vendredi 1 septembre 2017

Rafale, F-18, Gripen, F-16... l'Inde continue d'attiser l'appétit des avionneurs



La rentrée est la bonne occasion de faire un "point Inde". Puissance asiatique, monstre démographique, et surtout un des principaux importateurs d'armement, l'Inde attise l’appétit des grands pays et industriels producteurs. Une tendance qui n'est pas prête de s'arrêter, vu l'ampleur de la demande.

Illustration: message promotionnel de Dassault Aviation diffusé cet été à l'occasion de la fête de l'indépendance en Inde.


36 Rafale supplémentaires pour l'Indian Air Force

Commençons par la la belle histoire entre l'Inde et le Rafale. Selon Times of India, des sources au sein du ministère de la Défense local font état de réunions tenues au sein de l'Indian Air Force, exprimant le besoin opérationnel d'obtenir 36 Rafale supplémentaires dans le cadre de ses plans à plus ou moins long terme.

Un des arguments avancés est celui du coût de l'avion français, qui sera selon les estimations de l'IAF largement en deçà de celui du chasseur de cinquième génération développé avec la Russie, le T-50.
De plus, l'IAF manque cruellement d'avions disponibles. Ses vieux Mig, quand ils sont en état, ne pouvant au mieux assurer que trois sorties quotidiennes en situation de combat. 

En 2016, l'Inde a commandé 36 Rafale pour presque 8 milliards d'euros, dont le premier escadron composé de 18 appareils sera basé à Hasimara dans la région du Bengale occidental, face à la Chine donc. Un second escadron ira lui à Ambala, plus proche du Pakistan. Ces deux installations sont actuellement entièrement revues pour accueillir le Rafale, qui représentera un "véritable facteur de dissuasion" face aux puissances de la région.
Mais ces appareils, New Delhi ne les réceptionnera qu'entre  2019 et 2022, et avec 33 à 34 escadrons de chasse (pas tout récents) en activité, il lui manque pas moins d'une dizaine d'escadrons pour tenir ses ambitions de grande puissance régionale.

On le sait, l'Inde voulait initialement, à travers le fameux contrat avorté "MMRCA", 126 avions, dont la grande majorité aurait été fabriquée sur place. Ce projet était un pilier de la politique industrielle "Make in India". 
Et si la forme a pour l'instant bien changé (aucun des Rafale commandés ne sera assemblé hors de France), l'ambition de fond reste la même, chose que les industriels français comme Safran, Dassault, Thalès ou MBDA ont bien intégré en multipliant les projets et partenariat autour du Make in India.

Ce sont donc toujours 90 appareils modernes environ qui manquent dans les plans de l'IAF.


Boeing drague l'Indian Navy

Si on peut légitimement espérer que d'autres Rafale soient donc commandés pour l'IAF, peut-être 90 en plusieurs tranches (il faut savoir être patient...), un autre marché nous intéresse, celui de l'aéronavale indienne.  La marine indienne a lancé début 2017 le programme "Multi Role Carrier Borne Fighters" (MRCBF) dans le but acquérir 57 avions de combat multi-rôles pour son aviation embarquée.

L'Inde dispose à ce jour d'un porte-avions à pont d'envol incliné (configuration STOBAR) et prévoit de se doter d'autres bâtiments qui auront eux une catapulte (CATOBAR, comme le Charles de Gaulle).
Ce marché intéresserait Saab qui prévoit une maritimisation du Gripen, et les deux constructeurs occidentaux à même de proposer un avion embarqué, Boeing avec le F/A-18 Super Hornet, et Dassault avec le Rafale M.

En ce qui concerne la configuration STOBAR, Dassault comme Boeing assure que le Rafale et le F-18 sont capables en théorie de décoller via un pont d'envol incliné. L'américain affirme même l'avoir démontré aux indiens en simulation, comme l'a précisé Dan Gillian, un responsable de Boeing: « Nous avons fait beaucoup de travail de simulation avec la marine indienne pour mieux comprendre leurs besoins et nous assurons que le Super Hornet peut fonctionner sur tous ses porte-avions, sur ceux qui sont en service aujourd’hui comme sur ceux qui le seront à l’avenir ».
De plus, Being veut rendre son offre encore plus séduisante en annonçant que ces F-18 seraient assemblées en Inde: « Nous pensons que le Super Hornet est l’avion le plus avancé que l’Inde pourrait fabriquer. (...) La politique du Make in India du Premier ministre Modi est alignée sur notre stratégie de partenariat industriel ».

Ce n'est pas une surprise, le F-18 se présentera comme le grand rival du Rafale sur ce marché, un Rafale qui possède néanmoins plusieurs avantages, le premier étant la place qu'il occupe à bord d'un porte-avions. Notons d'ailleurs que chez Dassault Aviation, les manœuvres de charme ont également été engagées auprès de la marine indienne depuis un bon moment.


Le monomoteur indien sera américain ou suédois

Ici la France n'a rien à proposer* ! Le chasseur indien Tejas a définitivement du mal à décoller, alors que le pays a pourtant exprimé son besoin pour une centaine de chasseurs monomoteurs.
C'est ainsi que deux groupes occidentaux entrent en course pour obtenir ce marché estimé à 15 milliards de dollars: Saab avec son Grippen, et Lockheed Martin avec le... F-16. La possibilité F-35 a parfois été évoquée chez ce dernier constructeur, mais c'est bien la solution F-16 qui tient la corde en Inde.

Mais ce partenariat ne se fera qu'à la seule condition (comme feu le programme MMRCA, ou le MRCBF cité plus haut) d'un partenariat industriel dans le cadre du Make in India. C'est pourquoi le suédois Saab vient de s'associer dans ce but avec le groupe indien Adani. 
En face, Lockheed Martin a annoncé pendant le salon du Bourget sa volonté de créer une chaîne de montage pour son F-16 en Inde en cas de victoire sur ce contrat. Un partenariat a même été signé pendant la salon avec le conglomérat indien Tata Advanced Systems.

Bimoteur pour l'IAF, chasseur embarqué sur porte-avions, monomoteur... Sur tous les fronts, l'Inde et ses besoins considérables attisent les appétits des constructeurs occidentaux (sans oublier que la Russie porte le projet T-50). Toute la problématique tournera autour du fait de savoir si la politique du "Make in India" va enfin prendre son véritable envol. 
Si tel est bien le cas, comme on peut le pressentir malgré les difficultés sur place, alors les vainqueurs sur ces marchés seront ceux qui auront su être les plus attractifs...et coopératifs. Il s'agit là d'un partenariat qui se conclut sans doute à très long terme.
Sur ce point, on peut penser que le positionnement déjà entamé des grands groupes d'aéronautique militaire français leur donne une longueur d'avance. On pensera notamment ici aux larges offsets concédés par la Rafale Team dans le contrat Rafale de 2016, des offsets déterminants dans la volonté indienne de devenir, un jour, vraiment indépendant.

Par souci de cohérence stratégique (formation, maintenance, opérations...), on ne peut que conseiller à l'Inde de se procurer le plus de Rafale possible ! Avis objectif bien sûr :)


*Quoique des monomoteurs français, l'Inde en possède déjà. Il s'agit d'une cinquantaine de Mirage 2000 dont la modernisation a été confiée à Dassault et Thalès pour près de 3 milliards d'euros en 2012.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire