mardi 13 juin 2017

Airbus veut un chasseur européen, et en appelle à la France


Airbus plancherait déjà sur le successeur de l'Eurofighter Typhoon, un avion de chasse de nouvelle génération (6ème ?). Et le programme impliquerait à ce jour l'Allemagne et l'Espagne. Le groupe en appelle à la France, tout en mettant en garde les britanniques sur les conséquences du Brexit.

C'est une information très commentée en Allemagne en ce début de semaine. Le groupe aéronautique Airbus annonce son intention de développer un avion de combat européen de nouvelle génération. C'est Fernando Alonso, directeur général de la division Avions militaires d'Airbus Defence & Space, qui le déclare dans un entretien au journal allemand Handelsblatt.

Le programme en question c'est le FCAS (Future Combat Air System), un système encore à ses balbutiements qui intégrera des drones, des avions de combat, des satellites et des avions de commandement et de contrôle (C2) de nouvelle génération. Le tout sera "uni" grâce à un très haut niveau de liaison de données. Ce système qui devra remplacer en Allemagne à la fois l'Eurofighter Typhoon et le Tornado.
Ce que l'on appelle ici le FCAS ne fait pas référence au Future Combat Air System franco-britannique qui prévoit pour l'instant la conception d'un drone de combat.


Airbus en appelle à la France

A ce jour, seules l'Allemagne et l'Espagne se sont engagées dans ce projet dont la vocation est d'être le futur de l'Europe, probablement LE grand programme phare dont elle aura besoin. C'est ainsi que Fernando Alonso déclare: « Nous espérons que la France participera, parce que nous devons le faire ensemble en Europe, il n'y a pas de place pour deux ou trois systèmes différents. »

Il fait bien sûr référence ici au schisme qui avait vu dans les années 80 la France se retirer du projet d'avion européen. Il en sortit deux appareils, le Typhoon, et le Rafale. Seulement aujourd’hui (et pire encore demain), le coût des programmes ne peuvent plus être assumés par un Etat seul. La concurrence sur les marchés est encore moins permise.

Le temps presse et l'Allemagne semble même brandir une menace depuis quelques semaines en se renseignant très officiellement (et tout aussi publiquement) sur le F-35 américain... qui pourrait intéresser également l'Espagne. Une telle hypothèse serait, comme on le reconnaît ouvertement à Berlin, un abandon définitif de souveraineté... elle verrait de plus la France encerclée par l'avion américain et ses très exclusifs systèmes de liaison. Loin d'être idéal lorsqu'on ne travaille plus que presque exclusivement en coalition.

Airbus cherche donc à fédérer autour du projet, afin de fixer les premiers financements publics. Avec une France "macronienne" pro-Europe et une ministre de la Défense qui encourage au dévelloppement de programmes industriels européens, avec comme premier partenaire l'Allemagne, nous devrions recevoir quelques signaux sous peu. 

On attendra également la réaction de Dassault Aviation, mais la tendance va vers la main tendue sur tout ce qui concerne l'Europe de la Défense.

L'autre question qui demeure touche bien sûr le FCAS franco-britannique, dont le projet de drone de combat furtif avance. Deux démonstrateurs sont prévus pour 2025. Il s’agirait bien sûr de ne pas créer de doublon.
Cependant, en même temps qu'est lancé cet appel à la France, un autre dirigeant d'Airbus, Fabrice Bregier, signale au Royaume-Uni dans le Sunday Times qu'en cas de Brexit "dur", le groupe n’hésitera pas à rappeler ses activités sur le continent, invoquant l'entrave à la libre circulation de ses employés... Il en possède 10 000 en Grande Bretagne.


Il semble donc que nous vivions une période réellement charnière (mais ai-je vraiment besoin de le rappeler) pour l'avenir de l'Europe politique et économique... deux critères structurants des programmes de défense. Le sort de l'avion européen de demain se décidera bientôt.


3 commentaires:

  1. si c'est pour faire un chasseur comme le Thypoon ou l'A400M ,deux programmes militaires qui ne sont guère des réussites avec une explosion des coûts,non merci,je préfère encore un futur chasseur de chez Dassault ou bien qu'il soit le maître d'oeuvre exclusif du futur programme Européen.

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  2. Effectivement, on peut émettre quelques doutes...
    Les allemands n'ont pas prouvé à ce jour leur efficacité dans les programmes militaires (ou même spatiaux).

    Il faut tout de même prendre en compte que, contrairement aux britanniques et aux français, les allemands interviennent très peu sur les théâtres d'opération extérieurs (ou alors sur la logistique).

    De plus, demandez à ceux qui ont connu Airbus il y a 20 ans, la mainmise actuelle des allemands sur le management du groupe a considérablement changé la culture de l'entreprise.

    La logique depuis quelques années est exclusivement financière.
    Ce n'est pas suffisant lorsque l'on parle de programmes militaires stratégiques où le temps de retour sur investissement peu être -très- long, voire inexistant.

    Ces programmes apportent au(x) pays contributeur(s) un statut qui n'est pas forcément quantifiable (ex de la dissuasion nucléaire). Et cela n’intéresse pas forcément nos amis d'outre Rhin. Le financier et le régalien ne font pas toujours bon ménage.

    Autre exemple : la navette Hermès dont le programme très avancé avait été stoppé par les allemands qui voyaient le budget s'envoler.

    Oui les débuts d'Airbus et l'A300 ont été une réussite incontestable et audacieuse. Un modèle de collaboration transnationale.
    Mais pensez-vous que le Concorde aurait vu le jour si le programme avait été franco-allemand ?

    Donc collaborer au niveau européen, pourquoi pas si c'est pour être plus fort ensemble.
    Mais si c'est pour aboutir à des programmes de compromis, en "time share", sans âme et avec pour seule logique la rentabilité, ce n'est pas la peine.
    Les Français devraient commencer par reprendre un peu la main sur le management d'Airbus (situation due peut être à la faiblesse de nos dirigeants ces dernières années).
    Et surtout prendre moulte garanties avant de sacrifier l'indépendance française en matière de chasseurs de combat.

    AD

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    1. je partage grandement votre avis. J'ai rédigé cet article à chaud, et je pense que la situation actuelle mérite une analyse plus approfondie (qui viendra dès que j'aurai le temps). On constate un push pro-Europe, mais surtout pro-germanique assez grossier ces derniers jours (par ex le rapport Sénat Raffarin). Il s'agirait pour la France (et l'Allemagne, et la GB) de d'abord fixer ses objectifs politiques en la matière. Ensuite on parlera programmes

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