vendredi 28 février 2020

Expérimentation en vue pour des Chinook dans l'armée de l'Air


L'éventualité que la France se dote enfin d'hélicoptères lourds dans ses armées devient tangible. En effet, un officier de l'armée de l'Air a déclaré publiquement cette semaine que l'Etat Major visait l’expérimentation avant 2025.

Ci-dessus: un MH-47G de l'US Army, tel qu'on se plairait à l'imaginer dans sa livrée armée de l'Air.


La question des hélicoptères lourds est un peu devenue un marronnier dans l'armée française. Essayons donc de ne pas en faire des tonnes... mais l'information lâchée cette semaine par Flight Global a de quoi sérieusement rebattre les cartes dans ce débat.

En effet, selon le média aéronautique, le colonel Paupy du Bureau Plans de l'armée de l'Air a déclaré lors d'un symposium sur les hélicoptères à Londres ce 25 février, que la France planifiait d'acquérir 2 appareils en leasing, afin de combler un "déficit capacitaire", et surtout, à titre d'évaluation.

En leasing ?! Effectivement, la location d'appareils (une pratique qui se généralise) permettrait avec un investissement "minime" de contourner l'actuelle LPM, qui ne prévoit aucunement l'achat d'hélicoptères lourds. Cet éventuel programme d'acquisition ne concernerait que la prochaine LPM, à partir de 2025, toujours selon le colonel français.

Avec une telle manœuvre, la France mise peu, pour un pari qui devrait s'avérer largement gagnant. Ouvrir la porte au Chinook américain, en étant quasiment certaine du succès de l'évaluation, préparerait le terrain pour l'acquisition d'une petite, voire moyenne, flotte d'appareils. 

Pas d'information sur la version de l'appareil, même si on présuppose qu'il s'agirait du nouveau CH-47F standard "Block II". Nous verrons bien.

S'agissant de l'emploi, le colonel Paupy ayant indiqué que l’armée de l'Air recherchait un appareil capable d'évoluer en territoire ennemi, il est donc question d'appui direct aux opérations, à la manière de la façon dont collaborent les 3 Chinook britanniques de la Royal Air Force sur Barkhane.

Depuis plusieurs années, et de façon intensifiée ces derniers mois (c'est même devenu un fil rouge sur ce blog), le débat sur l'acquisition de Chinook pour les forces françaises anime le monde militaire: trou capacitaire à combler... achat contesté d'un système américain... questions doctrinales sur l'emploi de telles machines (logistique, opérations spéciales)...



Mais tout récemment, et après avoir publiquement révélé un besoin (voir lien ci-dessus), le COS, puis l'ALAT s'étaient désistés, assurant que leur corps de métier était le vol tactique. 
Aujoud'hui donc, l'armée de l'Air, qui a plutôt jusqu'ici utilisé un argumentaire touchant à la logistique de théâtre, semble hériter d'un dossier qui n'a jamais semblé aussi proche de se concrétiser.

Finalement, l'histoire du drone Reaper, ou du C-130J, semble se répéter: face aux besoins des opérationnels et à l'absence de solutions sur le marché européen, c'est bien le pragmatisme qui l'emporte. Reste à savoir quelle enveloppe y sera consacrée dans la prochaine Loi de programmation militaire.

Lors de cette conférence, le colonel Paupy a également évoqué l'arrivée du H-160 Guépard, et la modernisation des Caracal à horizon 2028. Le Bureau Plans de l'EMAA travaille également aux hypothèses sur l'aéromobilité post-2040.


mercredi 26 février 2020

Le premier Rafale monoplace indien décolle à Mérignac



Les Rafale destinés à l'Indian Air Force continuent de défiler à Bordeaux-Mérignac, avec ce 21 février une sortie pour le premier monoplace.

Photos: BS 001 à l’atterrissage. Jean-Pierre Dewam, le 21 février à Mérignac.


On avait déjà vu le premier Rafale biplace indien (sur 8), "RB 001"  pour une sortie en juillet 2019. Voilà  le premier monoplace (sur 28), "BS 001", et son premier vol ce 21 février à Bordeaux, avec ses marquages de l'Indian Air Force.

