBDA et KNDS. La preuve avec ce dernier point que ce segment du ciel est désormais mieux appréhendé par les spécialistes du combat (aéro)terrestre que par ceux de l'aéronautique ? Nous aurons l'occasion de nous reposer la question au prochain salon du Bourget.
Pour ce qui nous concerne sur le blog, les drones continueront de rester un sujet tout au long de cette année, puisque se déroule à la rentrée prochaine à Bordeaux une nouvelle édition du salon UAV Show, où le militaire prendra une place certaine, et même inédite pour cet événement. Nous y retrouverons quelques locaux, dont la prometteuse start-up Aeryx Systems.
Ci dessous en image sur le salon, le Sky Watcher de Milton, ici replié et équipé :
Autre exemple de système prometteur, chez Hexadrone (source Mars Attaque blog):
Mais aussi, la munition rodeuse Toutatis de Thales, qui se tire depuis un mortier :
La société bordelaise Icarus Swarm a testé aux côtés de l'armée de Terre la mise en oeuvre d'essaims de drones depuis des véhicules blindés.
Images : armée de Terre / Icarus Swarm.
Icarus Swarm est une PME bordelaise à la notoriété plutôt confidentielle, mais vous les connaissez peut-être sous le nom de leur société sœur -ou plutôt mère- Dronisos, spécialiste des spectacles géants impliquant des milliers de drones. Depuis la déclenchement de la guerre en Ukraine en effet, et l'impact que constitue la révolution des drones sur le champ de bataille, Dronisos a fondé Icarus pour mettre à profit son expérience des essaims de drones dans une collaboration avec le monde de la défense.
Présente en Californie pour l'exercice multinational "Capstone 5" (Etats-Unis, Royaume-Uni, Australie, Canada, Nouvelle-Zélande), consacré à la robotique et à ses ruptures, Icarus Swarm et la 13e DBLE (demi-brigade de blindés légers) ont mené des essais grandeur nature en installant des "ruches" directement sur le toit d'un blindé Griffon de l'armée de Terre. Le test incluait aussi un 4x4 Masstech.
Ouverte, planifiée, participative … Zoom en vidéo sur quelques innovations de l’Armée de Terre.
— Commandement du combat futur (@CombatsFuturs) March 19, 2025
Même si l'exercice impliquait une zone plutôt réduite (quoique, les opérations drones vs drones en Ukraine se limitent à une bande de quelques kilomètres d'épaisseur), on comprend ici tout l'intérêt de s'exercer au déploiement et à l'action rapide (environ 20 minutes tout compris) pour une équipe d'opérateurs à bord de deux véhicules seulement.
La campagne touchait au domaine du C2, le Command & Control. Dans cas d'espèce en effet, pas de drone suicide, ou du moins pas encore, mais un essaim qui durant le survol d'une zone, permet sa modélisation en trois dimensions, au service des planificateurs.
Plus généralement, la maîtrise de cette capacité à déployer des essaims, qui va bien au delà de l'utilisation faite aujourd'hui (1 opérateur pour 1 drone), est évidemment urgente.
Un mot rapide pour signaler une double parution: d'une part cette étude de l'IFRI particulièrement interessante, datant de la fin du mois de janvier. Et d'autre part la synthèse de cette dernière que j'ai réalisé sur un blog secondaire, pour ceux qui n'auraient pas le temps de digérer les 116 pages du document. Suivre CE LIEN !
Alors que la Syrie connait enfin, on l'espère, le dénouement de sa guerre civile, appelée désormais révolution, la France a rappelé le 31 décembre 2024 qu'elle maintenait la pression militaire sur le groupe Etat islamique. Des frappes aériennes ont en effet été réalisées par l'armée de l'Air à l'aide de Rafale et d'un drone Reaper.
