Le groupe franco-allemand KNDS entend s'imposer comme leader incontestable des robots militaires en Europe. Il dévoile pour l'occasion une image d'un 4x4 robotisé doté de l'impressionnant tourelleau ARX30.
Image: KNDS
On termine la semaine comme on l'avait commencé: avec un robot. L'occasion de préciser que nous n'évoquerons pas sur ce blog la grosse activité "chars" de la co-entreprise franco-allemande KNDS car d'autres le feront bien mieux que moi (comme Blablachars ICI et ICI). Peut-être également car je ne suis pas vraiment optimiste pour l'avenir de la composante chenillée française, que je ne vois pas revivre avant l'hypothétique réalisation du programme MGCS (Main Ground Combat System) vers 2045. Avant de rêver Leclerc "Evolution" donc (révélé à Eurosatory 2024), il faudra se contenter du XLR, dont on suppose -déjà- que le nombre sera moins important que prévu…
Mais revenons à nos robots, à qui, même si la doctrine d'emploi reste véritablement à affiner et préciser, outre le sempiternel "éloigner l'homme du risque", j'accorde un avenir un peu plus actif dans les toutes prochaines années.
Nous avions en début de semaine présenté le DRAILER d'Arquus, mais les travaux -français- en matière de 4x4 autonome ou téléopéré ne s'arrêtent pas ici, puisque KNDS montre depuis quelques mois les performances en mobilité de son châssis "CENTURIUS", issu du programme de démonstrateur PHOBOS. Il vient s'ajouter à un catalogue de plus en plus fourni chez KNDS (Nerva, OPTIO, ULTRO...).
Aussi, nous découvrons via un court communiqué diffusé ce 21 juin par le groupe industriel, et sobrement intitulé "KNDS, futur leader européen des robots militaires", le CENTURIUS équipé d'un canon téléopéré ARX-30, de 30mm, ce qui en ferait un bel outil d'appui feu pour les fantassins, y compris contre la menace des drones. On sait aussi que le CENTURIUS peut accueillir des calibres moins importants comme le 20mm (tel qu'exposé à Eurosatory 2024) ou le 12.7mm. Le tout environne une masse de deux tonnes.
Enfin, sachez que le communiqué de KNDS se termine par cette phrase : "Nous travaillons désormais sur un châssis de char de combat téléopéré afin de préparer le MGCS
Eurosatory 2024 ouvrait ses portes ce matin. L'occasion pour l'industrie mondiale de l'armement terrestre et aéroterrestre de montrer sur le plus grand des salons leurs dernières nouveautés. Ici, nous choisissons de commencer avec Arquus et son premier robot armé, le "DRAILER".
Images: Arquus
Le concept de remorque autonome destinée au véhicule 4x4 Scarabée était visible sur les maquettes depuis plusieurs années, mais alors qu'on sait désormais que le superbe blindé d'Arquus restera très probablement à l'état de démonstrateur, et donc non candidat au programme VBAE de l'armée de Terre (véhiucle blindé d'aide à l'engagement) que l'on attend pour 2030, revoilà au moins… la remorque !
Arquus, dont la fusion avec John Cockerill Defencedevrait être effective dans les prochaines semaines (en réalité un rachat par le Belge à Volvo Group, maison mère d'Arquus), performe avant tout dans le secteur des engins de transport ou de logistique -comme le prouve le récent marché des camions citerne de l'armée remporté en France- mais dans le même temps, elle ne cesse de prouver qu'elle sait innover dans le domaine des missions de combat. Et en matière de combat futur, quoi de plus exploratoire que la robotique terrestre ?
Les drones terrestres (ou UGV: unmanned ground vehicules), chenillés ou à roues 4x4, 6x6, 8x8... sont à l'essai depuis plusieurs années, y compris sur le champ de bataille, qu'il soit syrien ou ukrainien, sans pour autant avoir vraiment convaincus jusqu'à maintenant. Comment faut-il les employer ? La doctrine ultra dominante semble bien être celle de l'éloignement de l'homme du risque, ou autrement dit, l'envoi de ces machines en avant des hommes, pour de la reconnaissance et du "dérisquage", comme va nous le montrer la vidéo promotionnelle ci-dessous. C'est également ce que l'on a pu voir sur le front ukrainien, où les UGV se font décimer depuis le ciel par les redoutés drones suicides "FPV".
