vendredi 29 mars 2024

Les yeux de l'Europe sur Eurenco Bergerac

Après la visite annulée du 8 mars dernier, le ministre des Armées Sébastien Lecornu s'est finalement rendu sur les installations d'Eurenco Bergerac ce mardi 26 mars, où il a décoré des employés de l'entreprise. Pas ou peu connu il y encore quelques mois, Eurenco est aujourd'hui devenu l'un des fers de lance de la production française de munitions d'artillerie. 

Images publiées par le compte X/Twitter du ministre des Armées, le 26 mars 2024.


Au cœur des attentions nationales, mais aussi européennes (et fatalement, ukrainiennes), la poudrerie d'Eurenco à Bergerac a enfin reçu la visite du ministre des Armées, dont l'agenda et la journée du mardi 26 mars étaient entièrement consacrés au sujet de la production de munitions. Durant cette venue, Sebastien Lecornu a décoré une vingtaine d'employés d'Eurenco pour leur participation à "l'économie de guerre", et confirmé qu'Emmanuel Macron se déplacerait bientôt pour la pose de la première pierre des bâtiments qui seront consacrés à la génération de poudre. 


Ce qui nous permet de formaliser ici un résumé des efforts menés par la France sur ce sujet. 

La filière munitions est en train de reprendre la place prépondérante qu'elle occupait par le passé dans le sud-ouest. A Bergerac, toute l'attention est portée sur Eurenco qui rapatrie de Suède une partie de ses capacités de production. L'entreprise, qui fournit, avec le soutien de l'Etat & de l'Union Européenne, des charges modulaires propulsant les obus, avait déjà quintuplé sa production depuis 2019. Soit 500 000 charges modulaires par an, de quoi alimenter au maximum (dans le cas de notre canon Caesar) 90 000 obus.

Mais avec la guerre, il est désormais question de sortir plus du double (1 million donc) d'ici 2026, grâce à l'ouverture d'une troisième ligne de prod automatisée. Avec un million de charges modulaires, c'est  un potentiel de 150 000 obus de 155mm (c'est Nexter/KNDS qui, in fine, produit les obus). 
Dans ce but, Eurenco Bergerac construit, pour 60 millions d'euros, 15 bâtiments qui permettront la production de 1 800 tonnes de poudre, sachant que tout est bon pour faire de la poudre à canon, dont la pénurie en composants est mondiale (même recycler nos invendus d'alcool).  

Notons également que la sécurité du site a été durcie, contre les menaces immatérielles ou physiques. Rappel en effet qu'à la veille du déclenchement de l'invasion russe en Ukraine, des dépôts de munitions avaient été incendiés (sabotage), en République Tchèque notamment. 

Comme vous le savez, ces bouleversements géopolitiques ont un effet forcément positif sur la balance commerciale de la France, déjà largement bénéficiaire dans le secteur de la défense. Chez Eurenco, où l'on était pas habitué à tant de lumière, le chiffre d'affaires explose, à 350 millions d'euros. Il devrait selon les prévisions actuelles (le carnet de commandes, qui ne concerne pas seulement l'Ukraine), atteindre le milliard d'euros en 2030. Cela se traduira directement par le recrutement de 100 personnes par an à Bergerac, intérimaires ou CDI. Un bureau concernant les cadres est ouvert sur Bordeaux dans le QG de Bordeaux Technowest à Mérignac (le "Cockpit"), juste devant les pistes de l'aéroport international.

Enfin, Eurenco a semble t-il impressionné l'US Army, qui a visité le site de Bergerac, puisque l'entreprise ouvrira une usine au Texas. A l'américaine, puisque trois fois plus grande que les installations françaises.


Et pas seulement Bergerac

Voilà pour les charges modulaires. Du côté des corps d'obus, cela se passe à Tarbes, où "les Forges"  bénéficient de 12M€ qui permettront de passer de la production de 35 000 corps d'obus aujourd'hui à 200 000 par an d'ici deux ans. Son principal client, KNDS, fournit aussi un effort, ne pouvant en assumer que 30 000 /an, ce qui explique une partie des problèmes rencontrés récemment. 

Dès 2024, la France prévoit de produire 100 000 obus de 155mm, dont 80% ira à l'Ukraine, le reste venant recompléter les stocks nationaux. 

Enfin, un dernier mot pour signaler qu'à  Bordeaux, dans le secteur des missiles et roquettes cette fois, l'expert des systèmes de propulsion Roxel va recevoir 10 millions d'euros du mécanisme communautaire ASAP (Act in Support of Ammunition Supply) pour accélérer lui aussi.

Concernant l'entièreté du sujet munition, une conférence (diffusée) était donnée au Ministère des Armées mardi matin. Ajoutons que sur le volet munitions légères, un accord de production pourrait être conclu avec l'industriel belge FN Herstal dès ce printemps.





3 commentaires:

  1. Visite pour la pose de la première pierre de la future usine de Bergerac:
    https://www.bfmtv.com/economie/entreprises/industries/economie-de-guerre-macron-va-poser-jeudi-la-premiere-pierre-d-une-usine-de-production-de-poudre-a-bergerac_AD-202404090848.html

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  2. Le missilier MBDA revient de loin aussi et son carnet de commandes est plein !
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/04/17/a-bourges-le-missilier-mbda-augmente-ses-cadences-pousse-les-murs-et-recrute-a-tout-va_6228332_3234.html

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  3. La France n'avait pas commandé de MISTRAL depuis 2006...
    https://www.forcesoperations.com/un-contrat-mistral-peut-en-cacher-un-autre/

    Heureusement qu'il y avait des clients export !

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