C'est le type d'exercice de communication auquel on s'était largement habitué durant ce premier quart de siècle, mais qui se faisait beaucoup plus rare dernièrement, notamment depuis le retrait partiel (et bientôt total) des forces françaises de leurs bases africaines. Le -toujours- ministre des Armées, Sebastien Lecornu, a annoncé mardi 31 décembre, vidéo à l'appui, que l'armée de l'Air et de l'Espace avait frappé deux positions du groupe Etat islamique (EI) en Syrie dans le cadre de la coalition anti-jihadiste internationale. Il s'agit de la première opération de ce type depuis deux ans.
Ce sont des Rafale et un (des) drone(s) Reaper qui ont participé à l'opération, depuis la Jordanie, où la France dispose d'une base aérienne projetée depuis une décennie. 600 hommes et femmes sont toujours impliqués sur Chammal, essentiellement depuis la Jordanie, les Emirats Arabes Unis, et plus confidentiellement, l'Irak. Le dispositif est aussi renforcé par la Marine lors des passages dans la région du groupe aéronaval.
Malgré l'actualité brulante sur la zone (Syrie, Liban, Israël/Palestine, Iran… Yémen), il est vrai que l'on parle moins de l'activité aérienne française sur zone. Elle demeure importante et parfois intense, puisque même si la France n'avait pas frappé Daesh depuis deux ans, des appareils français avaient participé au printemps 2024 à la défense d'Israël face aux salves de missiles et drones tirées depuis l'Iran.
Et voilà donc que l'on a enfin des nouvelles officielles de la flotte de drones MQ-9 Reaper en opérations. Après le départ -ou même l'expulsion- du Niger à l'été 2023, il se murmurait que l'activité opérationnelle des Reaper se concentrerait désormais sur le Moyen-Orient, avec comme base la Jordanie. Or, ayant personnellement tenté de me renseigner auprès de l'escadre concernée, ses représentants n'avaient à l'époque pas souhaité commenter l'actualité. La preuve est désormais établie qu'une partie des drones opèrent bien désormais depuis la Jordanie.
A noter qu'en France, le standard Block 5 vient d'être qualifié pour les vols au dessus du territoire métropolitain. Les Reaper sont basés au sein de la 33ème escadre à Cognac, qui comptabilise 12 de ces appareils.
Au fait, j'en profite pour vous souhaiter, chères lecteurs et lectrices, une excellente année 2025 ! En espérant que certaines situations très chaudes le soient nettement moins à la fin de l'année qui débute.
La start-up AndroMach s’installera à Mérignac au printemps 2025. Dans ses cartons, un projet d'avion spatial inédit en France. Une capacité réutilisable d'emport, et de retour, qui pourrait intéresser le monde de la recherche en microgravité, ainsi que la défense.
Ci-dessus: vue d'artiste du drone spatial suborbital d'AndroMach.
C'était un secret de polichinelle, puisque la start-up AndroMach disposait d'un stand bien visible -avec maquette !- sur les événements bordelais de la rentrée aérospatiale, mais c'est dans un article de La Tribune Bordeaux en date du 30 octobre que l'information a finalement été rendue publique: le premier avion spatial français devrait être conçu à Bordeaux, ou plutôt à Mérignac, puisque c'est la technopole Bordeaux Technowest qui accueillera la start-up courant mars 2025 dans les murs de son nouveau QG, le "Cockpit".
AndroMach, qui réunit aujourd'hui en région parisienne un peu moins d'une dizaine d'employés, a pour ambition de développer un avion suborbital (200 km d'altitude) de 4 mètres de long pour 1,2 mètre d'envergure, capable d'embarquer en soute une charge utile de 10 kilos dès 2026. Pour commencer… car en cas de succès, des évolutions importantes sont d'ores et déjà prévues au sein d'une roadmap comprenant les dates de 2028 (150 kg en orbite, avec l'aide d'un microlanceur "partenaire") et 2031 pour des développements itératifs, avec notamment un aéronef plus imposant (18m) capable d'emporter 600 kg sur orbite héliosynchrone.
Pour la start-up qui a mené depuis un an ses études de faisabilité, et qui vient de réaliser sa première levée de fonds, les essais de propulsion et d'aérodynamique auront lieu début 2025. Son installation au Cockpit pourrait ensuite s'accompagner de quelques recrutements.