En France, on avait vu Nexter (aujourd'hui KNDS) s'afficher avec le robot chenillé Themis de l'estonien Milrem, ou encore Shark Robotics proposer sa mule 4x4 Barracuda. Citons aussi Unac ou Safran qui développent des modèles à roues, et collaborent même ensemble.
Et voici donc Arquus :
DRAILER, que l'on découvre dès le début de la vidéo de présentation comme étant remorquée par un blindé 4x4, est avant tout un drone.
En effet, pouvant effectuer les tâches de mule (emport d'équipements du fantassin visibles sur les images) et de plateforme d'appui feu grâce à son tourelleau téléopéré HORNET de calibre 12.7 (un produit phare de la maison, que l'on retrouve sur d'autre robots et véhicules sur le salon), DRAILER est un véhicule assez massif de 1,6 tonne qui est piloté à distance par un opérateur doté d'une console de commandes. La vidéo insiste bien sur le rôle du robot: prendre le risque à la place de l'homme, avec, fait marquant, c'est à la fin l'homme présent physiquement sur le front, et seulement lui, qui appuie sur le bouton au moment d'ouvrir le feu.
S'agissant des missions, sur le papier, DRAILER peut tout faire ou presque: soutien à l'infanterie, déminage, guerre électronique, lutte anti-drone Armement et fonction de mule comprises, il peut emporter 700 kilos.
Le véhicule démontre sur les images une assez nette capacité de mobilité, ce qui le rend a priori un peu plus punchy que les nombreux UGV vus depuis une dizaine d'années. Sa motorisation est électrique, et même probablement hybride (je n'ai pas la confirmation à cette heure) comme bien des modèles d'UGV en Occident, ce qui lui permet d'atteindre les 20 km/h avec 200 km d'autonomie. Attaché à un véhicule, en mode remorque, il supporte une vitesse jusqu'à 90 km/h.
Il faudra voir attentivement où va ce programme, voir ce que la France ou un autre pays décidera d'en faire, car pour le moment, l'intégration de plateformes armées semble poser des problèmes juridiques ou éthiques. Des faux problèmes en fait... mais l'on sait combien de temps nous a fait perdre l'absence de choix doctrinal, puis politique, de l'usage d'abord, et de l'armement des drones aériens ensuite.
Après deux mois de déconfinement, les rapports sur la situation stratégique se bousculent. Dans un monde où l'incertitude est désormais de mise, accompagnée de surcroît par des ruptures technologiques, ces écrits officiels (parlementaires) ou provenant de la recherche en viennent tous ou presque à la conclusion suivante: la France doit se préparer à un accroissement des tensions mondiales, et dans le cadre immédiat de la crise économique, la relance par la défense peut servir de double-levier.
Ci-dessus: cérémonie du 14 juillet 2020 avec en fond l'Assemblée Nationale. 2020, année stratégique ? - photo Elysée
>MISSION « FLASH »
SUR LA PLACE DE L’INDUSTRIE DE DÉFENSE
DANS LA POLITIQUE DE RELANCE
Quelques détails ci-dessous (en cliquant puis déroulant):
THREAD Voiciquelques infos glanées dans le rapport flash sur la place de l'industrie de défense dans le plan de relance, des députés Benjamin Grivault et jean-Louis Thiériot
> 2040, l'odyssée du SCAF - Le système de combat aérien du futur
Rapport d'information de M. Ronan LE GLEUT et Mme Hélène CONWAY-MOURET, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces arméesn° 642 (2019-2020) - 15 juillet 2020
Le monde des blindés lourds vit-il l'amorce de sa grande révolution ? Une question légitime quand on observe les projets émergents dans le monde et notamment en Europe, où ces dernières semaines ont été marquées par des annonces significatives.
Ci-dessus: l'estonien Milrem a brièvement révélé son Robotic Combat Vehicle Type X de 12 tonnes.
