vendredi 9 juin 2017

La bataille pour la 6ème circonscription de la Gironde aura t-elle lieu ?

La Députée (PS) sortante Marie Récalde a notamment eu l'occasion de voler sur Rafale

Les élections législatives se déroulent ces dimanches 11 juin et 18 juin. Parmi les 577 circonscriptions de France, il s'en trouve une en particulier qui concentre un impressionnant écosystème "défense". Il s'agit de la 6ème circonscription de la Gironde. Mais est-ce vraiment un facteur déterminant ?

Sur Pax Aquitania, on ne fait pas de politique, on analyse. C'est pourquoi nous ne nous étendrons pas sur la lutte électorale. Tsunami LREM, consolidation du FN, effondrement des deux grands partis traditionnels... ? Les réponses à cela, nous les aurons dès dimanche soir.

Ce qui nous intéresse ici, ce sont les particularismes de la 6ème "circo" de la Gironde", elle qui concentre sur son espace géographique deux grandes enceintes militaires (Base aérienne 106 de Mérignac, Camp de Souge à Martignas s/Jalle), ainsi que l'impressionnant aéroparc bordelais, premier bassin d'emplois de la Région qui comprend notamment l'usine Dassault Aviation d'assemblage du Rafale, le nouveau Campus Thalès, ou encore des installations de Sabena Technics ou Ariane Group (ex-Airbus Safran Launchers), ce dernier s'occupant notamment d'une partie des missiles stratégiques M-51 de la force de dissuasion nucléaire. Citons aussi les 500 PME et ETI qui cimentent cet écosystème.
Je m'arrête là, mais je n'ai effleuré qu'un faible pourcentage de la liste. La 6ème circonscription de la Gironde est purement et simplement la plus marquée "défense" du pays.

La Députée (PS) sortante, Marie Récalde, a misé sur cet aspect dès 2012, lorsqu'elle fut élue pour son premier mandat (qu'elle remettra en jeu dimanche). En effet, elle rejoint alors la Commission de la défense nationale et des forces armées de l'Assemblée afin de s'impliquer sur ces dossiers en particulier.
S'en suivra une mandature (hyper)marquée par les thématiques défense: OPEX qui se multiplient sous la présidence Hollande, succès à l'export du Rafale, la grosse question du MCO, installation du campus Thalès à Mérignac... et bien évidemment un contexte sécuritaire qui se dégrade sur le territoire national avec les attentats terroristes.


La Défense Nationale, un facteur électoral déterminant. Ou pas ?

Vous faites peut-être partie des 87% de français qui avaient en 2016 une bonne image des armées (les autres chiffres sont tout aussi gratifiants autour des thème de Défense Nationale), et vous pourriez donc légitimement penser que ce grand enjeu est déterminant dans une élection... ce qui n'est pas vraiment le cas. Cela dépend en fait où l'on place le curseur.

Les différents études réalisées durant la campagne présidentielle ont montré que deux sujets arrivaient tour à tour en tête des préoccupations des français: la menace terroriste, et le chômage. Puis les impôts, l'immigration, la délinquance... loin très loin devant l'Europe, ou l'environnement.
Le risque terroriste, c'est la sécurité. Et en matière de défense, l'une des missions  des armées est d'assurer la sécurité des Français sur les fronts de l'avant de cette guerre contre le terrorisme, en opérations au Sahel ou au Levant. Et même aussi en métropole avec Sentinelle. CQFD.

Pourtant, pouvons nous vraiment dire que l’élection a été remportée par Emmanuel Macron sur le thème du terrorisme ? Ce n'est pas mon avis. La surenchère sécuritaire, on la trouvait évidemment du côté de Marine Le Pen, qui fut finalement battue, assez largement.
J'ajouterai même que devant les attentats qui se sont multipliés, les français ont su montrer une résilience admirable. Doit-on rappeler qu'un policier fut abattu sur les Champs Elysées à 3 jours du premier tour ?