Lire sur le blog: L'Inde devient la 4ème nation à posséder le Rafale



La spécifié du contrat indien (mais également qatari), est que Dassault prend en charge une partie de la formation. Les vols depuis Bordeaux s'expliquent par la "proximité de la chaîne d'assemblage Rafale et de la force logistique associée est jugée stratégique." 

L'Inde a commandé 36 Rafale à ce jour, mais ce chiffre pourrait augmenter largement étant donné les besoins importants de l'Indian Air Force et de la marine (90 appareils ?). Les premiers avions on été officiellement réceptionnés lors d'une cérémonie en octobre 2019 mais tous sont demeurés en France.

Les appareils doivent transiter vers leurs bases définitives en Inde d'ici le mois de mai.



lundi 24 février 2020

Safran investit dans la modernisation de ses usines en Aquitaine


Nous l'avions évoqué sur ce blog à l'époque du dévoilement du projet. Safran Helicopter Engines (ex-Turbomeca) a enfin inauguré ce 21 février ses installations rénovées de Tarnos. 50 millions d'euros ont été investis par le groupe dans ce campus. D'autres part, les travaux débutent à La Teste (33) pour l'agrandissement du site de Safran Data Systems.

Ci-dessus: le site de Tarnos, dans les Landes - Safran


Dassault Aviation, Thalès, Ariane et même Naval Group (sur Angoulême) , tous ces grands groupes ont largement investi dans leurs infrastructures en Nouvelle Aquitaine, dans le cadre notamment de la révolution "digitale" ou "4.0".
En 2010, Turbomeca (filiale du groupe Safran devenue depuis Safran Helicopter Engines) était même un précurseur de ce mouvement avec sa superbe usine de Bordes, près de Pau.

Ce vendredi 21 février, la ministre des Armées Florence Parly et la secrétaire d'Etat Geneviève Darrieussecq (élue locale) étaient donc présentes pour l'inauguration du nouveau campus industriel CAP 2020 de Safran Helicopter Engines, à Tarnos dans les Landes.

Cet investissement de 50 millions d'euros se concrétise par l'ouverture de 3 nouveaux bâtiments, soit 33 000 m², dédiés à la réparation des composants (8 500 m²), la réparation des moteurs d'hélicoptères de la zone Europe-Afrique-Moyen Orient (14 500 m²), et enfin au support et aux services.
Le site concentre 1 550 emplois, cela sans compter l'activité des sous-traitants. 

Ces installations modernisées doivent permettre une réorganisation complète de la chaîne de maintenance des turbines d'hélicoptère. Une problématique très importante dans le domaine militaire. Safran Helicopter Engines espère atteindre une réduction de 30 % du temps des cycles de maintenance, réparation et révision. Un objectif naturellement salué par la ministre des Armées...

Le spatial s'invite sur le Bassin d'Arcachon





Plus au nord, sur le Bassin d'Arcachon, Safran Data Systems, filiale de Safran Electronics & Defense, posait le 5 février la première pierre de l’extension de son site de La Teste de Buch. 3 900 m² qui seront dédiés d'ici l'automne 2020 à l'accompagnement de la forte croissance de l'entreprise.

Safran Data Systems y conçoit et produit depuis 1981 les antennes et stations sol pour le suivi de satellites des grands programmes spatiaux ou des centres d'essais.
Et dans un secteur qui devient justement une priorité stratégique nationale, européenne, mondiale... l'entreprise affiche des perspectives de croissance tout à fait remarquables. Une ambition qui devrait lui permettre de passer sur son site girondin de 170 à 200 personnes.

A mesure que le trafic spatial se densifie, le besoin en stations sol augmente, et de façon exponentielle donc, puisqu'on parle désormais de constellations de plusieurs milliers de satellites amenées à être lancées dans les prochains mois.
Il s'agit d'un enjeu global, pour les services commerciaux comme pour les puissances souveraines.

Le site de La Teste offre de surcroît des conditions idéales pour les essais en raison de son environnement radio-électrique apaisé, car éloigné de Bordeaux et son agglomération. D'autant plus que dans la défense, la DGA, cliente de l'entreprise, dispose de sites d'essais en vol et essais missiles non loin, à Cazaux et Biscarosse.


vendredi 21 février 2020

Fin d'une 5eme campagne d'essais pour le Neuron, structurante pour le SCAF


Une nouvelle campagne d’essais en vol du démonstrateur technologique de drone de combat furtif nEUROn vient de s’achever à DGA Essais en vol (Istres). Le drone furtif de Dassault Aviation s'est essayé au combat collaboratif. 
A Paris ce 20 février, la ministre Florence Parly recevait les délégations allemandes et espagnoles pour la signature du contrats de développement des démonstrateurs du SCAF.