Pas de salon Eurosatory cette année pour cause de Covid, mais tout de même des informations intéressantes.
L'Estonien Milrem Robotics a diffusé - puis retiré - une image qui a fait grand bruit: celle d'une robot de combat terrestre, le "RCV" (Robotic Combat Vehicule) Type X équipé d'une tourelle CPWS 25 gen 2 de John Cockerill Defense dotée d'un d'un canon de 25 ou 30mm et de missiles antichars.
Si ce prototype tient probablement plus aujourd'hui de la maquette que du démonstrateur, il s'agit là d'un pas supplémentaire vers la robotisation du champ de bataille.
Des acteurs comme la Russie sont déjà passés par une large expérimentation au combat (en Syrie), mais l'Europe avance de sérieux arguments. Milrem vient en effet de recevoir 30,6 millions d'euros de la Commission Européenne pour développer un système terrestre sans pilote normalisé européen:
En à peine 5 ans, cette entreprise estonienne se sera inscrite comme innovateur de classe mondiale dans le paysage de l'armement, concluant des partenariats avec les grands groupes européens, y compris français. Sa mule THeMIS (Tracked Hybrid Modular Infantry System), capable de recevoir une tourelle, être aérotransportée par hélicoptère Chinook, ou encore de remorquer un VBCI (vidéo ci-dessous), vient de fêter ses 1 an d'expérimentations au Mali.
Mais de façon générale, autour des projets touchant à la fois à la robotique, l'IA, la collaboration homme/machine.... nous abordons une ère d'expérimentations majeures qui déterminera nos capacités de combat multidomaines dans un futur relativement proche.
Et si enfin, la question éthique oblige aujourd'hui à avancer très prudemment dans nos démocraties - car oui, d'autres ne se gênent/eront pas - sur la problématique des robots terrestres armés, nous en voyons là apparaître les premières briques technologiques.
En parallèle du SCAF, le Main Ground Combat System (MGCS) franco-allemand avance
Justement, les lecteurs de ce blog connaissent le fil rouge du SCAF, ce système de combat aérien futur associant Français, Allemands et Espagnols (et soyons honnête, ayant vocation à s'étendre, voire englober certains projets concurrents) dans le développement d'un système de systèmes conçu autour d'un produit phare: l'avion de combat futur, dont le maître d'oeuvre est Dassault Aviation.
Dans le même temps, le naval cherche son grand programme qui pourrait être l'European Patrol Corvette, tandis que le terrestre possède le sien. Main Ground Combat System.
Vue d'artiste MGCS - Nexter
Pour rester concis, MGCS, ou en vulgarisant, le programme franco-allemand de remplacement des chars Leclerc et Léopard (un succès incroyable pour ce dernier, donc un marché potentiel faramineux pour son successeur), associe industriels des deux côtés du Rhin dans le but de concevoir un système lourd de combat terrestre à horizon 2035/40.
Sous lead allemand, sa feuille de route, éminemment politique, ressemble peu ou prou à celle du SCAF, et est plus ou moins directement liée aux avancées de celui-ci, pour des raisons qui tiennent plus à l'équilibre des forces (direction française sur l'aéro, allemande sur le terrestre) qu'à une quelconque logique touchant aux opérations militaires.
Dernièrement donc, alors que Airbus et Dassault avançaient au niveau politique sur la validation d'un programme de démonstrateur(s), le programme MGCS rattrapait son léger retard avec la signature, après validation par le Bundestag, d'un accord-cadre, puis d'un accord de mise en œuvre, pour un contrat d'étude de définition de l'architecture du futur système. Le premier contrat d'études d'architecture durera 18 mois pour un montant de 30 millions d'euros, répartis à part égale entre les deux pays. Suivront les contrats des démonstrateurs.
Mais ce programme mérite des développements d'une expertise supérieure, et c'est pourquoi je vous invite à consulter l'excellentissime dossier paru sur Mars Attaque et Forces Operations Blog ces derniers jours, en 3 parties, dont les liens se trouvent ci-dessous:
« MGCS : derrière l’armure, la poursuite d’un système de combat terrestre complet »
Pour ce dernier post de l'année, c'est presque une idée cadeau que je suggère aujourd'hui. Sorti le 28 novembre dernier, l'ouvrage collectif "Conflictualités modernes et postures de défense" se présente comme l'outil idéal pour qui veut parfaire sa culture stratégique.