De même, dans les faits, l'élection présidentielle, dans son déroulement, a largement montré que les questions sur l'ordre international étaient secondaires, pour les candidats comme pour les français. Secondaires sur le plan électoral, mais devenues prioritaires une fois le Président entré en fonction, comme montrent les effort d'Emmanuel Macron aujourd'hui pour s'imposer sur la scène diplomatique (pour le moment avec brio).

Le contexte international actuel, plus qu'incertain, devrait donc théoriquement amener les électeurs à faire de l'outil militaire français, gage de la défense de nos intérêts sur le plan mondial, une priorité.
Devrait oui... sauf qu'au plan local, le désintérêt est encore plus criant qu'au plan national, ces questions, de part leur caractère ultra-régalien, renvoyant directement l'électeur à la personne du Président, au mieux du ministre. L'effet du caractère vertical de la 5ème République.


La défense: des enjeux au sens large

Dans le sud-ouest, il est d'avis général que la population n'est pas vraiment sensibilisée à l'esprit de défense, la région n'ayant en effet pas connu les affres des  deux guerres mondiales, ou de façon très politique lorsque Bordeaux fut brièvement capitale. Je ne suis pas tout à fait d'accord avec ce constat, il y a en Aquitaine une (ou même plusieurs) génération de personnes qui a vécu avec l'aéronautique militaire, industrie installée en force dans la région depuis les années 50. L'esprit de défense ne s'est certes pas construit de la même manière que dans le nord ou dans l'est du pays, mais il est néanmoins présent.

En fait, pour trouver la défense comme facteur déterminant, il faut aller la chercher, non pas sur le terrain des opérations de combat, mais sur celui de l'emploi, justement l'autre sujet principal de préoccupation des français.
Comme je le disais, la défense, à Bordeaux ou ailleurs (mais notamment à Bordeaux donc), ce sont des emplois, en grand nombre: 15 000 emplois liés à l’industrie aux secteurs aéronautique, spatial, et défense (le fameux ASD) pour la seule 6ème circonscription. Dont la moitié autour du Rafale.

Cela, les candidats l'ont bien compris, et c'est principalement ce qui leur permet d'utiliser le curseur "défense". Non seulement la BITD (base technologique et industrielle de défense) est essentielle à la vie économique de la circonscription), en ce qu'elle assure emploi et revenus, mais elle est aussi une vitrine d'envergure mondiale, en matière d'innovation par exemple.

De plus, les deux bases militaires, dont l'une accueille tout de même un prestigieux régiment de forces spéciales (le 13ème RDP), sont un véritable vivier en terme de population. Pour les écoles notamment... on connaît les drames qu'ont représenté les fermetures de bases pour de petites localités du nord et de l'est de la France.

En ce sens, si la défense nationale au sens régalien est sans nul doute le domaine où règne presque sans partage le Président de la République "chef des armées", ses enjeux au niveau local font que les élus ne peuvent en aucun cas la négliger.
Les feux sont au vert sur la 6ème circonscription de la Gironde. Le secteur,  poussé par des dynamiques dont le sort se décide souvent à Paris, parfois au Caire ou à New Delhi, devrait recruter en masse dans les prochaines années.

Quel que soit le prochain élu(e), il lui faudra passer par la case "spécialisation" s'il veut pouvoir envisager avec sérénité l'avenir de cette si stratégique circonscription.


Ci dessous la liste des 13 candidats, selon le Ministère de l'Intérieur:

Véronique SILVERIO (-)
Guillaume PERCHET (LO)
Frédéric DOSSCHE (-)
Marie-Mauricette MARTINEZ (FN)
Ludovic GUITTON (EELV)
Rémi COCUELLE (UDI-LR)
Frédérique BACCI (-)
Pierre CAZENAVE (PC)
Marie RÉCALDE (PS)
Eric POULLIAT (LREM)
Olivier LOISEL (UPR)
Sandrine PENY (DLF)
Marie DURET-PUJOL (FI)


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