Ci-dessus: une vue d'artiste datant de plusieurs années montrant un drone de combat aux côtés du Rafale - Dassaut Aviation


La DGA (Direction générale de l’armement) a annoncé la fin de la cinquième campagne d'essais en vol du démonstrateur nEUROn. Mandatée par elle-même au profit de l’Etat, elle "a été menée en coopération avec Dassault Aviation pour la mise en œuvre du vecteur aérien et avec la participation des forces. Un de ses objectifs était d’étudier l’utilisation d’un drone de combat furtif dans un contexte opérationnel, impliquant également une réflexion sur les tactiques de défense face à un tel vecteur."

L'information principale concernant cette nouvelle campagne est la réalisation d'un vol d’essai en ambiance de combat collaboratif réalisé avec 5 Rafale et  1 Awacs, "dans des configurations tactiques multiples".

Les résultats sont en cours d’analyse approfondie. Ils apporteront selon la DGA des éléments majeurs pour aiguiller les choix d’architecture et de technologie du SCAF.

Programme à - seulement - 450 millions d'euros entamé il y a une douzaine d'années, le Neuron prouve une nouvelle fois toute la pertinence d'une politique active dans le domaine des démonstrateurs. 
Et si l'on parle aujourd'hui surtout des "remote carriers" dans le cadre du SCAF (système de combat aérien futur), il ne fait pas de doute qu'un drone de combat furtif aura toute sa place dans cette architecture, aux côtés du Rafale, du futur chasseur européen, et autres effecteurs déportés... 

Lire ou relire sur le blog: Penser un avenir au drone nEUROn


Signature du contrat de démonstrateur du SCAF

Et ce 20 février à Paris, près d'une semaine après l'aval du Bundestag (voir lien ci-dessous), la ministre des Armées Florence Parly recevait les autres parties au programme SCAF, à savoir les Allemands et les Espagnols, pour la signature du contrat de démonstrateurs. 

Lire aussi: Lancement de la phase de démonstrateur du SCAF



Comme convenu, Dassault Aviation (qui pour l’occasion exhibait des maquettes du "NGF") hérite de la maîtrise d'ouvrage pour le futur chasseur, avec Airbus DS  comme "main partners".
Airbus est maître d'oeuvre pour les remote carriers, avec la collaboration de MBDA, collaboration qui était déjà affichée au Bourget en juin 2019, et est également en charge avec Thalès du "Air combat cloud" (ACC), à savoir l'architecture numérique du SCAF.

Safran et MTU s'occuperont de la motorisation, mais le démonstrateur du chasseur utilisera lui vraisemblablement les moteurs M88 du Rafale.

Le tout est chapeauté par la DGA, manager du programme.

Si les démonstrateurs, dont l'avion, doivent voler en 2026, et qu'environ 150 millions d'euros ont été apportés au programme pour ces études préliminaires, il s'agira de trouver 4 milliards d'euros d'ici 2025, et 8 au total d'ici 2030.

S'agissant de la participation espagnole, qui doit se clarifier durant les prochains mois, trois entreprises s'ajoutent à la participation de Madrid, principalement sur les drones. Il s'agit de GMV, SENER Aeroespacial et Tecnobit Grupo Oesia, qui ont annoncé ce 17 février un accord dans le cadre du plan industriel coordonné par le ministère espagnol de la Défense.
La problématique Indra, que l'Espagne insiste pour intégrer au développement de l'ACC en dépit des réticences d'Airbus, reste à régler cependant.


mercredi 19 février 2020

La formation des pilotes de chasse bientôt intégralement sur PC-21 ?


La planètes s'alignent doucement pour un remplacement progressif des Alpha Jet dans l'armée de l'Air. En effet, un récent avis de la DGA ouvre la voie à la commande de nouveaux avions d’entraînement PC-21. Après la migration des escadrons de formation de Tours vers Cognac, ce serait à terme également le cas des effectifs de Cazaux.