L'avion spatial est un sujet qui fascine autant qu'il peut décourager. La technologie intéresse un nombre assez important de start-up, mais n'est réellement maitrisée qu'au sein des armées américaine et chinoise. En France, le ministère des Armée a pu évoquer il y a deux ans la volonté de mener des études sur le sujet, qui auraient pu aboutir à ce que l'armée de l'Air et de l'Espace se dote un jour de son propre "X-37B" (le fameux drone spatial de l'US Space Force). Il semble cependant que le sujet soit au point mort.
Ajoutons enfin, bien sûr, qu'il est de notoriété publique que Dassault Aviation est activement concerné par la question, pour des usages ambitieux qui iraient jusqu'au vol commercial habité.
Car l'avion spatial a, sur le papier, des avantages évidents en termes de réutilisabilité, de besoins réduits d'infrastructures (une mission suborbitale pourrait être entièrement menée depuis une base aérienne), ou encore d'emport -et de retour intact- de charges utiles.
Concernant les missions justement, AndroMach communique sur le fait que le premier véhicule suborbital pourrait trouver des usages dans le domaine des recherches en microgravité, un domaine également visé par la luxembourgeoise Space Cargo Unlimited. Quelques minutes à 200 km d'altitude et l'opportunité de développements pour le secteur pharmaceutique, biologique, ou même informatique.
A échéance plus lointaine, sur orbite basse, et pour des missions de plusieurs jours ou mois cette fois, s'ouvrent les marchés de l'intervention sur des satellites, vaisseaux spatiaux, ou débris (maintenance, réparation, désorbitation…). Ceci dit, est ce vraiment un marché porteur ?
Et il y a, bien entendu, la défense qui faute d'un grand programme national de drone spatial, pourrait trouver dans les projets de cette start-up une solution souveraine estampillée "new space". Ce domaine est explicitement évoqué par les fondateurs d'AndroMach.
Mais pour en arriver là, de nombreux défis techniques, qui touchent à la structure de l'aéronef comme à sa propulsion, seront à surmonter, le drone devant évoluer dans des milieux (la haute atmosphère et l'espace) où les contraintes sont intenses. Le design exposé à ce jour présente en tout cas des aspects très intéressants, tout comme la démarche itérative.
Les centres d'essais, la pièce maîtresse du territoire Bordelais
A ce stade, il s'agit là d'un nouveau joli coup pour l'agglomération (avec encore le travail remarquable de Bordeaux Technowest et de l'agence Invest in Bordeaux) qui attire un projet que l'on pourrait qualifier "de rupture". Après Hynaéro (projet de "Canadair" français), The Exploration Company, HyprSpace ou encore Dark… ce ne sont pas les ambitions qui manquent.
Ce qui a convaincu AndroMach ? La proximité des sites disponibles pour mener des essais de propulsion: « Pour les essais opérationnels, propulsion et essais en vol, toutes les infrastructures sont disponibles sur le territoire », peut-on lire dans La Tribune. Outre la proximité, pratique, de l'océan, il faut dire en effet que l'ouest bordelais dispose d'un sacré héritage en matière de structures dédiées à la pyrotechnie.
Cet argument, on le retrouve d'ailleurs partout chez les pépites du spatial ces derniers mois sur le territoire. Récemment, c'est d'ailleurs The Exploration Company qui a montré son nouveau banc d'essai de Mérignac (images ci-dessous), mis en place durant l'été sur un ancien site à Mérignac. Déjà impressionnant de maîtrise, et destiné à grossir dès l'an prochain.
Plusieurs annonces importantes sont tombées ce mardi 8 octobre, et elles concernent en particulier l'armée de l'Air et de l'Espace, et ses systèmes futurs. Hasard du calendrier, les technologies en question sont toutes au cœur de l'actualité stratégique brulante.