17 étudiants, jeunes chercheurs ou professionnels y contribuent sur des domaines variés couvrant la transversalité des enjeux contemporains: fiches pays, problématiques industrielles, question des alliances, émergence du Cyber ou des armes autonomes, risque nucléaire ou encore terroriste...
Le projet est porté par Vincent Satgé, et la Chaire "Défense & Aérospatial". La chaire hébergée à Sciences Po Bordeaux a en effet soutenu et accompagné le projet dans le cadre de ses activités de diffusion de la pensée stratégique.
Votre serviteur a l'honneur d'y apporter sa contribution sur plusieurs sujets.
Complet et proposé à prix abordable, l'ouvrage apparaît notamment idéal pour les étudiants qui se destinent à un avenir dans le domaine stratégique au sens large.
Présentation:
Cet ouvrage dresse un constat global et actualisé de la conflictualité et étudie l'évolution des politiques de sécurité et de défense. Il analyse la symbiose entre diplomatie et défense où la puissance armée apparaît comme un des déterminants de la diplomatie.
Quelles sont les nouvelles formes de conflictualité et quelles approches la Défense peut–elle adopter pour y faire face ?
Le blog est en pause durant les fêtes, et sera de retour pour une année 2019 qui s'annonce déjà tumultueuse... Agréables fêtes de fin d'année à toutes et à tous !
Les experts de la stratégie ou des technologies semblent unanimes. Nous sommes à l'aube de ruptures qui pourraient bien influer sur la géopolitique mondiale. C'est pourquoi, comme d'autres, le Secrétariat Général de la Défense et de la Sécurité Nationale a planché sur ces sujets. Il rend désormais public son rapport « Chocs Futurs - Étude prospective à l’horizon 2030 :
impacts des transformations
et ruptures technologiques
sur notre environnement
stratégique et de sécurité ».
« Chocs Futurs », rapport d'environ 200 pages, est paru il y a quelques semaines (le 21 avril 2017), et est consultable ou téléchargeable librement. Pour rappel, le SGDSN service du Premier Ministre qui, bien que largement inconnu du grand public; est chargé d'assister le chef du Gouvernement dans l'exercice de ses responsabilités en matière de Défense nationale et de Sécurité nationale.
La réalisation d'un tel document gouvernemental en matière de prospective technologique est une nouveauté pour le SGDSN.
La première partie du document se concentre sur les tendances "probables". Il prend en effet le parti de parier sur la consolidation de certains courants actuels que sont:
la défense antimissile balistique;
la démocratisation de l’accès à l’espace;
paix et guerre dans le cyberespace;
la dissuasion, atout de puissance et facteur de paix;
un terrorisme de plus en plus technologique;
des frontières "passoires" ou intelligentes ?
Sa deuxième partie en revanche, met véritablement l'accent sur les ruptures, technologiques notamment, qui de facto pourraient initier des ruptures stratégiques (à grande échelle donc). On y retrouve un éventail de sujets de plus en plus familiers comme:
les missiles et vecteurs hypervéloces;
la militarisation de l’espace;
la révolution de l’impression 3D;
la biologie de synthèse;
les neurosciences;
la cryptographie quantique;
ou bien évidemment le champ de bataille « 3.0 » (impliquant l'intelligence artificielle, les robots,
nanotechnologies et armes à énergie dirigée).
Le document présente comme avantage d'être relativement accessible (certains le verront peut être au contraire comme un manque d’approfondissement), sa lecture est claire et plutôt facile. Sans parler de vulgarisation, nous pouvons conclure qu'il s'agit d'un rapport institutionnel à la portée de tous, pas seulement des spécialistes.
De plus, et comme souvent ces dernier temps, nous sommes à la limite entre la notion très française (académique en fait) de prospective, et celle plus en vogue dans le monde anglo-saxon, la futurologie.
Afin d'accéder au document, cliquer sur l'image ci-dessous