Ci-dessus: un PC-21 de Cognac, volant aux côtés d'un Rafale - Jean Luc Brunet/armée de l'Air.


Un an et demi après l'arrivée (rentrée 2018) d'une flotte de 17 avions d'entraînement Pilatus PC-21 dans l'armée de l'Air sur la base aérienne 709 de Cognac, la Direction générale de l’armement (DGA) a publié le 15 février un avis de marché public pour des prestations de mise à disposition et de soutien d’aéronefs PC-21, de leurs matériels d’environnement, travaux d’infrastructure et prestations associés, pour la formation des pilotes de chasse en phase de transition opérationnelle. 

Ce marché qui concerne la maintenance, les infrastructures (à Cognac) et la simulation autour de l'environnement du PC-21, évoque la "phase 4" de la formation des pilotes de chasse, qui se déroule actuellement à Cazaux sur Alpha Jet. 
« Le titulaire mettra à disposition au titre du présent marché : avions PC-21, leurs systèmes d’environnement [systèmes de préparation et de restitution de mission] et certains matériels spécifiques. Il mettra en oeuvre l’ensemble de ces moyens ».
S'il n'est pas précisé combien d'appareils sont requis, un segment compris entre 8 et 10 appareils a été évoqué lors de travaux parlementaires, la cible permettant d'assurer 5 à 8 000 heures de vol annuellement. Ce qui porterait la flotte à Cognac de 17 à 25 ou 27 appareils. L'acquisition concerne aussi un simulateur supplémentaire.

La phase 4 de la formation des pilotes fait l'objet d'un projet "MENTOR" qui vise à fusionner cette dernière avec l'enseignement dispensé à Cognac, tout comme l'ex-programme FOMEDEC (devenu par la suite "Cognac 2016" qui avait mené à l'acquisition des Pilatus) a permis de dissoudre la formation sur TB-30 Epsilon avec la phase suivante sur Alpha Jet... puis Pilatus. Ramenant des effectifs de Tours sur Cognac.


La fin de l'Alpha Jet  ?

Avec cette dernière transition, l'Alpha Jet disparaîtra donc de la formation des pilotes de chasse, mais restera en service dans les escadrons d’entraînement... et bien sûr la Patrouille de France, qui devra évidemment à terme réfléchir à la succession.
Ici c'est principalement l’implantation de Cazaux qui est concernée, et sa 8eme escadre de chasse qui réunit :
  • l'Escadron de transition opérationnelle 1/8 Saintonge
  • l'Escadron de transition opérationnelle 2/8 Nice 
  • l'Escadron d'entraînement 3/8 Côte d'Or.
  • l'Escadron de Soutien Technique Aéronautique 15.008 "Pilat", chargé de la mise en œuvre et la maintenance des Alpha Jet au profit des escadrons 1/8 "Saintonge", 2/8 "Nice" et 3/8 "Côte d'Or"
Attention aux éléments de langage. Quand on parle de "fermer Cazaux", comme depuis un an environ, il s'agit donc bien de la formation. Cela ne concerne pas les multiples autres entités du sites, comme la DGA EV ou les hélicoptères du "Pyrénées". A ce titre, il est toujours d'actualité que l'armée de l'Air récupère à Cazaux les Caracal des forces spéciales Terre basés à Pau au 4ème RHFS. Ce qui sera rendu possible avec l'arrivée à Pau du NH90 destiné aux forces spéciales, avant 2025 normalement.

En revanche pour Cazaux, quid de l'escadron singapourien et de ses Aermacchi M-346 si la 8eme escadre de chasse est réorganisée/déménage à Cognac ?

Enfin, certains se demanderont - légitimement - comment un turbopropulseur comme le Pilatus PC-21 peut remplacer un chasseur à réaction pour la formation de pilotes qui seront pour la plupart directement amener à voler sur Rafale.
Il faut cependant savoir que le PC-21 affiche non seulement des performances exceptionnelles (qui font véritablement l'unanimité chez nous comme dans le monde), mais aussi une avionique qui se rapproche de celle d'un chasseur moderne. L'appareil comme son simulateur à Cognac sont de plus spécifiquement paramétrables pour imiter le comportement d'un Rafale, et disposent d'outils pour l'apprentissage (simulation de pannes par exemple).

Argument ultime, son emploi permet de réaliser des économies substantielles, divisant presque le coût de la formation d'un pilote de moitié. 