Sur la base aérienne 113 de Saint-Dizier pour les 60 ans des Forces aériennes stratégiques (c'est en effet le 8 octobre 1964 qu'un Mirage IV décollait pour la première alerte des forces aériennes stratégiques depuis la base aérienne 118 de Mont-de-Marsan), le -toujours- ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a annoncé une "évolution majeure pour la dissuasion nucléaire aéroportée française".
Cette évolution, c'est le nouveau standard du Rafale, le F5, qui emportera le futur missile nucléaire ASN4G. Et si l'annonce n'arrive que ce 8 octobre, cela fait en réalité "plusieurs mois" que Dassault Aviation s'est vu confier le premier contrat de développement par la DGA. Le Rafale F5 est attendu dans une dizaine d'années.
Cette annonce ne vient pas seule, puisque le ministre a également confirmé le lancement du programme de drone de combat furtif, "qui sera opéré directement depuis le cockpit du Rafale". Ce drone constituera l'héritage du programme de démonstrateur nEUROn, mais l'appareil qui en résultera devrait être largement différent. Ce drone est attendu pour 2035, si l'on se réfère aux propos tenus lors du salon du Bourget en 2023.
C'est probablement un pur hasard du calendrier, ce partenariat Rafale-Drone étant imaginé de longue date, mais ce programme 100% français débute officiellement alors que la Russie a perdu en Ukraine le 5 octobre l'un de ses rares drones de combat furtif Soukhoï S-70 Okhotnik-B. Le drone a visiblement été abattu à courte portée -via l'usage d'un missile IR- par l'appareil qui l'accompagnait (un SU-57 ?) car il était devenu hors de contrôle et se dirigeait de l'autre côté de la ligne de front. Trop tard puisque ses restes ont néanmoins été récupérés en zone ukrainienne...
Premier tir réussi pour l'Aster 30 B1 à Biscarrosse
Avant de se rendre à Saint-Dizier, le ministre était présent sur une autre implantation mardi matin, le Centre d'essais militaires des Landes (DGA essais de missiles).
Il y assistait en effet au premier tir du système franco-italien de nouvelle génération, le SAMPT-NG avec son missile Aster 30 B1 "Nouvelle technologie" (NT). La grande particularité de l'évolution du "Mamba" sera sa capacité à pouvoir intercepter les missiles hypersoniques. Une question devenue essentielle dans le contexte stratégique actuel, alors qu'Israël vient de subir deux attaques balistiques massives venues d'Iran, et que la défense sol-air ukrainienne est mise à l'épreuve quotidiennement depuis février 2022.
Et c'est en tout début de soirée que l'on a appris (via le communiqué et la vidéo ci-dessous) que l'essai avait été mené avec succès. A ce stade, aucune information sur la cible qui a été utilisée, mais pour un premier tir, il s'agissait probablement d'un drone-cible standard. Loin de la gamme hypersonique donc…
La maîtrise du ciel est vitale et se joue dans les airs comme au sol.
Étape importante franchie ce matin sur le site de Biascarosse de la @DGA : succès du premier tir d’essai du missile Aster 30 B1 Nouvelle technologie.
Un dernier mot sur une autre mission de la DGA, confirmée par le ministre ce mardi. Il s'agit de la modification à Cazaux chez DGA Essais en vol des Mirage 2000-5F que la France va céder à l'Ukraine au premier semestre 2025. Ils y seront équipés d'armements air-sol et d'une suite de guerre électronique renforcée.
Le chantier naval girondin Couach annonce un partenariat avec la filiale de Naval Group, Sirehna, dans le domaine des drones de surface de petite taille. Le prototype de son premier USV doit être mis à l'eau prochainement.
Ci-dessus: vue d'artiste du drone de surface "Magellan" - Couach
L'annonce officielle n'est arrivée que ce 29 août via la communication des entreprises, mais c'est bien depuis le mois d'avril que le partenariat entre Sirehna et Couach (qui travaillent ensemble depuis 2 ans déjà) a été conclu, avec l’ambition de développer pour les marines une offre complète intégrant drones et systèmes autonomes, afin d’accroître la capacité opérationnelle des forces navales par des solutions innovantes, éprouvées et compétitives.