Et pour avoir eu la chance récemment de voir sur place une présentation du cockpit comme du simulateur, il s'agit là effectivement d'instruments de tout premier ordre.

lundi 17 février 2020

Conférence sur le futur du "Command & Control" (C2) le 28 février à Pessac


Dans le cadre de la CyberWeek II, les Jeunes IHEDN Nouvelle-Aquitaine ont le plaisir de vous inviter à la conférence : L’apport de l’IA & du Big Data dans les systèmes de Command and Control - Exemple d’application avec le projet ANTICIPE.


Quel est le rôle des nouvelles technologies dans la prise de décision militaire ? Pourquoi utiliser l’intelligence artificielle dans ce domaine ?

Les deux intervenants, Gilles DESCLAUX du laboratoire HEAL-ENSC et le professeur Bernard CLAVERIE, Directeur honoraire de l'ENSC, viendront expliquer comment et pourquoi la gestion moderne des opérations militaires s’appuie sur une conception du commandement & contrôle (C2) totalement imprégnée des dimensions nouvelles des technologies de l’information et de la communication.

Rendez-vous le 28 février à l'Enscbp - Bordeaux INP de Pessac, à 18h.



vendredi 14 février 2020

Lancement de la phase de démonstrateur du SCAF


Le parlement allemand, le Bundestag, a validé mercredi 12 février l'allocation de 77,5 millions d'euros au programme de Système de Combat Aérien Futur (SCAF). De ce fait, les gouvernements français et allemand attribuent à Dassault Aviation, Airbus et leurs partenaires, MTU Aero Engines, Safran, MBDA et Thales, le contrat cadre initial (Phase 1A) qui marque le coup d’envoi du lancement des démonstrateurs du SCAF. Objectif 2026.

Illustrations: Dassault Aviation/Airbus DS


Le refrain est désormais connu concernant les avancements du programme SCAF. On date une étape (ici c'était janvier). Cette "deadline", qui n'en est officiellement pas une, est dépassée, provoquant l'émoi général en France. Mais ce 12 février, le Parlement allemand donne enfin son feu vert. 
Ce contrat-cadre de 155 millions d'euros s’étend sur une période de 18 mois et lance le développement des démonstrateurs et des technologies de pointe, avec pour objectif de débuter les essais en vol dès 2026. Cela concerne non-seulement l'avion de combat, pièce principale du SCAF dont Dassault Aviation a la maîtrise d'oeuvre, mais également les drones servant d'effecteurs déportés, les fameux remote carriers.

Dans la foulée mercredi soir, Airbus et Dassault Aviation ont publié un communiqué impliquant toute l'équipe industrielle du SCAF, précisant que ces partenaires  travaillent depuis début 2019 à la future architecture du système dans le cadre de l’Étude de concept commun (JCS-Joint Concept Study). À présent, le programme SCAF franchit une nouvelle étape décisive avec le lancement de la phase des démonstrateurs.
Dans un premier temps, cette phase sera axée sur les principaux défis technologiques dans chacun des domaines :
  • Next Generation Fighter (NGF) avec Dassault Aviation comme maître d’œuvre et Airbus comme partenaire principal, qui sera le principal élément du Système de Combat Aérien Futur,
  • Unmanned systems Remote Carrier (RC) avec Airbus comme maître d’œuvre et MBDA comme partenaire principal,
  • Combat Cloud (CC) avec Airbus comme maître d’œuvre et Thales comme partenaire principal,Engine avec Safran et MTU comme partenaire principal.
Les entreprises concernées développeront conjointement un environnement de simulation visant à garantir la cohérence des différents démonstrateurs.


A ce stade, pas de trace des espagnols, un an après qu'ils aient rejoint le programme. Leur intégration  sera l'enjeu de la prochaine étape. Celle ci verra l’implication de fournisseurs supplémentaires à partir de la Phase 1B, qui sera lancée à l’issue du succès de la Phase 1A.

Les espagnols... et d'autres d'ailleurs, puisque la ministre de la défense allemande, Annegret Kramp-Karrenbauer, a affirmé le 13 février en conférence de presse espérer que d'autres pays européens rejoindraient bientôt les programmes franco-allemands.