Signalons qu'outre cette filiale Sirehna, Naval Group, qui constate "un accroissement du nombre de conflits de haute intensité", a également crée début 2023 unedirection Drones, Systèmes autonomes et Armes sous-marines (DSA) au sein de l'entreprise.
Le partenariat annoncé, lui, repose sur l'expertise approfondie de Sirehna et Couach dans leurs domaines respectifs: "Sirehna apporte 40 ans d’expérience dans la dynamique des plateformes navales, dont plus d’une décennie sur les technologies de téléopération de navires", tandis que "Couach apporte son expertise historique de la conception et la construction de navires sur mesure et en série, civils comme militaires."
Ensemble, le duo français veut offrir des produits prêts au combat, rapidement déployables mais aussi ultra-compétitifs.
Sur ce blog, cela fait bien des années que nous n'avions plus traité l'actualité du chantier naval Couach, basé sur le Bassin d'Arcachon, et spécialiste des yatchs, mais aussi des petits navires militaires comme les patrouilleurs.
Or, il se trouve que la PME développe depuis plusieurs années un drone de surface, le "Magellan", dont elle doit prochainement mettre à l’eau le prototype. L'engin (en photo) mesure 6 mètres de long et est construit en kevlar et carbone.
On les avait découverts sur ce blog début mars, et voilà qu'Aerix Systems, droniste incubé à Mérignac chez Bordeaux Technowest, se dinstingue déjà en remportant au grand salon de l'armement Eurosatory 2024 le Trophée du prix innovation du GICAT !
Ci-dessus: vue d'artiste du drone hypermanoeuvrable d'Aerix Systems
Si le drone est très à la mode sur les salons de l'armement, encore faut-il pouvoir se démarquer au milieu de la mêlée. Cela semble déjà chose faite pour la start-up Aerix Systems, qui mercredi 19 juin s'est vue remettre par le Président du GICAT (le groupement industriel de l'armement terrestre), Marc Darmon, et par le directeur de l’Agence de l'innovation de défense (AID), le Trophée du prix innovation du GICAT à Eurosatory.
Ce concours réunissait les jeunes entreprises présentant des innovations duales dans la Défense et la Sécurité. Pour cette édition, Aerix Systems "a conquis le jury avec sa technologie disruptive de propulsion de drone omnidirectionnelle".
L'innovation autour de la solution baptisée "AXS-M1" est la suivante: une nouvelle propulsion, inspirée d’un gyroscope, dite omnidirectionnelle, permettant de décupler les performances des drones avec des caractéristiques de vol spécifiques. Selon ses concepteurs, la plateforme omnidirectionnelle facilite le contrôle et l’intervention de part sa grande résistance aux intempéries tout en réalisant des mesures de contact de précision via sa stabilité et manœuvrabilité à 360°. La plateforme induit de nouveaux moyens d’observations et de mesures (coque de bateau, aile d’avion ou bâtiments) par l’utilisation d’une technologie passive et active insensible aux prises d’air et effets de bord.
Il est donc ainsi permis d’accroitre les méthodes d’intervention civile et/ou militaire par l’optimisation des déplacements en fonction des caractéristiques environnementales (par exemple, le mauvais temps qui limite aujourd'hui grandement le vol des drones), de terrains et de missions.
Le même jour, Aerix Systems annonçait la signature d’un MoU avec SBG Systems, fournisseur de solutions d’orientation, de stabilisation et de navigation permettant à l’AXS-M1 un haut niveau de précision et de fiabilité.
Eurosatory 2024 ouvrait ses portes ce matin. L'occasion pour l'industrie mondiale de l'armement terrestre et aéroterrestre de montrer sur le plus grand des salons leurs dernières nouveautés. Ici, nous choisissons de commencer avec Arquus et son premier robot armé, le "DRAILER".
Images: Arquus
Le concept de remorque autonome destinée au véhicule 4x4 Scarabée était visible sur les maquettes depuis plusieurs années, mais alors qu'on sait désormais que le superbe blindé d'Arquus restera très probablement à l'état de démonstrateur, et donc non candidat au programme VBAE de l'armée de Terre (véhiucle blindé d'aide à l'engagement) que l'on attend pour 2030, revoilà au moins… la remorque !