Évoquons enfin le cas des réserves des parlementaires allemands, et du pessimisme latent qui règne dans la presse française au sujet du SCAF.

En effet, si l'accord du Bundestag était planifié pour ce mercredi 12 février, on a vu, avant et après la validation, la quasi intégralité des articles rédigés en français remettre en question la fiabilité du partenaire allemand, évoquant, ici et là, les ambitions industrielles prédatrices de Berlin, ou une culture stratégique largement divergente, et surtout marquée par l'inféodation à... l'OTAN.

Certes les parlementaires allemands ont émis des réserves sur la mainmise du programme par les Français, revendiquant que soient attribuées à des entreprises allemandes un plus grand nombre de technologies clés. 
D'aucuns avancent aussi l'argument que SCAF serait un programme bien plus porteur que MGCS, (le futur char lourd européen, dirigé par l'Allemagne) donnant un poids plus important à la France. Mais ce serait néanmoins sous-estimer l'étendue faramineuse des marchés potentiels du successeur des chars Léopard 2 (on ne comparera pas ici la carrière export du Leclerc face au Léopard).

Remettre en question chaque débat interne aux Allemands sous prétexte même qu'ils existent, semble surtout nous indiquer que l'esprit français est devenu très... vertical, et peu enclin à supporter les subtilités du parlementarisme. Nous serions donc à la merci du Bundestag et de ses débats interminables sur le contrôle des exportations... sur l'attribution des budgets.

Or, c'est justement ce que nous reprochent tous nos partenaires européens: cette volonté française de vouloir décider vite et mieux pour tout le monde, notamment dès qu'il s'agit de défense. Je vous invite à regarder les débats italiens sur la meilleure stratégie à suivre quant au SCAF. Il fut décidé à Rome de suivre - dans un premier temps - Londres dans son projet Tempest plutôt que de suivre le diktat du SCAF dont les grandes décisions ont déjà été prises à Paris.
Autre exemple: à Bruxelles, jouer sur la sensibilité et les "gros sabots" français est même devenu une technique non-dissimulée pour pousser à la surenchère (chose qui se vérifiera sur les budgets spatiaux, la France ne supportant pas d'être passée 2ème financeur depuis la réunion de Séville).

En France, il y a peu - ou pas - de débats sur les questions de défense, qui font l'objet d'un consensus plutôt confortable dans la classe politique comme dans la population. La plupart d'entre nous s'en réjouissent. 

Rien n'interdit de douter de la volonté des Allemands, ces derniers n'ayant il est vrai clairement pas les mêmes objectifs stratégiques que les Français (quoiqu'en matière de puissance aérienne, les intérêts occidentaux se rejoignent). Le récent débat sur une "européanisation" de la dissuasion nucléaire française en est la preuve: Berlin n'en veut pas.
Cependant, SCAF est à l'origine un projet français, porté par la France, vers une dimension européenne. Initialement pressenti pour être franco-britannique, ce sont aujourd'hui les Allemands et les Espagnols qui nous ont rejoints. Il est probable que d'autres nous rejoindront, et nous ne pourrons assumer notre rôle de leader du programme qu'en acceptant et écoutant les inquiétudes, requêtes, questionnements de nos partenaires. Le prochain défi sera d'ailleurs d'intégrer les entreprises espagnoles, Indra en tête.

J'ose donc revendiquer encore le droit d'être optimiste, la coopération industrielle demeurant le moyen à mon sens le plus efficace - et peut-être le seul - de développer de quelconques notions de culture stratégique européenne.
Nous devrions nous inquiéter pour le SCAF s'il existait ne serait-ce qu'une alternative crédible à ce dernier. Ce n'est pas le cas, et dans notre intérêt à tous, nous ne pouvons donc qu'avancer.


mercredi 12 février 2020

Les unités NRBC de l'armée de l'Air mobilisées dans lutte contre le Coronavirus


Les unités de la base aérienne 120 de Cazaux ont été engagées à Istres dans le contexte très sensible du coronavirus. 14 personnels de deux de ses unités expertes dans le domaine Nucléaire Radiologique Biologique Chimique (NRBC) ont en effet été chargées de décontaminé les deux avions de ligne qui ont contribué à rapatrier de Chine les ressortissants français et européens

Source: Ministère des Armées


Vous n'avez pas pu manquer l'information. Les français désirant être rapatriés de la région de Wuhan en Chine ont commencé à bénéficier des services de l'armée de l'Air dès le 31 janvier, avec le rapatriement des premiers de nos ressortissants à Istres via un A340. Vol qui fut suivi d'un second dans les jours suivants, via un A380 civil.