Arquus, dont la fusion avec John Cockerill Defencedevrait être effective dans les prochaines semaines (en réalité un rachat par le Belge à Volvo Group, maison mère d'Arquus), performe avant tout dans le secteur des engins de transport ou de logistique -comme le prouve le récent marché des camions citerne de l'armée remporté en France- mais dans le même temps, elle ne cesse de prouver qu'elle sait innover dans le domaine des missions de combat. Et en matière de combat futur, quoi de plus exploratoire que la robotique terrestre ?
Les drones terrestres (ou UGV: unmanned ground vehicules), chenillés ou à roues 4x4, 6x6, 8x8... sont à l'essai depuis plusieurs années, y compris sur le champ de bataille, qu'il soit syrien ou ukrainien, sans pour autant avoir vraiment convaincus jusqu'à maintenant. Comment faut-il les employer ? La doctrine ultra dominante semble bien être celle de l'éloignement de l'homme du risque, ou autrement dit, l'envoi de ces machines en avant des hommes, pour de la reconnaissance et du "dérisquage", comme va nous le montrer la vidéo promotionnelle ci-dessous. C'est également ce que l'on a pu voir sur le front ukrainien, où les UGV se font décimer depuis le ciel par les redoutés drones suicides "FPV".
En France, on avait vu Nexter (aujourd'hui KNDS) s'afficher avec le robot chenillé Themis de l'estonien Milrem, ou encore Shark Robotics proposer sa mule 4x4 Barracuda. Citons aussi Unac ou Safran qui développent des modèles à roues, et collaborent même ensemble.
Et voici donc Arquus :
DRAILER, que l'on découvre dès le début de la vidéo de présentation comme étant remorquée par un blindé 4x4, est avant tout un drone.
En effet, pouvant effectuer les tâches de mule (emport d'équipements du fantassin visibles sur les images) et de plateforme d'appui feu grâce à son tourelleau téléopéré HORNET de calibre 12.7 (un produit phare de la maison, que l'on retrouve sur d'autre robots et véhicules sur le salon), DRAILER est un véhicule assez massif de 1,6 tonne qui est piloté à distance par un opérateur doté d'une console de commandes. La vidéo insiste bien sur le rôle du robot: prendre le risque à la place de l'homme, avec, fait marquant, c'est à la fin l'homme présent physiquement sur le front, et seulement lui, qui appuie sur le bouton au moment d'ouvrir le feu.
S'agissant des missions, sur le papier, DRAILER peut tout faire ou presque: soutien à l'infanterie, déminage, guerre électronique, lutte anti-drone Armement et fonction de mule comprises, il peut emporter 700 kilos.
Le véhicule démontre sur les images une assez nette capacité de mobilité, ce qui le rend a priori un peu plus punchy que les nombreux UGV vus depuis une dizaine d'années. Sa motorisation est électrique, et même probablement hybride (je n'ai pas la confirmation à cette heure) comme bien des modèles d'UGV en Occident, ce qui lui permet d'atteindre les 20 km/h avec 200 km d'autonomie. Attaché à un véhicule, en mode remorque, il supporte une vitesse jusqu'à 90 km/h.
Il faudra voir attentivement où va ce programme, voir ce que la France ou un autre pays décidera d'en faire, car pour le moment, l'intégration de plateformes armées semble poser des problèmes juridiques ou éthiques. Des faux problèmes en fait... mais l'on sait combien de temps nous a fait perdre l'absence de choix doctrinal, puis politique, de l'usage d'abord, et de l'armement des drones aériens ensuite.
EOS Technologie a profité avec d'autres dronistes français d'un "Démo
Day" précédant le salon Eurosatory pour montrer ses fameuses munitions
téléopérées. Et grande nouveautés, celles-ci volent en essaim.