Aussi, le centre d’expertise-sécurité nucléaire NRBC (CE-SN NRBC) et la section d’intervention NRBC de l’escadron de sécurité incendie et de sauvetage (SI NRBC) de la base de Cazaux ont été déployés pour la mission de décontamination des aéronefs ainsi que des matériels utilisés, avec des techniques et produits non agressifs et en limitant un maximum les déchets, nous indique le ministère des Armées.

La mission de ces personnels était de rendre opérationnels dans les meilleurs délais les deux aéronefs. En parallèle, les équipes ont assuré l’accueil et la régulation des flux de centaines des passagers civils dans un contexte "particulier".

Les unités NRBC ont été généralisées dans les armées. Si leur action est heureusement rare, elle demeure ponctuellement primordiale.


lundi 10 février 2020

Discours du Président sur la dissuasion, le 7 février 2020 à l'Ecole de Guerre


De la diffusion aujourd'hui, avec le traditionnel discours quinquennal du Président de la République sur la politique de dissuasion. Un discours très regardé et commenté depuis l'étranger (plus que chez nous), puisqu'il contribue véritablement à affirmer la position de la France, désormais seule et unique puissance nucléaire de l'UE, sur l'échiquier mondial.

Ci-dessus: Emmanuel Macron à l'Ecole de Guerre, le 7 février 2020. Photo Francois Mori/AFP.


Il faut dire qu'outre le rappel des grands principes de la dissuasion nucléaire française, et également l'assurance que la France, fidèle à ses engagements, n'y renoncera pas, Emmanuel Macron, dressant le tableau d'une géopolitique incertaine où la souveraineté nationale demeure le principe clé, y appelle ses partenaires européens à participer à un grand dialogue stratégique.

Un exercice traditionnel pour les Présidents de la 5ème République (à potasser si vous préparez des concours !).


Intégralité du discours du 7 février 2020 à l'Ecole de Guerre en vidéo ci-dessous (1h30):


La retranscription écrite de ce discours est disponible sur le site de l'Elysée (suivre ce lien).

La Tribune propose également de bonnes synthèses du discours, ICI et ICI.


vendredi 7 février 2020

Le H-160 entame sa militarisation


La Direction générale de l’armement (DGA) a notifié le 30 décembre 2019 à Airbus Helicopters et Safran Helicopter Engines, le marché de pré-développement de la militarisation de l’hélicoptère H160.
Pour assurer la continuité des missions de la Marine nationale entre le retrait de service des Alouette III et l’arrivée des Guépard, le ministère des Armées vient de commander une flotte intérimaire d’hélicoptères composée de 12 Dauphin et de 4 H160.

Sources: MINARM


Avec un mois de décalage, le ministère des Armées communique sur le lancement des premiers développements militaires de l'hélicoptère H-160 d'Airbus. Le H-160 est en effet destiné à devenir dans les armées le "Guépard". Le programme "HIL", pour hélicoptère interarmées léger, doit voir arriver les premiers appareils dans les forces en 2026.

Ce marché notifié à Airbus Helicopters et Safran Helicopter Engines (ex-Turbomeca qui produit à Pau les moteurs Arrano du H-160) concerne notamment l’adaptation des instruments de bord, des capteurs et de la cabine pour permettre la réalisation de missions militaires, y compris à partir de bateaux de la Marine Nationale (soit donc militarisation de l’avionique, intégration de capteurs, aménagement de la cabine et navalisation).


Le ministère annonce également qu'en liaison avec l’état-major des armées, la DGA poursuit la définition des performances et des caractéristiques attendues du Guépard et de son système de soutien. Le lancement en réalisation du programme est prévu en 2021. 
En parallèle, les acteurs du programme travaillent ensemble sur les perspectives de maintenance en condition opérationnelle de l'appareil. L’existence d’une flotte d’hélicoptères unique pour les trois armées doit effectivement permettre une organisation du soutien plus performante et optimisée.