Avec EOS Technologie les choses vont vite, très vite. La PME qui était quasi inconnue
avant sa présélection pour le programme Larinae de l'Agence pour l'innovation
de défense en 2022, fait le buzz cette année depuis la présentation de sa MTO
(munition téléopérée) "Veloce 330" en avril dernier. D'autant plus que grâce à
sa méthodologie de travail dont la force est l'innovation rapide, elle
dispose déjà de plusieurs autres solutions de drones à son catalogue, toutes
développées et testées en quelques mois: Stryx 425 et 500, Endurance 1200...
puis Veloce 330, Istar 330...
Et une semaine après être apparue aux côtés de Thales Group qui
présentait de son programme d'écosystème Drone warfare, la start-up
dont le siège est encore à Mérignac (lire plus bas), participait en Auvergne
au "démo day" préparant le salon de l'armement terrestre Eurosatory qui
lui se déroule à Paris la semaine prochaine.
L'écosystème Drone Warfare de Thales (cliquer pour agrandir)
En vidéo (cliquer sur le lecteur si elle ne s'affiche pas),
les solution ISTAR/VELOCE 330 :
Outre la démonstration publique -aux journalistes et professionnels- du
Veloce 330, drone et/ou munition (autrement appelée "missile low cost") pouvant être doté par KNDS d'une charge explosive
allant jusqu'à 6 kg, suffisant pour aller frapper un char à 100 km sans que
l'ennemi n'ait le temps de mettre en place de contremesure, tant la…
vélocité du drone est impressionnante (4 à 500km/h en vitesse de pointe),
le démo day a permis de découvrir une nouveauté: le vol en essaim.
En à peine quatre mois en effet, EOS et la
toulousaine Cloudskeyes ont travaillé sur la présentation
d'une solution d'essaim de munitions rodeuses. Pari réussi puisque ce 11
juin, 5 drones volaient ensemble, ce chiffre pouvant monter jusqu'à 10
aujourd'hui, avec rupture de la formation aérienne pour traiter au sol des
cibles d'opportunité avec une précision métrique. La technologie est
embryonnaire, mais déjà prometteuse. Elle sera affinée et enrichie afin
notamment d'intégrer des éléments d'intelligence artificielle. Un
partenariat qui en appelle d'autres, peut-être même avec un développeur
de drone qui avait fait sensation lors du dernier salon du Bourget...
Études en cours entre Turgis & Gaillard et EOS Technologie pour l'emport de 2 à 4 munitions télèoperées Veloce sous le drone Aarok : drone mère qui apporte de l'allonge aux drones filles, station relais coms, diversification des charges emportées... A suivre sur Mars Attaque pic.twitter.com/Nt6jNM3cvY
Cette MTO capable de voler en essaim se nomme SR 200, et se base sur l'architecture du Veloce 330 et de
l'ISTAR 330, tout en étant bien plus petite, "200" et "330" donnant des
indications sur l'envergure en centimètres de ces engins lançables sur
catapulte ou à la main. La charge tout comme l'autonomie y seraient donc
moins importantes, tout cela classant le drone dans la gamme correspondant
au programme COLIBRI et non plus LARINAE. Si aboutissement commercial il y a, le but sera
de produire vite, et massivement: des milliers d'exemplaires par an.
EOS, qui a été fondée par d'anciens opérationnels, semble avoir totalement cerné les impératifs imposés par le contexte stratégique actuel.
EOS va quitter Bordeaux
A noter que parmi toutes ces nouvelles encourageantes, il y en a une mauvaise
(à relativiser puisque ce blog compte bien continuer de suivre la
success story de l'entreprise) :
EOS Technologie quittera Mérignac dès le mois de septembre, afin de se
renforcer à Grenoble, où elle est historiquement implantée. La PME juge
qu'elle y trouvera de meilleures conditions de développement: réseau,
infrastructures, et même emploi.
La greffe bordelaise n'a pas prise. Son principal avantage était de rapprocher
l'entreprise alors naissante des régiments de forces spéciales du
sud-ouest. Mais l'histoire se poursuivra donc en
Isère.