Le Guépard équipera les trois armées et remplacera les Gazelle de l’Armée de Terre, les Alouette III, Dauphin et Panther de la Marine Nationale, et les Fennec de l’Armée de l’Air. Il lui reviendra donc d'assurer l'ensemble des missions aujourd'hui confiées à ces flottes.


De plus, afin de faire la transition entre sa très ancienne flotte (Alouette III !) et la future, la Marine Nationale va acquérir une flotte intérimaire d’hélicoptères.

La Direction de la maintenance aéronautique (DMAé) a ainsi commandé le 31 décembre 2019, la location et le soutien de 12 Dauphin au groupement formé par Heli-Union et DCI; après modification des hélicoptères pour leur permettre d’opérer à partir de navires de la Marine nationale, ils entreront en service dès la fin de l’année pour une durée de dix ans.

La DGA a elle notifié le 31 janvier 2020 un marché pour quatre H-160 neufs en location-vente auprès du groupement formé par Airbus Helicopters, Babcock et Safran Helicopters Engines. Utilisés pour des missions de recherche et sauvetage en Atlantique et en Manche, ils seront opérationnels dès 2022 pour une période de 10 ans. Le soutien sera assuré par les industriels avec un engagement de disponibilité élevé. Cette flotte de H160 permettra ainsi d’acquérir, au profit du Guépard, un retour d’expérience en utilisation des hélicoptères et de leur soutien.


jeudi 6 février 2020

L'avion léger de surveillance et de reconnaissance bientôt livré à l'Armée de l'air ?


Un premier "ALSR" de l'Armée de l'air a été aperçu début février au départ de Bordeaux. Cet avion espion à l’apparence civile est un King Air 350 équipé de capteurs pour les besoins des services de renseignement français. Le contrat avait été passé en 2016 auprès de Thales et Sabena Technics, pour deux appareils.

Ci-dessus: le premier ALSR de l'Armée de l'air vu le 3 février 2020 à Mérignac ? - Crédits photo Cédric Guere / Bordeaux Mérignac Spotters


On avait pu apercevoir un de ces modèles en mai 2017 lors de son arrivée à Bordeaux-Mérignac, encore "nu", c'est à dire non équipé de ses moyens de renseignement militaires intégrés par Thalès et Sabena Technics à Mérignac.
Avec plus d'un an de retard (livraison initiale prévue en 2018, puis fin 2019), voilà qu'un premier ALSR - pour avion léger de surveillance et de reconnaissance - a été aperçu décollant de Mérignac ce 3 février. Le signe d'une livraison prochaine aux forces aériennes ?

Arborant une livrée civile, discrétion oblige, il porte néanmoins la cocarde de l'Armée de l'air.

Au printemps 2016, un contrat de 50 millions d'euros avait été passé par la DGA concernant l'achat de deux avions légers de surveillance et de reconnaissance. Une option était incluse pour un troisième appareil. Les appareils en question sont de très polyvalents King Air 350 du fabricant américain Beechcraft.

C'est l'Armée de l'air qui doit réceptionner les ALSR, mais les avions serviront les missions de la DRM et possiblement d'autres services, des entités qui en utilisent déjà, mais loués dans le privé.

Disposant d'une suite de capteurs allant de la boule optronique capable d'observer dans tous les spectres, de jour comme de nuit, aux équipements d’écoute, les ALSR sont prévus pour un équipage de 4 personnes. 
Bien moins endurant qu'un drone MALE, un avion léger a néanmoins pour principale qualité sa facilité d'emploi. Il est parfaitement adapté à des théâtres comme celui du Sahel.

Ces deux appareils (l'option pour un 3ème n'ayant jamais été levée) sont loin de pouvoir répondre aux nécessités de la réalité opérationnelle. c'est pourquoi l'Armée de l'air a exprimé un besoin allant jusqu'à 8 appareils à l'horizon 2030.

Dans le même temps, le programme Archange est lui lancé, programme d' « Avions de Renseignement à CHArge utile de Nouvelle GEnération » qui verra le remplacement des 2 Transall Gabriel par 3 Falcon 8X "Epicure". Dassault Aviation fournira les Falcon, et Thalès les équipera pour le renseignement. 

Enfin, et surtout, les armées verront d'un bon œil la dotation prochaine de la flotte de drones MQ-9 Reaper d'une charge ROEM (renseignement d'origine electro-magnétique).